"... And they have a plan."
Après la vague des Space Odysseys* provoquée par Star Trek, amplifiée en 1968 par Kubrick et sur laquelle George Lucas a si habilement su surfer, toutefois précédé par Douglas Trumbull (Silent Running) et Andrei Tarkovsky (Solaris),
les œuvres de science-fiction grand public disparaissent presque
complètement au cinéma au cours des années 1990 avant de connaître le
regain d'intérêt auquel nous assistons en ce XXIe siècle. Isaac Asimov, le père littéraire du concept de cyborg, n'a-t-il pas attendu 2004 pour voir sa première nouvelle du genre, I, Robot,
être sérieusement portée à l'écran ? En dehors des ressources
romanesques, le matériau précédemment exploité à l'écran et ayant fait
leurs preuves constitue l'une des pistes privilégiées par des
producteurs préoccupés par la rentabilité de leur investissement.
Ronald D. Moore, crédité comme le "développeur" de Battlestar Galactica,
n'était pas, en 2003, à son coup d'essai en matière de relecture de
séries. Avant de proposer son actualisation du serial créé en 1978 par Glen A. Larson, il avait en effet déjà sévi, à ses débuts, en tant que producteur et scénariste sur Star Trek: The Next Generation et quelques uns de ses dérivés. En réalité, à la fin des années 1990, Larson et Richard Hatch, le premier capitaine Appolo, avaient déjà balisé le terrain en préparant un premier projet de revival de la série, mis en sommeil en 2001 par l'idée de Bryan Singer de produire un téléfilm à partir du scénario de BSG**... finalement abandonnée elle aussi.
Ronald D. Moore revisite en profondeur le vaisseau Galactica, notamment en accordant aux femmes une place déterminante ou par l'atypique et synoptique duo Gaius Baltar-Number Six. Un pilote en deux parties est programmé les 8 et 9 décembre 2003 par la chaîne SciFi
et rencontre un net succès. Paradoxalement, les studios et le
diffuseur, inquiets du coût financier d'une saison complète, reviennent
sur leurs engagements, relayés par la chaîne britannique SkyOne
sous le fanion de laquelle le lancement de la série est annoncé le 10
février 2004 puis diffusée à partir du 18 octobre suivant. La deuxième
saison s'est achevée aux Etats-Unis en mars dernier et la troisième doit
reprendre à la rentrée.
Sans être "la meilleure série télévisuelle de l'année" comme le déclarait fin 2005 le magazine "Time", Battlestar Galactica
possède un charme indéniable. Dans la veine des films relatant de
voyages ou guerres intergalactiques et autres missions de sauvetage
spatiales, visiblement influencée par Asimov, Blade Runner et par un Terminator
dans lequel l'espace aurait remplacé le temps, cette production se
distingue par son ambition et son rythme. Outre les modifications,
cruciales, déjà évoquées, ce remake, tout en apportant un intéressant
prolongement narratif à la version originale et une indéniable
modernisation, se caractérise par son réalisme et son recours incessant
aux mythes helléniques. L'ennemi cylon, devenu une création humaine capable, à présent, de se doter seule de la parfaite apparence de... la femme (majoritairement !),
est à la fois plus redoutable et ambigu. Son monothéisme contraste
également de manières permanente et singulière avec le culte olympien
des hommes.
Dans
sa quête de la légendaire treizième colonie appelée Terre, la
population survivante à l'effroyable désastre nucléaire regroupée dans
une flotte hétéroclite autour de l'antique "Galactica" doit
résoudre, à travers quelques personnages emblématiques, militaires et
civils, et avec la liberté que permet la science-fiction, les nombreux
problèmes sociaux, politiques, moraux et philosophiques auxquels elle
est confrontée. Le commander Edward James Olmos (Wolfen, Blade Runner, Miami Vice) et la présidente par intérim Mary McDonnell, qui avait tenu le rôle de la first lady Marilyn Whitmore dans Independence Day, apportent une réelle crédibilité dramatique à la série au cœur d'une distribution composée avec intelligence et esthétique (notamment Tricia Helfer dans un rôle mi-imaginaire, mi-réel à l'appellation numérique faisant un clin d'œil au personnage interprété par Patrick McGoohan dans une célèbre série britannique).
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*même la franchise James Bond y a sacrifié avec le modeste Moonraker.
**diffusé sur le réseau ABC et arrêté en mai 1980 après deux saisons.
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