mercredi 27 août 2014

A Woman Called Golda (une femme nommée golda)

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"... He didn't want that job. But, somebody had to do it."

Le dernier rôle interprété par la grande  aura donc été celui de Golda Meir*, figure marquante, s'il en est, de la création de l'Etat d'Israël et de sa politique pendant un quart de siècle (1949-1974). Diffusé aux Etats-Unis en avril 1982 (soit un peu plus de trois ans après le décès de l'ancien Premier ministre), le téléfilm en deux parties réalisé par le Canado-britannique  dresse une portrait assez détaillé et laudateur de Golda. Narré par Lou Kaddar, sa plus proche collaboratrice à partir de 1948, le scénario co-écrit par  et  s'élabore à partir d'une visite effectuée en 1977 dans l'école du Wilwaukee fréquentée par la jeune Golda Mabovich. De la peur des pogroms russes de Kiev à la veille de la guerre de 1948 en passant par son mariage, la montée en Israël, l'expérience en Kibbutz, à Jérusalem et au sein de la Histadrut (première partie), des successifs conflits à l'accueil du président Sadate par Menahem Begin (seconde partie)A Woman Called Golda relate en deux heures le parcours singulier de cette femme au fort caractère, respectée pour sa simplicité et son authentique empathie à l'égard de son peuple.
Aux côtés de l'excellente  (et de la remarquable ** pour la période jusqu'au début des années 1940) et  tiennent solidement les principaux rôle de soutien. Nommé dans sept catégories des Emmy Awards 1982, le téléfilm produit par Gene Corman et Lynn Guthrie reçut trois récompenses dont celle, à titre posthume, de la meilleure actrice (complétée, l'année suivante, par un "Golden Globe").
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*rôle tenu auparavant par l'Allemande Else Quecke dans 21 Hours at Munich puis par Anne Bancroft dans la pièce "Golda" de William Gibson.
**préférée à Nastassja Kinski en raison de sa moindre célébrité.

Jeune & jolie

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"Mais si, je déconne !"

Troisième film consécutif de produit par Eric et Nicolas Altmayer, ce drame léger, quatre saisons d'une jolie adolescente de dix-sept ans déflorée, ne présente que de très rares intérêts. La présence de la complice  dans l'ultime partie du métrage et les chansons-raccord de la belle (à l'intérieur comme à l'extérieur !) Françoise Hardy. Pour le reste, Jeune & jolie** fait dans le convenu et l'anecdotique un peu racoleur. L'académie et les silences vaguement farouches de l'ancien mannequin  (introduite au cinéma par ) ne suffisent assurément pas à satisfaire un véritable amateur de cinéma.

N.B. : sur le thème de la prostitution occasionnelle ou accidentelle d'une jeune femme, Hoy y mañana de l'Argentin , Slovenka du Slovène  ou le téléfilm Mes chères études d' ont l'avantage d'être plus cohérents tout en développant une problématique soci(ét)ale.
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*le trente cinquième (quinzième long métrage) du cinéaste.
**titre inspiré par celui du magazine (1987-2010) destiné aux jeunes filles de 15 à 24 ans.

Llanto por un bandido (la charge des rebelles)

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Film d'époque, co-production sud-européenne sortie quatre ans après Los GolfosLlanto por un bandido1 figure parmi les quelques productions mineures dans la carrière de . Second film du cinéaste écrit avec 2, cette biographie partielle du bandit José María Pelagio Hinojosa Cobacho dit 'El Tempranillo' (hors-la loi légendaire, sorte de Robin des Bois de la Sierra Morena andalouse) souffre en effet d'une certaine indolence narrative. Le manque de rythme, aggravé par des transitions souvent mal maîtrisées, se traduisant par une nette dissipation de l'attention du spectateur. Les enjeux historiques (pauvreté des populations rurales consécutive à la guerre contre la France, rétablissement de l'absolutisme par Ferdinand VII, développement du brigandage en Espagne entre 1830 et 1840, alliance objective ou circonstancielle de José María avec les Libéraux) ne sont pas réellement abordés. Séduisante sur le papier, la distribution de tête3 se restreint assez vite au seul , surtout connu jusque-là pour avoir tenu le rôle-titre dans Nazarín de  (lequel fait une brève apparition en bourreau au début du métrage).
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1. candidat à l'"Ours d'or" de la 14e Berlinale (titre alternatif en français : "Les Bandits").
2.  et  collaboreront une troisième fois pour le scénario de Muere una mujer (1961) réalisé par le premier.
3.  n'apparaît que très épisodiquement, les Français  et  ne sont également titulaires que de rôles peu significatifs (le second disparaît au bout d'un quart d'heure).



mardi 26 août 2014

'Heder 514 (room 514)

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Original dans son sujet comme dans son traitement, ce premier film de  constitue une authentique bonne surprise. En s'inspirant de faits réels, le cinéaste telavivien quadragénaire aborde en effet plusieurs thèmes connexes relatifs au statut de la femme et de l'armée dans la société israélienne. Quasi huis clos centré autour d'un personnage féminin, 'Heder 514* (חדר 514) met en scène, de manière volontairement très épurée, les successifs interrogatoires menés par une jeune incorporée dans la police militaire visant à inculper un officier d'une unité des forces spéciales pour violences inappropriées. A partir de cette situation d'investigation, le scénario soulève la question fondamentale du rôle de la femme et de l'inévitable, possiblement déséquilibré rapport de force qui s'instaure dans de telles circonstances d'altérité. La détermination de 'Hanna, bientôt libérée de ses obligations militaires, semble renforcée par son appartenance à la communauté russe, d'immigration récente, mais sans doute aussi par l'abandon du foyer familial par son père, rentré dans son pays d'origine. La dissimulation solidaire (couverture) tient également un rôle important puisque à la fois remise en cause par le soldat accusateur dans le cadre de l'enquête et observée par 'Hanna (laquelle entretient, dans la salle 514, des relations sexuelles avec son supérieur immédiat, sur le point de se marier).
Réalisé en quatre jours, 'Heder 514 laisse en partie transparaitre l'urgence de sa production, les plans-séquence, la discrète mobilité de la caméra, les énigmatiques contrepoints solitaires et désaturés, le rôle déterminant des dialogues contrebalançant cette fugitive impression.  s'affranchit du strict huis clos en tournant quelques scènes dans un bus (il en profite pour y apparaitre !), un environnement dans lequel la subordination n'a plus cours. La solide interprétation des acteurs, débutants ou peu expérimentés, est un véritable atout. Constamment présente à l'écran,  réussit une difficile composition faite d'autorité, de dureté, d'implication, de détachement et de vulnérabilité. Nous avons hâte de la retrouver dans un autre et différent rôle principal.
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*présenté en première au 11e Festival de Tribeca (où le réalisateur a obtenu, ex æquo, une mention spéciale du jury - "Best New Narrative Director").

lundi 25 août 2014

4 mosche di velluto grigio (quatre mouches de velours gris)

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Au début du film, le personnage central s'exclame : "qu'est-ce que ce délire ?", une interrogation qui pourrait tout aussi bien se poser à propos de ce dernier volet de la "Trilogia degli animali" également produit par Salvatore Argento. La solitude (celle à l'œuvre dans L'Uccello dalle piume di cristallo) semblait mieux convenir à  puisque, comme pour  et un résultat au moins aussi médiocre, il fait ici à nouveau équipe avec deux co-scénaristes, les débutants Luigi Cozzi et Mario Foglietti. Une relation triangulaire doit donc être propice à la "ponte" de telles inepties, dans le cas présent une histoire puérile et foncièrement incohérente. Seul le casting international surprend un peu, constitué principalement des Etasuniens  et  (assez quelconques), du Français  et du Napolitain (américanisé) . Ce faux giallo fut, en outre, à l'origine d'une brouille durable* entre  et Ennio Morricone. J'ai toujours considéré surfaite la réputation du cinéaste romain ; 4 mosche di velluto grigio conforte de manière éclatante cette profonde conviction.
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*la réconciliation ne fut actée qu'en 1996, à l'occasion de la production du Sindrome di Stendhal.

HaMachgui'him (les voisins de Dieu)

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Produit par Marek Rozenbaum et Jérôme Bleitrach*, le premier long métrage de Meni Yaesh n'est pas de nature à nous réconcilier avec le jeune cinéma israélien. Cette peu édifiante histoire d'un trio de pseudo observants auto-investis d'une mission de "surveillance" de leur quartier de Bat-Yam reste dans la plus profonde superficialité subjective (niaiserie ?). Sans aucun recul ni mise en perspective, HaMachgui'him** (המשגיחים) tend à faire croire au caractère intransigeant, exclusif et violent de l'orthodoxie judaïque (breslévienne ou non). Un total contresens à peine atténué par le final, monté ex abrupto. Traiter de religion ne rend, de toute évidence, pas forcément... spirituel !
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*promoteurs notamment des deux premiers longs métrages de .
**candidat à la "Caméra d'or" du 65e Festival de Cannes, le film a été nommé dans neuf catégories des "Ophir" 2012.

Los Golfos (les voyous)

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A vingt-sept ans, la carrière de  ne compte que trois courts métrages dont deux documentaires. le récent diplômé de l'I.I.E.C.M.* rencontre, par l'intermédiaire de son frère aîné le peintre Antonio Saura Atarés, Pedro 'Pere' Portabella qui se lance dans la production et accepte de financer son premier long. Le scénario, co-signé par Mario Camus et Daniel Sueiro**, met en scène un petit groupe disparate de jeunes hommes pauvres et désœuvrés se livrant à divers larcins. Ses membres consentent d'unir leurs actions afin de réunir les fonds nécessaires à l'engagement de l'un d'entre eux, l'apprenti torero Juan, à sa première corrida. La censure préalable dont il a fait l'objet et les coupures opérées sur le film après sa réalisation dénaturent les intentions de , altère sa lisibilité et rendent difficile une juste appréciation de Los Golfos.
Le regard de documentariste, encore assez prégnant, contribue toutefois à l'intérêt de ce drame. Plus qu'une influence du néoréalisme italien ou des "Nouvelles vagues", il existe sans doute chez  la volonté d'ancrer sa narration dans un lieu et un contexte déterminés, sans équivoque. De ce point de vue, les nombreuses séquences tournées dans le Madrid de la toute fin des années 1950 ont une valeur inestimable. Le dénuement de l'Espagne franquiste (encore isolée avant sa prochaine ouverture à l'Europe), l'énergie de sa population la plus modeste, la nette dichotomie (dissociation) entre classes sociales, l'insidieuse acculturation d'inspiration anglo-saxonne trouvent ici une rare, belle et franche illustration. L'emploi d'acteurs pour la plupart non professionnels accentue le réalisme du film, son caractère spontané, contingent. Proposé pour représenter son pays et sélectionné pour la 13e édition du Festival de CannesLos Golfos ne sortira, paradoxalement, en salles que deux ans plus tard, y obtenant une audience dérisoire.
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*Instituto de Investigaciones y Experiencias Cinematográficas de Madrid
**le premier passera bientôt à la réalisation, le duo collaborant une seconde fois pour le drame Los Farsantes.

vendredi 22 août 2014

Out of the Furnace (les brasiers de la colère)

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"You got a problem with me?"

Après le succès inattendu de son premier film, Crazy Heart, nous attendions un peu  au tournant. Le public n'a, cette fois, pas vraiment été au rendez-vous1. Il existe pourtant une certaine parenté entre ces deux drames. Car si l'acteur devenu cinéaste n'est arrivé qu'incidemment sur le projet2, il l'a assez largement influencé en remaniant le scénario initial. Les violences (physiques, verbales, sociales, institutionnelles) indisposent, il est vrai, dès l'entame du métrage. Un facteur semble-t-il indispensable pour  dans sa volonté de mettre en avant des hommes simples, ouvriers oubliés de la Rust Belt, souvent malmenés et contraints de prendre leurs "affaires" en main. Commune histoire de frères dissemblables (divergents) et de vengeance, Out of the Furnace possède quelques arguments. Parmi lesquels l'indéniable adresse du réalisateur et la solidité de son casting (3). Pas assez cependant pour le revoir une seconde fois.
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1. 11M$ de recettes US, moins de 3M$ à l'international pour un budget de 22M$.
2. le script spéculatif de  (The Dynamiter) devait initialement être réalisé par Ridley Scott avec Leonardo DiCaprio dans le rôle principal (leur participation s'est ensuite transformé investissement financier). Rupert Sanders a brièvement précédé  à la direction.
3. le rôle d'Harlan DeGroat a d'abord été proposé à Viggo Mortensen ; Billy Bob Thornton a ensuite été pressenti pour tenir le personnage.



jeudi 21 août 2014

Lilith

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"Rapture!"

Lorsqu'il entame la production de son dixième film,  sait probablement qu'il sera le dernier. Il opte pour l'adaptation du deuxième et plus connu roman, publié en 1961, de Jack Richard Salamanca. Un récit à la fois délicat et intrigant autour du déséquilibre mental et de son accompagnement (plus que folie et traitement), précurseur du courant antipsychiatrique de cette décennie, lui-même influencé par la psychanalyse mais aussi par les travaux d'Eugène Minkowski sur la schizophrénie. Celui de la relation curative évoluant en attirance réciproque, troublée, subjectivement fantasmée entre une patiente singulière et un aide-rééducateur débutant. Progressif "ravissement"1 de l'innocence présumée fondé pour partie sur les non-dits ou des ellipses.
Adroite et fluide, la réalisation de  (associé une nouvelle fois au chef-opérateur Eugen Schüfftan) alterne de manière pertinente un réalisme formel et un symbolisme figuré (renforcé par le choix du noir et blanc et par les compositions jazz de Kenyon Hopkins2). L'interprétation de 3 motive toutes les louanges aux côtés de  sobre, tout en retenu. Les acteurs de soutien ( - dans son premier rôle au cinéma - et la participation pour une scène de ) ne manquent pas non plus d'intérêt. Ce drame produit par la Columbia constitue enfin une excellente réponse antithétique au Shock Corridor de  sorti l'année précédente.
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1. ou "extase" et non "transport" selon l'imbécile traduction des sous-titres !
2. auteur notamment des partitions de Baby Doll, 12 Angry Men et The Fugitive Kind.
3. nommée aux 22e Golden Globes.


HaShoter (le policier)

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Affligeant. Seul qualificatif synthétique me venant à l'esprit après le visionnage du premier long métrage de . Un scénario inepte, une réalisation laborieuse et non maitrisée (je n'ai pourtant pas l'habitude de blâmer les débutants), des acteurs sans réelle qualité, HaShoter (השוטר) se révèle d'une totale insignifiance... et néanmoins nommé dans sept catégories des "Ophirs" 2011. Serait-il à ce point représentatif de la perte de vitalité du cinéma israélien depuis quelques années ?