lundi 8 novembre 2004

The Butterfly Effect (l'effet papillon)


"Changer les gens, c'est les détruire."

Il n'est pas si fréquent qu'un premier film soit une réussite. The Butterfly Effect est de ceux-là. On doit déjà à Eric Bress et Jay Mackye Gruver, les deux auteurs du scénario, celui de Final Destination 2, rédigé à six mains avec Jeffrey Reddick. Les deux jeunes hommes étaient tellement attachés à leur histoire, inspirée de la théorie du chaos vulgarisée, en 1987, par le livre de James Gleick devenu depuis célèbre, qu'ils ont absolument tenu à la réaliser. L'écriture a commencé en 1997 (coïncidence, l'année de sortie du film éponyme, mais qui n'a rien à voir, de l'espagnol Fernando Colomo), et les informations qui ont circulé suscitent rapidement un vif intérêt chez les producteurs. C'est Chris Bender (Final Destination et la trilogie American Pie !!) qui produira finalement le film, associé à des structures indépendantes. Avec un budget d'environ 13M$, The Butterfly Effect rapportera un peu plus de 17M$ au moment de sa sortie et plus de 88M$ au terme de sa distribution internationale. Mais la réussite n'est pas seulement commerciale. Le film, reposant sur un script intelligent à défaut d'être toujours efficace, parvient, sans esbroufe, à une belle synthèse entre fantastique et thriller dramatique. Probablement mieux que certaines récentes et riches productions construites sur les œuvres de Stephen King.
Evan (Logan Lerman, John Patrick Amedori et Ashton Kutcher) vit seul avec sa mère Andrea (Melora Walters). Il est depuis son enfance sujet à de brutales pertes de mémoire. Ces troubles coïncident avec des événements traumatisants de son existence. Et il n'est pas épargné. Son père est interné dans une institution psychiatrique et tente de le tuer au moment de leur première entrevue. George Miller, le père de ses amis Kayleigh (Sarah Widdows, Irene Gorovaia et Amy Smart) et Tommy (Cameron Bright, Jesse James et William Lee Scott) le filme dans des situations étranges. Et une stupide blague imaginée par Tommy et réalisée, contre son gré, par Lenny (Jake Kaese et Kevin Schmidt et Elden Henson) tourne au drame meurtrier. Un médecin conseille à Evan de tenir un journal. Un jour, en relisant ses notes, l'inattendu survient : Evan est renvoyé dans le passé et revit ce qu'il a inconsciemment occulté. En intervenant et en modifiant les événements, Evan provoque alors d'importants bouleversements dans son présent. Pourra-t-il trouver la "bonne histoire" et en a-t-il le droit ?
A la recherche du scénario idéal. Depuis H.G. Wells et sa fabuleuse Machine à explorer le temps, nombreux ont été ceux qui ont rêvé pouvoir revenir dans le passé, souvent davantage comme observateurs que comme acteur, même si la tentation est souvent forte de changer le cours de l'Histoire. Le thème a donné naissance à de nombreux films et séries télévisées, dont le récent Paycheck est une variante futuriste. Dans ces films, le temps est présenté de manière unique et linéaire. L'originalité de The Butterfly Effect est de l'envisager comme un faisceau de possibilités parallèles dont l'une occupe une place centrale et prépondérante. En intervenant sur le passé, on modifie cette hiérarchie sans, pour autant, pouvoir en maîtriser les multiples conséquences. Et le traitement opéré par le duo de réalisateurs joue finement avec ces subtilités fictionnelles. A partir d'une situation présentée, dès la scène d'ouverture, comme critique, le film, bâti sur deux flash-back fondateurs, propose une quasi infinité de combinaisons narratives possibles.
Les personnages principaux et le spectateur en vivront quelques unes. Même si le film n'évite pas quelques maladresses, notamment de perdre parfois une partie de sa lisibilité et de viser, de manière trop appuyée, le public des adolescents, ce qui séduit, d'emblée, c'est la sobriété de sa mise en scène et son rythme. Le recours aux effets spéciaux est mesuré et approprié, le traitement visuel et le montage, bien qu'ils soient influencés par les standards actuels, ne traduisent pas une vision "clipée" du cinéma. Reste la question de l'interprétation. Si les jeunes acteurs sont parfaitement convaincants, notamment Cameron Bright, Jesse James, Jake Kaese, Kevin Schmidt et Logan Lerman et si Melora Walters donne à son personnage secondaire une richesse émotive qui marque le film, on peut regretter le choix d'Ashton Kutcher (d'autant qu'il n'était pas le premier acteur pressenti, voir anecdotes). L'interprète de Tom dans Just Married, dans son premier rôle dramatique, ne trouve pas toujours le ton juste pour être ce héros difficile et pluriel. 

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