mercredi 25 novembre 2015

K-19: The Widowmaker (k-19 : le piège des profondeurs)

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"- Your duty is clear. You must save their lives.
- My duty is to defend the state..."

Quatrième (tant sur le plan de la chronologie qu'à celui des recettes au box-office US1) des grandes productions hollywoodiennes prenant pour décor un sous-marin militaire, K-19: The Widowmaker s'inspire d'un événement réel survenu le 4 juillet2 1961 au cours de la mission initiale confiée au premier submersible soviétique porteur de missiles nucléaires balistiques. Une histoire relatée dans l'un de ses ouvrages par l'ancien capitaine de l'US Navy Peter A. Huchthausen3 adaptée par le dramaturge australien . Avec la particularité, pour un film étasunien, de proposer uniquement le point de vue des officiers et membres d'équipage du sous-marin de la classe 658 ainsi que, brièvement, celui de l'état-major de la marine soviétique.
Malgré des échecs lors d'exercices en raison de défaillances techniques et de quelques accidents défavorables, les derniers travaux de construction du K-19 sont terminés dans l'urgence afin de mener aussitôt une mission déterminante à l'égard du rival américain dans la course à l'armement. En raison d'une conduite considérée comme insubordonnée, le capitaine Mikhail Polenin est placé sous l'autorité de son homologue Alexei Vostrikov, fils d'un illustre révolutionnaire envoyé en goulag et époux d'une nièce d'un membre du politburo. Celui-ci soumet rapidement l'équipage à divers exercices destinés à améliorer l'efficacité de ses interventions. Depuis la banquise islandaise, le sous-marin réussit le tir de missile-test sans charge décidé par l'amirauté. Mais peu après, dans l'Atlantique à proximité d'une base de l'OTAN, une avarie du système de refroidissement de l'un de ses réacteurs est constatée, laquelle met en péril l'équipage et l'environnement immédiat du navire. Une réparation de fortune est tentée en dépit de la forte radioactivité dans le compartiment concerné.
Le septième long métrage de  (le premier co-produit par la cinéaste californienne4possédait, a priori, au moins deux atouts significatif. D'abord son scénario, écrit par 5 à partir d'un fait historique gardé longtemps secret, script documenté et amendé grâce aux remarques formulées par des conseillers navals (parmi lesquels, au moyen d'une lettre adressée spontanément aux promoteurs du film, le capitaine Nikolai Vladimirovich Zateyev lui-même). Ensuite le choix des têtes d'affiche, rencontre inédite entre 6 et son cadet  (acteurs estampillés, depuis peu pour le second, "starwarsiens" à deux époques différentes). S'il ne présente pas de sérieuse faille sur le plan de la production, K-19 (sous-marin surnommé "affectueusement" 'Hiroshima' par son équipage pour d'évidentes raisons) ne parvient néanmoins jamais à rendre l'intensité de ce drame véritablement sensible, y compris au cours de la seconde partie. L'opposition de caractères entre les deux capitaines parait aussi un peu factice. Les personnages secondaires, pourtant tenus par plusieurs solides acteurs (, le Canadien ...), ont quelque mal à sortir du lot. L'échec commercial connu par le film, disproportionné compte tenu de son intérêt global, n'a fort heureusement pas eu de conséquences préjudiciables sur le parcours ultérieur de 6.
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1. The Hunt for Red October (1990) : 122M$ de recettes (pour un budget de 30M$), Crimson Tide (1995) : 91M$ (53M$), U-571 (2000) : 77M$ (62M$), K-19: The Widowmaker : 35M$ (100M$).
2. comme chacun sait, date de la fête nationale étasunienne.
3. "K-19: the widowmaker: the secret story of the Soviet nuclear submarine" (2002), écrivain auquel on doit aussi le livre à l'origine du téléfilm Hostile Waters (1997) de .
4. avec Edward S. Feldman (dernier investissement de l'ancien collaborateur de la Fox), producteur, entre autres, de Witness (1985) et sur Near Dark (1987) et avec l'Islandais Sigurjon Sighvatsson (The Weight of Water).
5. co-signataire (son premier scénario pour le cinéma) de l'adaptation de The Weight of Water, le précédent film de .
6. absent des écrans depuis le drame horrifique What Lies Beneath (2000) de , notamment en raison du refus de plusieurs propositions.  possède ici, une première dans sa carrière, le statut de producteur exécutif (la seconde fois pour le drame de l'Ecossais Extraordinary Measure).
7. l'ex-épouse de James Cameron est, en effet, devenue ensuite la première femme récompensée par un DGA Award, un BAFTA et un "Oscar" de la meilleure réalisation.




dimanche 22 novembre 2015

OSS 117 se déchaîne

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"Vous savez bien qu'officiellement des gens comme nous... ça n'existe pas."

Troisième adaptation1 d'un roman de la populaire série d'espionnage signée entre 1949 et 1963 par OSS 117 se déchaîne est aussi le premier des quatre films issus de cette série2 réalisés par . Changement radical de genre et d'époque pour l'un des cinéastes (attitrés) de 3. Cette production franco-italienne promue par le duo Paul Cadéac-Cyril Grize ne répond en fait pas aux attentes suscitées par l'épilogue documentaire du métrage dans lequel sont rappelés l'importance stratégique des sous-marins nucléaires lanceurs d'engins et le risque, en pleine guerre froide, de l'installation d'instruments de détection antagonistes.
Le scénario co-écrit par Pierre Foucaud4 et 5 ne noue, en effet, aucune intrigue réellement consistante et significative. D'emblée assez faibles, les enjeux de la mission confiée à Hubert Bonisseur de La Bath, alias OSS 117 le restent tout au long du métrage. Le meurtre, par un groupe au service de l'adversaire soviétique, d'un agent étasunien au cours d'une plongée dans les eaux de Bonifacio sert ainsi surtout de prétexte à d'incessantes, quoique vaines sur le plan narratif, gesticulations en tous genres. OSS 117 se déchaîne ne peut, en outre, tenir la comparaison avec l'opus inaugural de la franchise James Bond, exploité en salles neuf (cinq en France) mois auparavant. Seule la séquence de combat sous-marin (aurait-elle inspiré celle, bien plus massive et grouillante, de Thunderball ?) parvient à nous tirer un peu de notre relative torpeur. Le comédien 6 ne possède pas non plus le charisme et l'énergique virilité de l'Ecossais Sean Connery. Le charme de la gironde 7 opère aussi nettement moins que celui de la plupart des Bond's Girls. Parmi les seconds rôles (tête d'affiche,  ne fait pourtant que quelques rares apparitions à l'écran) apporte heureusement le soupçon de menace sans lequel le film passerait sans doute pour le simple récit d'une embrouillée villégiature méridionale.
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1. venant après O.S.S. 117 n'est pas mort (1957) de  avec  dans le rôle-titre et Le Bal des espions (1960) réalisé par  et  à partir de "Documents à vendre" non libre de droits, obligeant producteurs et scénaristes à renommer le personnage principal en Brian Cannon (alias Caruthers, responsable de la CIA dans "Romance de la mort" du même ) joué par .
2. les trois autres étant Banco à Bangkok pour OSS 117 (1964), Furia à Bahia pour OSS 117 (1965) et Pas de roses pour O.S.S. 117 (1968) ;  puis  ont repris respectivement le rôle principal dans le troisième et quatrième volets.
3.  venaient de diriger le disciple de Jean Cocteau dans quatre films d'aventure en costumes consécutifs. Il lui confiera ensuite le double rôle principal dans la trilogie Fantômas (1964-1967).
4. réalisateur du polar Série noire (premier des trois longs métrages du cinéaste girondin) produit en 1955 par .
5. peintre impressioniste, écrivain ("La Garde meurt à Stan Creek"), scénariste du cinéaste brésilien Alberto Cavalcanti, ami du chef- op. Gabriel Figuerroa, journaliste (rédacteur en chef du journal "Détective", promoteur de l'original hebdomadaire médical "Tonus").
6. surtout connu pour ses premiers rôles dans des films d'aventure fantastique (The 7th Voyage of SinbadThe 3 Worlds of GulliverJack the Giant Killer) et pour avoir été le partenaire de Spencer Tracy et Frank Sinatra dans The Devil at 4 O'Clock.
7. l'actrice étasunienne était jusque-là employée par le cinéma italien, notamment dans quatre films de la série comique Totò, récente titulaire d'un petit rôle dans le  .


vendredi 20 novembre 2015

The Fall

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"I think he... feels the pain acutely. Just that he get pleasure from it."

Les séries policières britanniques produites ces dernières années ont tenté, avec plus ou moins de réussite, de s'affranchir des normes du genre établies outre-Atlantique. SherlockLuther ou Broadchurch ont, chacun à sa façon, fondé leur succès sur cette originalité particulariste. Ecrit par  (co-scénariste de serials et téléfilms parmi lesquels Prime Suspect 2 et The Hanging Gale), The Fall se démarque également assez nettement de ce que nous proposent habituellement les chaînes de télévision. La lenteur initiale de la progression narrative étonne d'emblée, le scénario prenant en effet le temps d'introduire les situations, les personnages sans pour autant se refuser quelques inattendues et surprenantes précipitations dans le cours des événements.
Le récit imaginé par  suit en parallèle deux protagonistes. D'une part Paul Spector, tueur en série de jeunes femmes assez semblables tant sur le plan de l'apparence qu'à celui du milieu social. Marié et père de deux jeunes enfants, il choisit ses proies*, repère les lieux (leur domicile) de l'agression et, quand il le peut, met étrangement en scène le cadavre des victimes. De l'autre Stella Gibson, commissaire divisionnaire de Londres appelée en soutien par Jim Burns, préfet de la police de Belfast, pour faire avancer l'investigation sur le meurtre d'Alice Monroe, jeune architecte et bru du ministre de l'intérieur nord-irlandais. La découverte par sa sœur du corps de l'avocate Sarah Kay incite Gibson, dès lors chargée officiellement de l'enquête, à établir un lien entre les deux crimes mais aussi avec un précédent.
Au fil des épisodes, la narration de The Fall se densifie de manière assez significative.  prend notamment le soin de développer la psychologie de Spector et, dans une moindre mesure, l'idiosyncrasie de Gibson et son co-réalisateur, le Belge flamand Jakob Verbruggen, trouvent également d'intéressants facteurs de tension dramatique, atmosphères et points de vue (en particulier la prise de vue en plongée à partir d'un plafond virtuel de la maison des Spector). Les acteurs principaux contribuent bien sûr à l'attractivité de la série. Faut-il encore souligner les singulières qualités interprétatives de  (affinées depuis son inoubliable personnage de Dana Scully dans la série The X Files) ? La prestation de ** constitue une plaisante surprise ; l'acteur nord-irlandais apporte indubitablement le subtil contraste requis pour faire de Paul Spector un bien troublant criminel. Le casting de soutien (, la jeunette ...) se montre lui aussi solide. Co-produit et diffusé depuis mai 2013 par la BBCThe Fall entamera l'année prochaine sa troisième saison.
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*"They are not victims of chance, they are victims of choice."
**découvert dans un des seconds rôles du Marie Antoinette de , titulaire ensuite notamment du personnage du Sheriff Graham/The Huntsman dans la série Once Upon a Time.




Episodes

Saison 1
  1. Un tueur dans la nuit (Dark Descent)
  2. Mise en scène (Darkness Visible)
  3. Insolence et ivresse (Insolence & Wine)
  4. Frustrations (My Adventurous Song)
  5. Regarde-moi (The Vast Abyss)
Saison 2
  1. Le droit chemin (Walk the Line)
  2. Il s'appelait Peter (One Named Peter)
  3. Toujours plus sombre (It's Always Darkest)
  4. Intrusion (Strangler)
  5. La chute (The Fall)
  6. L'affrontement (In Summation)

vendredi 13 novembre 2015

How I Live Now (how i live now, maintenant c'est ma vie)

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"I'm a f.cking curse."

Diffusée en "présentation spéciale" lors du 33e TIFF, cette adaptation du premier roman (2004) de l'étasunienne installée à Londres Meg Rosoff surprend sans pour autant convaincre. Survival adolescent atypique au cours duquel se noue une histoire d'amour en temps de guerre, How I Live Now ne mérite en réalité l'attention qu'en raison de la présence de  dans le rôle principal mais aussi et surtout de l'inspirée réalisation de . Le récit imaginé par l'ex-publicitaire ne présente, en effet, qu'un intérêt relativement mineur. Celui de la jeune orpheline de mère Elizabeth alias Daisy, véritable ch.euse à la fois autocritique et centrée sur elle-même, en villégiature non désirée chez de lointains cousins résidant dans la campagne britannique. Lorsque la loi martiale est décrétée à la suite d'une meurtrière explosion nucléaire à Londres, Daisy décide ne pas repartir aux Etats-Unis grâce au billet remis par un représentant du consulat et de partager le sort de Piper, Isaac et Eddie. Le groupe abandonne bientôt la demeure familiale pour échapper au déplacement de population organisé par les autorités militaires. Un matin à l'aube, une troupe de soldats pénètre dans la grange qu'il occupe. Piper et Daisy sont alors séparées des deux garçons.
Le scénario co-signé par Jeremy Brock, Penelope Skinner et Tony Grisoni (avec une contribution de Jack Thorne) apporte peu de changements significatifs à l'ouvrage originel. How I Live Now se limite ainsi à exploiter un contexte d'abord menaçant puis de lointaine et chaotique belligérance. Les motifs du déclenchement des hostilités, fondées initialement sur des actions terroristes d'envergure, comme la nature de l'agresseur demeurent volontairement inconnus. La vraisemblance des situations ne semble pas non plus une des priorités de ce drame pour l'essentiel intimiste. Sans réels enjeux narratifs, la profonde mutation psychologique de Daisy aux cours des événements ne suffisant pas à nous satisfaire pour de bon sur ce plan, le film nous incite donc à porter notre attention au traitement lyrique adopté par . Le talent de documentariste s'exprime à nouveau de belle et singulière façon. Le cinéaste écossais traduit en particulier fort bien la rupture d'harmonie qui s'instaure, la radicale transformation de la nature (celle des paysages du Pays de Galles), élément déterminant du récit. Pour illustrer visuellement ce basculement de paradis à enfer terrestres, il change de mode de tournage, passant d'une prise de vue en caméra portée à un cadrage fixe, de transitions douces à brutales. Le casting se révèle, au final, moins décisif qu'attendu ( voulait d'ailleurs initialement avoir recours à des acteurs inconnus). Aux côtés de  (Lo Imposible), de  (remarqué dans The Boys Are Back puis dans For Those in Peril), de la jeune débutante  ou encore d' (qui n'apparaît que dans une unique scène) déçoit un peu, notamment si l'on compare sa prestation à celles dans The Way Back et HannaHow I Live Now n'est rien de plus qu'une plaisante curiosité.