vendredi 4 avril 2014

Goodfellas (les affranchis)

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"If you're part of a crew, nobody ever tells you there're going to kill you. It doesn't happening that way. There aren't any arguments or curses like in the movies..."

A cinq ans d'intervalle,  porte à l'écran, avec le concours de l'auteur, deux ouvrages du journaliste new-yorkais Nicholas Pileggi. Publié en 1986, "Wiseguy: Life in a Mafia Family" relatait le parcours du gangster irlando-sicilien Henry Hill1, dénonciateur de ses complices au F.B.I. Goodfellas2, troisième film de  produit par Irwin Winkler, en illustre plusieurs étapes décisives. Il débute par une scène (à la violence un peu grotesque) étrange parce qu'isolée de son contexte mais utile pour donner le ton du récit. Malgré leurs significatives dissemblances, en premier lieu un scénario ici bien plus construit et la moindre influence du christianisme, cette adaptation s'inscrit bien dans la lignée de Mean Streets. Amitiés, ascension dans le milieu mafieux et surtout respect/transgression des "règles familiales" structurent en effet le destin des trois principaux protagonistes et de leur mentor. Chacun des membres de l'hétéroclite trio constitué de Ray Liotta3 (et le jeune ), de 4 et de  incarnant une déviance particulière à l'égard de la "déontologie" prônée par Paul(ie) Cicero (la figure paternelle de substitution jouée par ). Je considère la première des près de deux heures trente du métrage comme la plus réussie, l'enthousiasme et l'adresse de  y sont manifestes, tant à travers le rythme de la narration que sur le plan visuel. Le cinéaste a d'ailleurs obtenu l'unique "Lion d'argent" de sa carrière lors de la 47e Mostra parmi les nombreux prix5 venus récompenser le film. Goodfellas est enfin entré en 2000 au National Film Registry.
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1. attaché à la famille Lucchese (l'une des cinq familles de la Cosa Nostra aux Etats-Unis) sous l'autorité du caporegime Paul Vario.
2. classé deuxième (derrière The Godfather) des dix meilleurs films de gangsters selon l'American Film Institute.
3. Tom Cruise et Madonna (sic !) étaient le premier choix des producteurs pour Henry et Karen Hill.
4. Al Pacino John Malkovich ont refusé de tenir le rôle de Jimmy Conway.
5. notamment les "Oscars" des meilleurs acteurs de soutien ( et ) et film.



mercredi 2 avril 2014

Interview with the Vampire: The Vampire Chronicles (entretien avec un vampire)

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"For what could the damned really have to say to the damned?"

Les diverses tentatives modernes de continuation ou de réécriture du mythe vampirique1 ont, le plus souvent, été décevantes. Celle d' (romancière étasunienne née Howard Allen O'Brien) n'échappe pas au principe ; l'adaptation par l'Irlandais  du premier volume, publié en 1976, de la série "The Vampire Chronicles"2 vient également le confirmer. Longue remémoration existentielle d'un revenant atypique, Interview with the Vampire ne présente qu'un intérêt relativement limité. Louis de Pointe du Lac, personnage central et narrateur tenu par 3, possède en effet la particularité d'être un vampire "sentimental"4, humain ("..., trop humain" ?), exprimant une conscience malheureuse et souffrante. Le scénario repose pour l'essentiel sur cette spécificité, insuffisante pour alimenter un récit de près de deux heures. Certains aspects sous-jacents (culpabilité, homosexualité, inceste...) ne sont pas non plus abordés avec finesse. Plus que l'actuelle unique confrontation entre  et 5, la présence d' ou de  (remplaçant du défunt River Phoenix), ce sont l'interprétation de (la plus tout à fait débutante) 6, la photographie du Français Philippe Rousselot et les décors de Dante Ferretti (fidèle collaborateur de ) qui constituent les quelques éléments de fixation du film co-produit par David Geffen.
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1. apparu au début du XVIIIe siècle, codifié ensuite notamment par l'Italo-anglais John Polidori et l'Irlandais Bram Stoker.
2. le troisième ayant donné lieu à Queen of the Damned.
3. choisi après le refus de Jeremy Irons. Pendant l'écriture de son roman,  avait pensé à Alain Delon pour ce rôle, à Rutger Hauer pour celui de Lestat de Lioncourt.
4. défini à travers quelques répliques : "Un immortel avec la passion d'un mortel", "Ton mal est de ne pouvoir faire le mal"...
5. qui a un peu tendance à "vampiriser" son partenaire lorsqu'ils sont ensemble à l'écran. Le duo a été désigné "pire couple" (ex æquo avec - dans The Specialist) lors de 15e Razzie Awards.
6. alors âgée de douze ans (Claudia, son personnage, a cinq ans dans l'ouvrage). Christina RicciDominique SwainJulia StilesErin Moore et Evan Rachel Wood ont auditionné pour le rôle.



Taste the Blood of Dracula (une messe pour dracula)

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Première réalisation pour le cinéma du natif hongrois *, ce quatrième des sept volets** de la franchise Dracula produite par la Hammer avec  dans le rôle-titre constitue fort probablement le plus épouvantable (au deuxième sens du vocable) du "lot". En cause, d'abord la grande médiocrité du scénario d' (The Kiss of the Vampire) mais aussi de bien piteux décors et acteurs. Très réticent à poursuivre l'aventure telle que la concevait le studio,  ne devait d'ailleurs pas y participer. Il fut, en quelque sorte, "ressuscité" tardivement (sous la pression du distributeur US et au détriment de ), obligeant  à réintégrer son personnage aux forceps dans le script. Unique justification de l'acquisition de ce titre : ne pas dépareiller la collection.
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*désigné pire réalisateur les des 4e Razzie Awards aux cours desquels The Lonely Lady fit une... razzia !

mardi 1 avril 2014

The 13th Warrior (le 13ème guerrier)

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Ce second visionnage apporte, de manière patente, la preuve que le premier ne m'avait laissé presque aucun souvenir. Le roman "Eaters of the Dead" (1976) de , fondé sur des éléments biographico-légendaires également à l'origine des diverses versions de Beowulf, ne fait en effet pas partie des œuvres les plus originales et réussies de l'écrivain-scénariste-producteur natif de Chicago. Pâle et pesant ersatz arabo-scandinave du formidable Shichinin no samurai de KurosawaThe 13th Warrior manque singulièrement de subtilité et de lyrisme pour prétendre rivaliser, sur les plans artistique et commercial, avec les meilleures productions du genre**.
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*un peu moins de 62M$ de recettes (dont près de 33M$ aux Etats-Unis) pour un budget de 85M$ (ou, selon les sources, 160M$).
**réalisme fantastique.



The Mortal Storm (la tempête qui tue)

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"Go back to what Martin?"

Le jour de la sortie de The Mortal Storm aux Etats-Unis, la wehrmacht entrait dans Paris abandonné par les trois-quarts de ses habitants. Le message humaniste1, pacifiste et anti-nazi2 de cette adaptation du roman éponyme de la Britannique Phyllis Bottome déplut évidemment aux despotes du IIIe reich et le film fut interdit ainsi que tous ceux portant la bannière MGM. Il s'agit pourtant moins d'un brulot politique que d'un conte épigrammatique3 prenant pour cadre une petite localité montagneuse4 et universitaire du Sud de l'Allemagne. Le scénario écrit par un trio anglo-germano-autrichien débute d'ailleurs (le 30 janvier 19335, date funeste !) à la manière d'une aimable comédie dramatique lubitscho-capraienne. Sans dénaturer en profondeur le propos dramatique (ni compromis narratif final), la suite n'évite cependant pas le caractère souvent caricatural, un peu stéréotypé des productions hollywoodiennes lorsqu'elles abordent des thèmes aussi fondamentaux. Nous éprouvons évidemment de la sympathie pour la quatrième et ultime rencontre amoureuse entre  et  même si elle ne constitue qu'un atout marginal à l'égard du récit. A l'exception de  et de , les acteurs de soutien (parmi lesquels 6 et le jeune débutant ) ont plutôt du mal à se faire remarquer.
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1. "Our story asks: How soon will man find wisdom in his heart and build a lasting shelter against his ignorant fears?" (extrait du prologue en voix-off)
2. et implicitement favorable à l'engagement des Etats-Unis (d'abord neutre, en "état d'urgence nationale limitée" puis fournisseurs d'armements) dans le conflit déjà mondial. Le pays présidé par Roosevelt n'interviendra qu'en décembre 1941, en réaction à l'attaque de Pearl Harbour.
3. comme le sera (contrairement aux films de Fritz Lang sur le sujet ou au singulier Hitler's Children, également avec ) le plus tardif Tomorrow, The World!.
4. en réalité Salt Lake City (Utah) ville natale de .
5. soit plus de cinq ans avant l'Anschluss (mars 1938).
6. déjà partenaire à deux reprises (Three Comrades et The Shining Hour réalisés par ) de .