jeudi 27 juillet 2006

Battlestar Galactica


"... And they have a plan."

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Après la vague des Space Odysseys* provoquée par Star Trek, amplifiée en 1968 par Kubrick et sur laquelle George Lucas a si habilement su surfer, toutefois précédé par Douglas Trumbull (Silent Running) et Andrei Tarkovsky (Solaris), les œuvres de science-fiction grand public disparaissent presque complètement au cinéma au cours des années 1990 avant de connaître le regain d'intérêt auquel nous assistons en ce XXIe siècle. Isaac Asimov, le père littéraire du concept de cyborg, n'a-t-il pas attendu 2004 pour voir sa première nouvelle du genre, I, Robot, être sérieusement portée à l'écran ? En dehors des ressources romanesques, le matériau précédemment exploité à l'écran et ayant fait leurs preuves constitue l'une des pistes privilégiées par des producteurs préoccupés par la rentabilité de leur investissement.
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Ronald D. Moore, crédité comme le "développeur" de Battlestar Galactica, n'était pas, en 2003, à son coup d'essai en matière de relecture de séries. Avant de proposer son actualisation du serial créé en 1978 par Glen A. Larson, il avait en effet déjà sévi, à ses débuts, en tant que producteur et scénariste sur Star Trek: The Next Generation et quelques uns de ses dérivés. En réalité, à la fin des années 1990, Larson et Richard Hatch, le premier capitaine Appolo, avaient déjà balisé le terrain en préparant un premier projet de revival de la série, mis en sommeil en 2001 par l'idée de Bryan Singer de produire un téléfilm à partir du scénario de BSG**... finalement abandonnée elle aussi.
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Ronald D. Moore revisite en profondeur le vaisseau Galactica, notamment en accordant aux femmes une place déterminante ou par l'atypique et synoptique duo Gaius Baltar-Number Six. Un pilote en deux parties est programmé les 8 et 9 décembre 2003 par la chaîne SciFi et rencontre un net succès. Paradoxalement, les studios et le diffuseur, inquiets du coût financier d'une saison complète, reviennent sur leurs engagements, relayés par la chaîne britannique SkyOne sous le fanion de laquelle le lancement de la série est annoncé le 10 février 2004 puis diffusée à partir du 18 octobre suivant. La deuxième saison s'est achevée aux Etats-Unis en mars dernier et la troisième doit reprendre à la rentrée.
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Sans être "la meilleure série télévisuelle de l'année" comme le déclarait fin 2005 le magazine "Time", Battlestar Galactica possède un charme indéniable. Dans la veine des films relatant de voyages ou guerres intergalactiques et autres missions de sauvetage spatiales, visiblement influencée par Asimov, Blade Runner et par un Terminator dans lequel l'espace aurait remplacé le temps, cette production se distingue par son ambition et son rythme. Outre les modifications, cruciales, déjà évoquées, ce remake, tout en apportant un intéressant prolongement narratif à la version originale et une indéniable modernisation, se caractérise par son réalisme et son recours incessant aux mythes helléniques. L'ennemi cylon, devenu une création humaine capable, à présent, de se doter seule de la parfaite apparence de... la femme (majoritairement !), est à la fois plus redoutable et ambigu. Son monothéisme contraste également de manières permanente et singulière avec le culte olympien des hommes.
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Dans sa quête de la légendaire treizième colonie appelée Terre, la population survivante à l'effroyable désastre nucléaire regroupée dans une flotte hétéroclite autour de l'antique "Galactica" doit résoudre, à travers quelques personnages emblématiques, militaires et civils, et avec la liberté que permet la science-fiction, les nombreux problèmes sociaux, politiques, moraux et philosophiques auxquels elle est confrontée. Le commander Edward James Olmos (Wolfen, Blade Runner, Miami Vice) et la présidente par intérim Mary McDonnell, qui avait tenu le rôle de la first lady Marilyn Whitmore dans Independence Day, apportent une réelle crédibilité dramatique à la série au cœur d'une distribution composée avec intelligence et esthétique (notamment Tricia Helfer dans un rôle mi-imaginaire, mi-réel à l'appellation numérique faisant un clin d'œil au personnage interprété par Patrick McGoohan dans une célèbre série britannique).
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*même la franchise James Bond y a sacrifié avec le modeste Moonraker.
**diffusé sur le réseau ABC et arrêté en mai 1980 après deux saisons.

mercredi 26 juillet 2006

Faut pas rêver : Cuba, la perle des Caraïbes


"... La plus belle terre que l'homme ait jamais contemplée."

Cuba, la perle des Caraïbes

1- Cuba Est Ouest
Découverte en octobre 1492, après San Salvador, par Christophe Colomb au cours de son premier voyage vers les Indes "par le Ponent", Cuba est la plus grande île des Caraïbes et depuis 1959, avec l'île de la Jeunesse et les quelque mille six cents îlots et cayos qui font partie de l'archipel, une république socialiste à cent quarante-huit kilomètres au sud de Key West (Floride).
L'émission nous emmène à travers les 1 250 kilomètres de plaines fertiles entrecoupées de quelques chaînes de montagnes, ponctuée du rappel des principales pages de la tumultueuse histoire du pays. La remarquable beauté des paysages et les drames qui s'y sont déroulés ont d'ailleurs inspiré le cinéma, à commencer par l'excellent Soy Cuba de Mikhail Kalatozov, le film au slogan choc ("moitié paradis, moitié enfer... Pur(e) Havane" !) sorti en 1979 de Richard Lester avec Sean Connery et Brooke Adams, celui de Sydney Pollack avec Robert Redford (1990) ou le récent The Lost City d'Andy Garcia... tourné à Santo Domingo sans oublier Buena Vista Social Club, le premier documentaire musical de Wim Wenders.

2- Les indiens guérisseurs
A Baracoa, site enclavé au milieu des montagnes où débarquèrent les premiers conquistadores, l'historien Alejandro Hartmann mène depuis plusieurs années une étude généalogique destinée à dénombrer les descendants des Taïnos, l'une des principales populations indigènes de l'île avec les Karibs. La particularité de ces indiens est d'avoir constamment transmis à travers les générations leurs connaissances des plantes médicinales. Un atout de taille en matière de santé public pour un pays soumis dès 1962 à un incessant embargo et démuni de l'aide des "pays frères" depuis l'effondrement du bloc de l'est.
Sierra Maestra - dans le massif montagneux le plus important de Cuba, une des régions les plus sauvages et lieu de refuge des révolutionnaires à travers les siècles, se dresse le sommet le plus élevé de l'île, el pico Turquino culminant à 1974 mètres (c'est aussi le nom d'un groupe de musique cubaine, fondé dans les années 1970 par Juan de Marcos González, qui interprète du Son traditionnel).

3- La tumba francesa
Dans le petit village de Bejuco (Sagua de Tanamo) niché dans la montage, Josepha, Trinidad et Crescenzia, âgées de 78 à 83 ans, préparent leur prochain voyage à Santiago. Elle doivent en effet participer, après un long périple, à un spectacle de tumba francesa qui doit s'y tenir. Cette danse, créée au XVIIIe siècle par les esclaves des colons français cultivateurs de café, mimait le menuet et autre contredanse de leurs maîtres au rythme de percussions africaines. Sa tradition a été conservée jusqu'à nos jours et, pour la première fois, les trois tumbas, Bejuco, Guantanamo et Santiago, ont décidé de se produire ensemble à l'occasion de la semaine de la francophonie.
Santiago - la ville fondée en 1514 par Diego Velázquez (dont la résidence peut être visitée), théâtre de la bataille de 1898 qui mena Cuba à son indépendance, est marquée sur le plan architecture par l'influence française, à l'image du quartier de Tivoli longtemps appelé la "petite France".

4- La santeria
A San Pedrito, le quartier noir de Santiago, Dania, toute vêtue de blanc, ne passe pas inaperçue. Cette danseuse, perturbée par des troubles de santé persistants, est devenue une adepte de la santeria, religion spécifiquement cubaine qui honore une multitude de saints et de dieux, les "orishas". Pour préserver cette croyance aux racines africaines, les esclaves l'associèrent au culte catholique, donnant naissance à un étrange syncrétisme, phénomène amplifié par la visite du pape Jean Paul II à Cuba en 1998. Dans l'un des derniers pays communistes de la planète, spiritisme et catholicisme font curieusement bon ménage.

Niquero - c'est dans cette localité de la province du Granma qu'ont débarqué, le 2 décembre 1956, Fidel Castro, exilé au Mexique après une première tentative de révolution, et l'argentin Ernesto 'Che' Guevara pour renverser le président Fulgencio Batista. Mais l'opération débute bien mal, la majeure partie des quatre-vingt membres du commando (les barbudos) étant soit tués, soit faits prisonniers par l'armée.

5- La belle de Mananillo
Les cubains entretiennent une véritable passion pour la musique, à l'image de celle que nourrit, depuis plus d'un siècle, la famille Fornaris pour les orgues à soufflet. C'est avec Santiago Fornaris que commence cette histoire. Il trouve, en 1887, dans une église de Cienfuegos, un de ces instruments et l'amène chez lui, à Manzanillo. Son petit-neveu Chito prend sa succession en réparant ou en créant de nouveaux exemplaires. Le neveu de celui-ci, Pedro, est lui devenu musicien itinérant et organise régulièrement des bals pour son quartier. Il a aussi fabriqué la machine qui sert à perforer les cartons, donnant une inattendue seconde vie aux emballages... de langoustes !
Camaguey - et son marché libre.

6- On a pas tous les jours 15 ans
Quinze ans est, à Cuba où la majorité est à seize ans, le dernier âge de l'enfance. C'est pourquoi cet anniversaire revêt un caractère particulier, un jour aussi important que celui du mariage. A Trinidad, la modeste famille de Yerena a décidé de le fêter avec un faste inhabituel et s'y prépare depuis cinq ans. Tenues vestimentaires pour la jeune femme et ses amies, location d'une des "belles américaines" abandonnées après la révolution, amoureusement restaurées et entretenues, d'un photographe et d'un vidéaste, réception... une dépense cumulée d'environ six cents euros... soit plus de trois ans d'un salaire moyen dans le pays.

Cayo Coco - réserve naturelle et superbe site exclusivement réservé aux touristes étrangers.

7- El Mejunje
Santa Clara, où Che Guevara mena, en décembre 1958, une célèbre attaque contre un train blindé et se tient le très visité mémorial du charismatique chef révolutionnaire, est le siège d'une autre institution publique, "El Mejunje" (mélange en espagnol). Ce centre culturel organise chaque jour, à longueur d'année, des spectacles insolites et hétéroclites, de théâtre, de musique, de cabaret... La liberté de ton et de création de cet espace, fondé il y a plus de vingt ans par Ramón Silverio, est réputé dans le pays. Et les artistes sont parfois recrutés dans la rue.

Cienfuegos - le cœur de cette ville où résidèrent des colons français originaires de Bordeaux est le théâtre Tomas Terry, du nom du mécène vénézuélien venu faire fortune à Cuba, inauguré en février 1890 et où se sont produits le ténor italien Enrico Caruso et la comédienne française Sarah Bernhardt.

8- Los carboneros
Dans les marais de la Zapata, la plus grande zone marécageuse des Caraïbes, vivent les carboneros, ces "hommes des marais" qui perpétuent l'une des activités les plus anciennes de la région, la production de charbon végétal. Un travail particulièrement pénible dans une zone restée célèbre sous le nom de baie des Cochons lorsque, le 17 avril 1961, mille cinq cents cubains réfugiés aux Etats-Unis, entraînés et payés par la C.I.A., y débarquèrent pour tenter de renverser Fidel Castro.

La Havane - destination de prédilection des américains pendant la prohibition et son fameux Malecon long de sept kilomètres en bordure de mer. Depuis quelques années, un vaste chantier de restauration des bâtiments de la vieille ville a été entrepris.

9- L'école de la boxe
La boxe est, avec le base-ball, l'un des sports préférés des Cubains et une source de fierté. Les adeptes de cet art, souvent issus de milieu modeste, sont de véritables idoles. Félix Savon est l'un d'entre eux. Après avoir remporté deux titres olympiques (1992 et 1996) et six championnats du monde des poids lourds (dernière ceinture en 1997), il s'occupe désormais des champions de demain dans une salle perdue de La Habana vieja, le gymnase Raphael Trejo. Chaque jour, des dizaines d'enfants se rendent après l'école dans ce lieu de légende dont le ring a été foulé par tous les champions cubains. Car si le sport professionnel est interdit à Cuba depuis la révolution, même amateur, il représente toujours un espoir pour les habitants de l'île, celui d'améliorer leurs conditions de vie.

Pinar del Rio - sculptée par la chaîne de montagnes de Guaniguanico, cette province cache dans ces nombreux replis de véritables merveilles de la nature et est devenue une des destinations favorites du tourisme écologique.

10- Les lectrices de tabac
Ce métier, instauré en 1865, n'existe qu'à Cuba et connaît un réel essor. Les hommes et des femmes qui l'exercent sont chargés de faire la lecture aux ouvriers qui travaillent dans les usines de fabrication de cigares. Une manière originale de démocratiser la culture de la population. Le régime cubain s'appuie sur ces lecteurs pour propager la bataille des idées, une campagne idéologique née en 1999 qui trouve son origine dans un des nombreux incidents diplomatiques avec les Etats-Unis. De nombreuses lectrices ont donc été recrutées dans les usines qui en étaient jusque là dépourvues pour lire des textes beaucoup moins romanesques que par le passé.

Maria la Gorda - réserve mondiale sous-marine et étape finale du voyage.