lundi 30 août 2010

Breezy


"... All this love that you give away, just once won't you like to have it returned?"

 - film - 29296_6
A partir un scénario original de Jo Heims(1), avec lequel il venait de collaborer sur Play Misty for Me, Clint Eastwood réalise son troisième long métrage, le premier dans lequel il ne joue pas. Breezy, pur drame sentimental (genre avec lequel le cinéaste renouera plus de vingt ans après avec The Bridges of Madison County), explorait un thème déjà bien fréquenté, notamment par l'excellent The Graduate ou le révéré Harold and Maude(2), avant que Woody Allen n'y puise l'inspiration de l'un de ses chefs-d'œuvre, Manhattan. Aux côtés de l'illustre vedette de Sunset Blvd.(3), William Holden désormais quinquagénaire, Eastwood choisit de donner sa chance(4) à une jeune post-adolescente aperçue dans American Graffiti, Kay Lenz, candidate(5) grâce à son rôle-titre au "Golden Globe" du meilleur espoir féminin.
 - film - 29296_10
Orpheline arrivée à Los Angeles quelques mois plus tôt de sa Pennsylvanie natale, Edith Alice Breezerman surnommée 'Breezy' traîne sa jeunesse et sa guitare selon les occasions qui se présentent à elle. Un matin, à peine échappée du véhicule d'un automobiliste mal intentionné qui l'avait prise en stop, elle s'impose dans celle de Frank Harmon. L'aisé agent immobilier, divorcé et solitaire, a bien du mal à dissimuler sa mauvaise humeur face à cette jeune femme enjouée, naïve, audacieuse et bavarde. La présence d'un chien percuté sur la voie provoque leur soudaine séparation. En lui faisant visiter une maison à céder, Frank apprend de Betty Tobin, avec laquelle il entretient une épisodique liaison, son projet de mariage avec l'avocat Charlie Eisen. Le soir, 'Breezy' se présente à la luxueuse résidence de Frank pour y récupérer sa guitare laissée dans la voiture. Celui-ci lui prépare à dîner, l'autorise à utiliser sa salle de bains puis, en se montrant volontairement désagréable, la laisse partir. La nuit suivante, Frank est réveillé par deux agents de police, accompagnés de sa vagabonde "nièce" 'Breezy' ; en acceptant cette parenté, il lui évite le placement en centre pour délinquants. Il se laisse également convaincre de l'emmener au bord de l'océan.
 - film - 29296_13
Romance légère et sans âge (bien qu'il y joue un rôle essentiel), Breezy a tout de même du mal à cacher le sien. La construction et le rythme du film mais aussi l'indolence de la réalisation sont assez symptomatiques de ce début des 70's. Sur ce dernier point, les périodes qui précèdent Bird (le deuxième film de mais sans Eastwood) d'abord, Unforgiven ensuite se révèlent d'ailleurs assez homogènes dans ses relatives insuffisances. A l'exception de quelques dialogues bien sentis et du "sauvetage" final, l'histoire, fondée sur l'opposition de générations(6), imaginée et signée par Jo Heims reste prévisible et en deçà de son hypothétique potentiel narratif. Sans doute revenu du Kenya ou de Suisse pour tourner un téléfilm sous la direction de Robert Butler et cette production Malpaso, William Holden assure tout en suscitant une certaine nostalgie. Fraîche, spontanée et enthousiaste, Kay Lenz ne parvient pas à faire oublier ses évidentes carences dramatiques. Comme son aînée Marj Dusay et la plupart des autres membres du casting, l'ex-bébé-acteur accomplira la plus grande partie de sa carrière à la télévision.
___
1. co-scénariste non crédité de Dirty Harry.
2. sans même évoquer Lolita, Summer of '42 mis en musique par le même Michel Legrand ou encore... Twinky !
3. mais aussi de Stalag 17, Sabrina, Picnic, The Bridge on the River Kwai, The Wild Bunch et que l'on pourra à nouveau apprécier dans Network auprès de Faye Dunaway.
4. après avoir pensé à Jo Ann Harris (l'une de ses partenaires dans The Beguiled), Lauren Hutton, Sondra Locke et Tuesday Weld.
5. avec notamment Linda Blair et la récompensée Tatum O'Neal.
6. plus qu'entre contre-culture et establishment.

vendredi 27 août 2010

Alice in Wonderland (alice au pays des merveilles)


"That depends a good deal on where you want to get to!"

 - film - 60294_2
Contrainte de rester chez elle par une averse de neige, Alice ne peut dissimuler son ennui. Elle laisse alors son imagination vagabonder, accusant la reine blanche du jeu d'échec de maltraiter son royal époux ou croyant voir dans le jardin un lapin blanc portant écharpe et pardessus, sermonnée par la gouvernante Miss Simpson qui prend ses rêveries pour d'authentiques mensonges. La fillette monologue ensuite avec sa chatte Dinah, l'assurant de l'existence d'une maison semblable mais inversée de l'autre côté du miroir avant de faire mine de s'endormir dans le confortable fauteuil proche de la cheminée. Elle parvient bientôt à traverser le miroir et à sauter lentement dans un salon presque conforme à ses prévisions. La photographie de son oncle Gilbert et de son épouse montre leur dos ; celui-ci explique à sa nièce la raison de l'inesthétique rapiéçage de l'arrière de son pantalon. L'horloge se met à parler, et les pièces de l'échiquier à s'animer. La reine blanche, aidée par Alice à rejoindre son enfant-pion en pleurs, prend la jeune fille pour un volcan. En lévitation, cette dernière se retrouve dans le jardin où un lapin revêtu d'un gilet et d'une veste semble bien pressé. Alice le suit et tombe sans heurt au fond d'un trou.
 - film - 60294_8
Œuvre littéraire ayant, depuis le court métrage muet de 1903 jusqu'à la récente version de Tim Burton, inspiré de multiples adaptations, "Alice's Adventures in Wonderland" (écrit en 1865 par Lewis Carroll pour distraire Alice Liddell et ses deux sœurs) possède une suite en général moins connue, "Through the Looking-Glass, and What Alice Found There" (1871). C'est celle-ci que, sous le titre abrégé d'Alice in Wonderland, le scénario co-signé par Joseph L. Mankiewicz et le chef-décorateur William Cameron Menzies porte en réalité à l'écran. Réalisée par Norman Z. McLeod, collaborateur notamment des Marx Brothers et de W.C. Fields (ici en Humpty-Dumpty), cette comédie fantastique boudée lors de sa sortie, aux effets et costumes désormais un peu désuets, ne détient pas, dans l'inconscient collectif, la réputation du film d'animation de Walt Disney ou d'autres productions ultérieures pour le cinéma ou la télévision. Même Charlotte Henry, interprète(1) du rôle-titre(2) et éphémère partenaire de Laurel & Hardy, est aujourd'hui presque oubliée comme d'ailleurs la présence, il est vrai quasi indiscernable, dans le casting de Gary Cooper (White Knight), de Cary Grant (Mock Turtle) et de quelques autres acteurs réputés.
___
1. âgée de près de vingt ans lors du tournage.
2. pour lequel Ida Lupino, sa cadette de presque quatre ans, a été pressentie.