"La force (...) dans son cœur."
On
ne peut pas dire que le cinéma de fiction ait vraiment accordé une
place significative au personnage exceptionnel, voire mythique, de
Genghis Khan, rival en cruauté d'Attila le Hun ou du cosaque Tarass Boulba.
Le premier souverain mongol, véritable génie militaire et politique, a
pourtant bâti un empire de trente millions de kilomètres carrés, soit
deux fois plus étendu que le romain, quatre fois plus que celui conquis
par le grec Alexandre le Grand. Pour mémoire, Roldano Lupi a tenu le rôle aux côtés de Jack Palance et d'Anita Ekberg dans un film italien de 1961. Omar Sharif lui a succédé dans une production internationale tournée en Yougoslavie en 1965 avec Françoise Dorléac en Börte, l'épouse du monarque médiéval. Le documentaire-fiction diffusé en avril dernier sur la BBC
est une bonne manière de connaître le "phénomène et son œuvre". En un
peu moins d'une heure, dans un traitement proche de celui de Pompeii: The Last Day, Gengis Khan s'inscrit parfaitement dans la ligne qualitative et pédagogique de la chaîne britannique.
Temüjin voit le jour au XIIe siècle (1155 ou 1162 selon les sources).
La légende veut qu'il soit né en tenant dans son poing un caillot de
sang en forme d'osselet, signe de ses futurs exploits. Il est le fils de
Yesügei, chef de la tribu des Borjigin, un clan Qiyat,
empoisonné par les Tatars lorsque l'enfant n'a que huit ou neuf ans. Son
premier fait d'arme est celui au cours duquel il sauve sa jeune épouse Börte
des mains de ravisseurs Merkit après avoir scellé sa première alliance
stratégique avec une tribu plus puissante. Parallèlement à ses efforts
d'unification des tribus mongols, il doit affronter son frère de sang Jamuka. Défait à la bataille de Dalan Balzhut, Temüjin
prend sa revanche un peu plus tard et s'impose comme le chef incontesté
d'un territoire désormais appelée la Mongolie. Un khuriltai (conseil de chefs) lui donne alors, en 1206, le titre de Tchingis Qaghan (Gengis Khan)
qui signifie "Chef suprême". Avant d'aborder sa phase de conquête
territoriale, il développe un nouveau système militaire fondé sur le
système décimal et privilégiant le mérite au détriment de l'origine
aristocratique. La principale cible visée est la Chine du nord, en
particulier la région de la dynastie Jin. Contournant le grande muraille
frontalière, il attaque et prend la riche capitale Yanjing (Pékin) en 1215 après un long siège et une bataille effroyable. C'est ensuite vers l'Ouest que se tourneront les troupes de Gengis Khan
pour arriver jusqu'en Europe orientale. L'empereur, avant de mourir,
confiera à ses fils le soin d'étendre encore le territoire pour réaliser
sa mission, qu'il croyait divine, de conquête du monde.
Tourné en Mongolie avec des acteurs locaux, Gengis Khan
est, avant tout, un film didactique, s'appuyant sur le travail
approfondi d'une équipe d'historiens et d'experts. Celle-ci a utilisé
comme document de base pour cette narration l'"Histoire secrète des Mongols",
chronique de la vie de l'empereur et de ses guerres écrite de son
vivant. Le résultat est très réussi. Malgré sa relative brièveté, le
film permet de mieux cerner la complexité de ce personnage à la fois
captivant et terrifiant, de voir ou réviser une page d'histoire
contemporaine de celle des Capétiens français (en particulier le règne de Philippe II dit Philippe Auguste, un autre conquérant) et, enfin, d'assister également à une œuvre de divertissement bien construite.
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