"... Un putain de désastre."
Le redéploiement et l'intensification des réseaux internationaux de prostitution (version moderne de ce que l'on appelait autrefois "traite des blanches") ont, depuis 2005, plusieurs fois donné matière à des scénarii, principalement pour la télévision. Ceux notamment des téléfilms britannique Sex Traffic ou nord-américain Human Trafficking et de la série belge Matroesjka's. Une liste à laquelle le documentaire Sex Slaves de la Canadienne Ric Esther Bienstock vient apporter une authenticité et une analyse qui font souvent défaut aux précédents. Le cinéma s'était montré moins séduit par le thème* jusqu'à cette co-production germano-étasunienne inspirée par un article intitulé "The Girls Next Door" paru en janvier 2004 dans le "New York Times Magazine" sous la signature de Peter Landesman. Présenté en première au Sundance Film Festival en janvier 2007, Trade n'a pourtant connu qu'une diffusion confidentielle aux Etats-Unis et à l'étranger.
Adriana fête chez elle, avec quelques amies, son treizième anniversaire. Son frère aîné Jorge, qui se livre avec deux acolytes à de menus larcins sur des touristes, lui offre une jolie bicyclette, un cadeau bien trop onéreux aux yeux de leur modeste mère veuve. Le lendemain matin, la jeune fille, partie en cachette faire un tour avec son vélo, est bientôt suivie par une grosse limousine noire de marque européenne puis enlevée par ses occupants. Un peu plus tard, Jorge aperçoit un enfant circulant sur le vélo de sa sœur. Convaincu d'abord qu'il s'agit d'un simple vol, il emmène le garçon à l'endroit de sa découverte et doit se résoudre à la réalité du kidnapping. Alors qu'il part à la recherche de la fillette, Veronica, une jeune femme polonaise, arrive à l'aéroport de Mexico où elle et une compatriote sont attendues par Vadim et Manuelo. Pendant que Veronica est poussée de force dans un véhicule, la seconde est mortellement percutée par une voiture en tentant de s'enfuir. Veronica est emmenée dans un appartement puis violée par le proxénète sous les yeux d'Adriana. La nuit venue, Jorge, au cours de son errance dans la ville, voit sa sœur monter à l'arrière d'une camionnette. Empruntant la voiture de l'un de ses comparses, il suit le véhicule jusqu'à la ville frontalière de Juarez. Lorsqu'il arrive dans la cave sordide où Adriana et les autres victimes ont été provisoirement retenues, celle-ci est déjà vide.
La C.I.A. estimait en 2003 qu'environ vingt mille personnes étaient chaque année victimes d'un trafic sexuel vers les Etats-Unis (un million à l'échelle planétaire), un chiffre certainement sous-évalué à l'origine d'une activité internationale dont le chiffre d'affaires n'est pas recensés par l'O.M.C. (organisation mondiale du commerce). C'est ce dramatique phénomène, favorisé par la pauvreté, l'opportunisme, la corruption et les nouveaux moyens de communication, ainsi que l'histoire vécue racontée par Peter Landesman (auteur auparavant d'un article sur le trafic illégal d'armes) qui alimentent donc le scénario de Jose Rivera (Diarios de motocicleta). Conçu comme un thriller, Trade tire évidemment parti de ce matériau. Mais aussi de cette rencontre, logiquement improbable, d'un adolescent mexicain farouchement déterminé à sauver sa jeune sœur avec Ray Sheridan, un vieux policier étasunien si éloigné et à la fois si proche de lui, interprété par Kevin Kline. La réalisation stylisée de l'Allemand Marco Kreuzpaintner virtualise un peu le récit sans pour autant l'affaiblir. Belle prestation du débutant Cesar Ramos aux côtés d'Alicja Bachleda-Curus**, la "Keira Knightley de l'Est" et interprète du précèdent film du cinéaste.
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*le pitch du récent Taken servant exclusivement de prétexte à un film d'action.
**actrice et chanteuse polonaise née au Mexique.
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