Van Morrison
Sans jamais atteindre les sommets des charts et, donc, connaître de succès discographique phénoménal, (George I)Van Morrison
est, tout simplement, l'un des tout meilleurs compositeurs-interprètes
de ces quarante dernières années. Pour fixer les idées, sa contribution
artistique, sur la durée, est au moins égale à celle de l'une de ses
influences, Bob Dylan. Aussi bien apprécié par ses fantasques compatriotes Sinéad O'Connor et Paul David Hewson alias Bono, que par le Breton Christophe Miossec ou par l'actuelle First Lady étasunienne, l'ex-chanteur de Them et auteur de "Gloria" continue de marquer, en toute discrétion et au gré de métamorphoses successives, l'histoire de la musique et les musiciens (comme Bruce Springsteen ou Elvis Costello).
Sans oublier les amateurs de ce riche carrefour issu de la convergence
du rythm'n'blues, du blues et du jazz où l'on rencontre Dr. John, Boz Scaggs et quelques autres.
Mais avant d'être choisi en 2002 par la poste irlandaise pour figurer sur un timbre, Van Morrison
a édifié, pierre après pierre, une rigoureuse et formidable carrière.
Né à Belfast d'un père électricien passionné de jazz et de blues et
d'une mère qui n'hésite pas à chanter et danser lorsque l'occasion se
présente, le jeune Morrison écoute Muddy Waters, Hank Williams, John Lee Hooker,
Charlie Parker et Leadbelly. Après avoir fondé, à onze ans, son premier
groupe dans lequel il chante et joue de la guitare, l'adolescent
expérimente l'harmonica et le piano. A quinze ans, Morrison quitte l'école et passe d'une formation à l'autre. C'est au sein de The Javelins, renommé The Monarchs
par la suite, qu'il tient le saxophone offert, comme sa première
guitare, par son père. Le groupe se produit en Ecosse, à Londres puis
dans le sud de l'Allemagne où il enregistre son premier 45t. C'est à son
retour en Irlande qu'il rejoint, en tant que saxophoniste, The Gamblers rebaptisé Them qu'il quittera en 1966 après une tournée aux Etats-Unis.
Après quelques hésitations, Van the Man entame alors, non sans difficultés, une carrière solo. A l'initiative du producteur Bert Berns, rencontré à l'époque de Them, il part à New York pour y enregistrer quatre 45t., dont "Brown Eyed Girl", pour le nouveau label créé par celui-ci, Bang Records. En septembre 1967 paraît, sans son accord, l'album "Blowin' Your Mind!" composé des huit titres de sa première session. Installé à Cambridge et marié à la jeune Californienne Janet Planet, Morrison
forme un groupe expérimental constitué du contrebassiste Tom Kielbania
et du flûtiste John Payne. Mais c'est avec une formation de jazz qu'il
enregistrera, en septembre 1968, l'excellent "Astral Weeks". En début d'année suivante, il part vivre à Woodstock, devenant ainsi le voisin de Bob Dylan et de The Band. Il y produit lui-même ses deux disques suivants, "Moondance" et "His Band and the Street Choir", également remarquables.
Le couple Morrison quitte la côte Est pour la Californie où Van enregistre trois albums en co-production avec Warner, "Tupelo Honey" (1971), "Saint Dominic's Preview" (1972), "Hard Nose the Highway" (1973) et le double live "It's Too Late to Stop Now" (1974)
issu de la tournée de l'été 1973. C'est à cette époque que le chanteur
va développer, lorsque l'auditoire est massif, une panique de la scène.
Il se produira désormais plus volontiers et plus efficacement devant un
public restreint. C'est au cours d'un voyage sur sa terre natale, en
octobre 1973, qu'il va composer l'essentiel des titres de "Veedon Fleece", paru en février 1974. Avec cet album, le dernier enregistré avec le Caledonia Soul Orchestra, le groupe réuni depuis "Moondance", Morrison
clôt une des périodes les plus riches de sa carrière. Etrangement,
aucun des membres n'accompagnera le chanteur sur la scène de Montreux et
un seul morceau de ce dernier disque, "Bulbs", y sera interprété.
Le rythme d'un album par an s'interrompe provisoirement, le bien nommé "A Period of Transition", produit en collaboration avec Dr. John, ne sortant qu'en 1977. Entre temps, Morrison a notamment participé au concert d'adieu de The Band capté pour la postérité par Martin Scorsese dans The Last Waltz.
Il reprend néanmoins entre 1978 et 1980 avec la sortie de trois disques
dont le plus réussi est incontestablement l'opus central, "Into the Music". Les productions des décennies 1980 et 1990 sont davantage en demi-teinte à l'exception notoire de "Irish Heartbeat" (1988), compilation de chansons traditionnelles enregistrée avec le groupe irlandais The Chieftains, et d'"Avalon Sunset" (1989) réputé pour la participation de Cliff Richard sur "Whenever God Shines His Light" et "Have I Told You Lately". En 2003, Morrison quitte Universal ("Down the Road") pour signer avec le fameux label jazz Blue Note, lequel sort un unique album "What's Wrong with This Picture?" nommé aux Grammy Awards. L'artiste demeure actif et populaire puisque ses deux derniers disques (mai 2005 et mars 2006) ont été généralement appréciés.
Montreux 1974
Cette première participation de Van Morrison
au festival suisse est intéressante à plus d'un titre. D'abord parce
que la prestation est typique de l'artiste, ignorant quasiment le public
car tout à sa concentration pour la musique. Ensuite, le programme
offre un florilège de ses genres de prédilection, rythm'n'blues, blues
et jazz. Enfin, parce que Morrison
n'est pas entouré de ses musiciens habituels, ce qui fait ressortir
davantage sa singularité. Parmi eux, le pianiste britannique Pete
Wingfield qui a notamment travaillé avec Freddie King et Jimmy
Witherspoon et le batteur Dallas Taylor qui accompagnait, deux jours
plus tôt, l'une des références du chanteur, Muddy Waters. Ce concert du
30 juin est dominé par le syncopé "Naked In The Jungle" et le splendide "Street Choir" tiré de l'album "His Band and the Street Choir". Morrison joue du saxophone alto sur les deux premiers instrumentaux, "Boffyflow & Spike" (bizarrement renommé sur le DVD "Swiss Cheese") et "Heathrow Shuffle", et utilise sa surprenante technique d'harmoniciste sur "Harmonica Boogie". Le rappel, "Since I Fell For You", n'a pas été filmé ou conservé au montage. La captation n'est d'ailleurs, dans l'ensemble, pas très adroite.
Montreux 1980
Invité pour la deuxième fois (sur les quinze concerts qu'il y donnera jusqu'en 2004) à l'occasion de la 14e édition du festival, Van Morrison se présente avec une formation bien plus étoffée que la précédente. Certains de ses membres ont enregistré avec lui les albums "Into the Music" et "Common One". Quatre des titres du concert sont d'ailleurs issus de ce dernier qui paraîtra le mois suivant. Ce 10 juillet, il succède à B.B. King
sur la scène du Casino. Un peu monochrome, ce concert ne possède pas le
charme du précédent. Avec la présence du guitariste rock John Platania,
de l'ex-saxophoniste et directeur musical de James Brown Pee Wee Ellis et du trompettiste classique reconverti au jazz Mark Isham, Morrison
délaisse également volontiers l'instrument pour interpréter ses
chansons avec l'énergique recueillement qui le caractérise à l'aube des
années 1980. Pas de moment réellement fort donc au cours de ce concert
nettement mieux filmé que le précédent grâce à des moyens techniques
redimensionnés.
Les groupes :
1974
Chant, guitare, saxophone alto et harmonica : Van Morrison
Claviers, chant : Pete Wingfield
Basse, chant : Jerome Rimson
Batterie : Dallas Taylor
1980
Chant, guitare : Van Morrison
Guitare : John Platania
Claviers : Jeff Labes & John Allair
Basse : David Hayes
Batterie : Peter Van Hooke & Dahaud Shaar
Cuivres : Pee Wee Ellis & Mark Isham
Les titres :
1974 (49'28)
1. (It's Not The) Twilight Zone
2. I Like It Like That
3. Foggy Mountain Top
4. Bulbs
5. Boffyflow & Spike
6. Heathrow Shuffle
7. Naked In The Jungle
8. Street Choir
9. Harmonica Boogie
1980 (98'36)
1. Wavelength
2. Kingdom Hall
3. It Stoned Me
4. Troubadours
5. Spirit
6. Joyous Sound
7. Satisfied
8. Ballerina
9. Summertime In England
10. Moondance
11. Haunts Of Ancient Peace
12. Wild Night
13. Listen To The Lion
14. Tupelo Honey
15. Angeliou
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