"Dis, l'aveugle. Veux-tu connaitre... la couleur... de ton sang ?"
Pour ce vingt-quatrième et avant-dernier volet de la saga Zatôichi, Shintarô Katsu
décide de monter encore en puissance et de prendre presque complètement
les choses en mains. Après avoir été crédité comme producteur dans Zatôichi to Yôjinbô puis comme co-scénariste pour Zatôichi abare-himatsuri, le voilà à présent réalisateur* de ce Shin Zatôichi monogatari: Oreta tsue. Et, à l'évidence, ce qui frappe immédiatement c'est que, comme son personnage, Katsu
est tout sauf maladroit et, contrairement à lui, il est loin d'être
aveugle. S'il appartient bien à la série, cet opus, par sa tonalité
particulière, voire son outrance, est singulier et ne ressemble à aucun
autre.
En voulant lui faire l'aumône, Ichi
est involontairement responsable de la chute fatale d'une vieille femme
croisée sur un pont mal entretenu. Il décide alors de partir à la
rencontre de la fille de la disparue à la place de celle-ci. Avec les
modestes informations dont il dispose, Ichi découvre Nishiki
à Ogiya, une maison close de la ville de Choshi, dont elle est la
meilleure animatrice. Grâce à son astuce au jeu de dé, le masseur
aveugle réunit la somme nécessaire au rachat de la dette de la jeune
femme. Mais toujours poursuivi par quatre hommes qui veulent venger Kamé, une de ses funestes victimes, et recherché contre récompense par le parrain Iioka, Zatôichi va tomber dans le piège diabolique tendu par le chef de clan local, Kagiya Mangoro.
Shin Zatôichi monogatari: Oreta tsue
est d'abord une œuvre visuellement splendide. Le soin des détails, des
lumières et des couleurs, le choix et la modernité des plans et des
cadrages, souvent au plus près des corps, font de ce film une grande
réussite au plan graphique. Cet aspect tempère aussi sa grande noirceur
tonale. Comme le suggère son titre original, il s'agit d'un récit cruel
et désespéré, sadique et morbide même, ne laissant quasiment aucune
place à la légèreté ou aux accents de comédies habituels dans les
épisodes de la série. L'intrigue parallèle s'intéressant au sort de Kaédé
et de son très jeune frère qui tourne à la tragédie poétique, est la
meilleure illustration du poids intolérable de la fatalité porté par les
personnages, principaux et secondaires, du film. Shin Zatôichi monogatari: Oreta tsue fait irrésistiblement penser, par son contenu narratif et par sa représentation de la souffrance, à Unforgiven. Il aurait pu constituer un magnifique chant du cygne pour la saga. Mais l'aventure continue... encore un peu.
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*compétence étrennée l'année précédente avec Kaoyaku.
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