dimanche 29 juin 2008

Tie saam gok (triangle)


"Quand on n'a plus le choix, il faut se résoudre à faire ce qu'on déteste le plus."

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Quand deux réalisateurs se rencontrent, que se racontent-ils ? Des histoires de cinéma. Mais lorsque ce sont trois des plus grands cinéastes hongkongais actuels ? Ils font un film ensemble. Et comme ce genre de collaborations exceptionnelles doit avoir un caractère récréatif, voire festif, Tsui Hark associé à ses cadets Ringo Lam et Johnny To ont l'idée de le concevoir et de le produire selon le principe du "cadavre exquis" littéraire ou graphique imaginé par les surréalistes au début du XXe siècle. Présenté hors compétition à Cannes en 2007 puis récompensé, en début d'année, par un "Grande prémio Orient Express" au Fantasporto, Tie saam gok apparaît comme un polar lunatique dans lequel l'amitié a autant d'importance à l'écran... que dernière la caméra.
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Dans un bar de Hong Kong, Sam Lee-bo discute la proposition formulée par le chauffeur de taxi Fai de servir de conducteur pour un coup organisé par une triade. L'antiquaire Mok, également présent, l'encourage à refuser. Les trois amis aux abois sur le plan financier sont abordés par un inconnu affirmant connaître un endroit susceptible de les rendre riches. Pour les encourager, il leur remet sa carte à laquelle il joint une ancienne pièce d'or. Il trace ensuite des caractères sur la table avant de quitter l'établissement. Au même moment, Ping, la jeune épouse de Sam, annonce à son amant le policier Wen Wong-jin, avec lequel elle vient de faire l'amour dans le véhicule de ce dernier, qu'elle est enceinte de lui.
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Craignant par ailleurs d'être tuée par son mari pour obtenir le versement de l'assurance-vie, elle obtient de Wen qu'il le place sous surveillance. Le lendemain, intrigués par la rareté de la pièce en or, Sam et Wok tentent sans succès de téléphoner à Chan Fok-shui, l'homme qui la leur a donnée. Dans le modeste restaurant de la mère de Fai, Sam décline définitivement l'offre de celui-ci quelques instants avant l'arrivée des trois commanditaires du coup, venus relancer leur intermédiaire. Puis il apprend par la télévision le décès de Chan intervenu le matin. Sur la carte de visite du défunt, Sam découvre l'adresse d'un site Internet.
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Un pur exercice de style triangulaire (litt. : de fer) ? Soit, mais pas seulement. Le caractère acrobatique de la construction du film* n'empêche pas celui-ci de posséder une authentique unité narrative et, malgré également les singularités stylistiques des cinéastes, figurative. Le scénario fantasque et audacieux explore, au prix certes de (ir)raisonnables grands écarts artistiques, l'action, le polar ou la comédie. Moins délicieusement corrosif que Fargo, globalement moins réussi que le A Simple Plan de Sam Raimi, cet héritier asiatique du hustonien Treasure of the Sierra Madre ne manque pourtant pas d'intérêt. Sorti un mois avant Sun taam, Tie saam gok peut en particulier compter sur un solide autre "triangle" (entrecroisé avec celui constitué par les réalisateurs). Celui des acteurs aux sommets duquel se tiennent Louis Koo, Simon Yam (Die xue jie tou) et Sun Honglei (tête d'affiche avec Zhang Ziyi du Wo de fu qin mu qin de Zhang Yimou). Un casting complété notamment par Lam Ka Tung (partenaire des deux premiers dans Hak se wui yi wo wai kwai de Johnny To et déjà de Kelly Lin dans le Sun taam déjà cité).
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*chacune des trois parties du film a été tournée par l'un des réalisateurs dans l'ordre évoqué précédemment.




vendredi 27 juin 2008

30 Days of Night (30 jours de nuit)


"- Hell of a day.
- Just you wait !"

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A l'origine, il semble que 30 Days of Night ait été d'emblée conçu pour être un film. Mais le refus des studios aurait convaincu l'auteur étasunien Steve Niles d'utiliser son histoire pour une bande-dessinée en trois tomes, illustrée par le dessinateur australien Ben Templesmith et publiée en 2002. Le succès de la série lui fait accomplir un assez naturel retour vers le cinéma. Sam Raimi remporte les enchères pour les droits d'adaptation, songeant un moment à réaliser le film avant de se contenter de le produire avec son habituel associé Robert Tapert. La direction est alors confiée au Britannique David Slade dont il s'agit du second long métrage de fiction après Hard Candy. Doté d'environ 30M$ de budget, 30 Days Of Night a permis à ses promoteurs de doubler la mise initiale, connaissant une recette d'exploitation presque équivalente aux Etats-Unis et à l'étranger.
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Dans quelques heures, la petite localité de Barrow (Alaska), perdue au milieu de vastes étendus sauvages sans accès routier, va être comme chaque hiver coupée du monde pendant trente jours de nuit. Alors qu'elle est sur le point de se vider progressivement des trois quarts de sa population, un étrange individu s'y est rendu à pied. Le shérif Eben Oleson et son adjoint Billy sont bientôt amenés à constater une série d'événements inexplicables : la destruction d'un lot de téléphones-satellite, la sanglante élimination de la totalité de l'élevage de chiens appartenant à John et son épouse, l'importante dégradation de l'hélicoptère de Wilson puis la coupure des liaisons téléphoniques, informatiques et de l'alimentation électrique. Gus, le technicien chargé des communications, est violemment attaqué par un groupe d'individus. Peu après, Stella Oleson, empêchée à cause d'un accident de prendre le dernier avion pour Anchorage, intervient pour faciliter l'arrestation par son époux, dont elle est séparée, d'un inconnu dans la cafétéria de Lucy. Grabe, un ouvrier de la raffinerie, est ensuite sauvagement et mortellement égorgé.
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Quelques part entre les morts-vivants de George Romero et le Near Dark de Kathryn Bigelow, 30 Days of Night revisite, mais seulement mollement, le thriller horrifique et le film de vampires*. L'intéressant potentiel de tension dramatique et claustrophobe de l'adaptation co-signée par Steve Niles, Stuart Beattie (Collateral, trilogie Pirates of the Caribbean) et par le scénariste du précédent film de David Slade, Brian Nelson, n'est en effet pas exploité avec assez de radicalité, le résultat restant moins percutant que le 28 Days Later... de Danny Boyle par exemple, proche sur le plan du registre. A l'exception du second rôle Mark Boone Junior, le casting manque également un peu d'étoffe et de "mordant" visuel pour un film de genre. L'un des mérites de cette production sous bannière Columbia consiste à ne pas trop sacrifier aux conventions hollywoodiennes et d'éviter les faciles échappatoires narratives auxquelles elles nous ont habitués. A noter enfin que 30 Days of Night a inspiré Blood Trails, une mini série composée de sept très courts (moins de 5 minutes) épisodes diffusée sur le Web.
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*l'acteur Béla Lugosi est brièvement évoqué dans les dialogues.