lundi 7 décembre 2015

Lost River

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"... We're having a bloody good time!"

C'est loin d'être notre cas pendant le visionnage. Je dois même avouer n'avoir pu regarder la dernière demi-heure à vitesse normale. Première fiction écrite, produite et réalisée par *, ce drame ostensiblement fantasmatique verse dans un travers hélas aujourd'hui trop fréquent. L'acteur canadien nommé en 2007 aux "Oscars" y privilégie en effet les aspects formels au détriment d'un authentique intérêt narratif. Catalogue d'images animées, éclairées et photographiées par le Belge Benoît Debie (collaborateur notamment de Gaspar Noé), le film aux enjeux pour le moins évanescents (avec, à l'évidence, pour dénominateur commun le sinistre socio-économique et la destruction) ne contente de nous (en)trainer à travers diverses fiches humaines choisies à Detroit (Michigan). La "simple" présence de  (Joan Harris dans la série TV Mad Men), de l'Ecossais , de , de l'Anglais  ou encore d' et de l'Australien Ben Mendelsohn (partenaires de  dans The Place Beyond the Pines) ne suffit bien sûr pas à sauver Lost River d'un presque complet naufrage**.
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*associé ici avec cinq co-producteurs parmi lesquels Marc Platt (Drive).  avait auparavant produit le documentaire socio-politique ReGeneration (2010) de .
**sélectionné en 2014 dans la section cannoise "Un Certain regard", Lost River (intitulé à l'état de projet "How to Catch a Monster") y a reçu un accueil plutôt défavorable. Warner a même un moment songé à céder les droits de distribution à un concurrent. Le film a été exploité trois semaines dans trois salles pour une recette à peine symbolique.



mercredi 2 décembre 2015

The Seventh Victim (la septième victime)

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"It's a joke! A pathetic little joke!"

Je formais (sans doute imprudemment !) quelques attentes à l'égard de ce petit drame présumé mystérieux. D'abord suscitées par le scénario co-écrit1 par l'ancien comédien et dramaturge 2, lequel venait en effet d'entamer son nouveau métier en signant, déjà pour Val Lewton et la RKO, celui du bien plus réussi Cat People. Ensuite parce que The Seventh Victim avait donné l'occasion à  (ancien assistant-décorateur à la Fox devenu monteur en titre grâce à Lewton) de réaliser, en remplacement de Jacques Tourneur, son premier film. La jeune élève de l'Actor's Studio (remarquée sur scène, l'année précédente, par un agent de David O. Selznick)  y faisait enfin également ses débuts au cinéma dans un rôle principal. La déception se montre donc à la hauteur des espoirs formés sur la base de cette remarquable conjonction. Seule caractéristique de cette production méritant d'ailleurs ce qualificatif.
L'histoire imaginée par les scénaristes se révèle de plus en plus inepte (voire aberrante et/ou ridicule) au fur et à mesure de son déroulement. Contrainte de quitter le collège en raison du non-paiement de la scolarité, Mary Gibson part à New York à la recherche de sa sœur aînée Jacqueline dont on a plus de nouvelle depuis un certain temps. Cette dernière aurait cédé, huit mois auparavant, La Sagesse Cosmetics à la directrice de la petite entreprise, Mrs. Esther Redi. A partir d'une simple indication fournie par l'employée et amie Frances, Mary se rend au Dante, un restaurant italien où Jacqueline, à la beauté mémorable, aurait été vue une semaine plus tôt. Les propriétaires confirment l'information, ajoutant avoir aussi loué au mois une chambre à la jeune femme. Dans celle-ci, ouverte à la demande insistante de Mary, ils découvrent une chaise placée sous un nœud coulant fixé au plafond. Au bureau des personnes disparues, Mary est abordée par un détective privé nommé Irving August, lequel se déclare capable de retrouver Jacqueline en quarante-huit heures moyennant une avance de cinquante dollars, une somme dont ne dispose pas son interlocutrice. August est aussitôt après dissuadé par un certain Mr. Vedo de s'intéresser à cette affaire.
La cohérence narrative ne constitue pas, loin s'en faut, le point fort du film. On en vient même à se demander si une relecture du script de  (remanié par  à la demande de Lewton) a été faite par une personne sensée avant d'engager la production. Les acteurs réunis n'apportent, au demeurant, aucune véritable consolation. Malgré une relative conviction de surface, le jeu de 3 manque singulièrement de nuance et de finesse. A ses côtés, 4 et 5 (6 et  tiennent les autres principaux seconds rôles)il est vrai dans des personnages sans réelle consistance, ne convainquent pas davantage.  et son chef-op. (le Calabrais de naissance Nicholas Musuraca) ont bien essayé de trouver d'intéressantes ambiances toutes en ombres, lumières et transparence (parfois un peu risible !). Insuffisant pour sauver The Seventh Victim d'un presque immédiat oubli !
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1. avec le débutant dans l'exercice Charles O'Neal, père de l'acteur Ryan O'Neal.
2. engagé par Val Lewton, à l'époque collaborateur de David O. Selznick, pour effectuer des recherches et écrire avec Aldous Huxley l'adaptation de Jane Eyre (1943). Une fois parti à la RKOLewton lui proposa de le rejoindre pour intégrer l'équipe chargée au sein du studio de la production de films d'horreur.
3. la future partenaire de David Niven dans A Matter of Life and Death du duo - doit surtout sa notoriété au second rôle de Stella tenu dans A Streetcar Named Desire grâce auquel un "Oscar" lui fut décerné en 1952 mais aussi, étrangement, à celui d'un chimpanzé futuriste, le docteur Zira, dans trois films de la franchise Planet of the Apes.
4. entre deux volets de la série pour le cinéma The Falcon. Son personnage porte ici un nom et une profession identique (le docteur en psychiatrie Louis Judd) à celui qu'il tenait dans Cat People... tué par Irena transformée en panthère, peu avant la fin du métrage.
5. toutes deux également actrices de soutien dans The Leopard Man, à l'affiche trois mois plus tôt.
6. conscrit comme sergent d'infanterie en août 1943, mort au combat à Manille (Philippines) en mars 1945.