vendredi 11 novembre 2005

The Cat's Meow (un parfum de meurtre)


"... Si on n'appuie pas sur la détente."

Pour son retour au cinéma, huit ans après l'honnête The Thing Called Love, Peter Bogdanovich jette son dévolu sur une affaire hollywoodienne qui n'avait pas défrayé la chronique, étouffée dès son origine par son principal et puissant protagoniste, mais à propos de laquelle la rumeur fut particulièrement vive et prolifique. Adaptation de sa propre pièce par Steven Peros, The Cat's Meow se situe la même année et emprunte son titre à la comédie de Roy Del Ruth produite par Mack Sennett avec Harry Langdon. Le réalisateur de The Last Picture Show, lui même indirectement impliqué dans une sordide affaire au début des années 1980, nous livre une version des événements dont l'un des intérêts est de dresser un portrait peu flatteur mais probablement réaliste de quelques "acteurs" réputés du Hollywood des années 1920.
Novembre 1924. La Cité du cinéma rend un dernier hommage à l'un des siens, disparu dans d'énigmatiques circonstances et laissées à leur obscurité par la brève enquête de police qui les a suivi. L'écrivain et actrice Elinor Glyn se remémore les heures qui ont précédé l'accident. Elle faisait partie, quelques jours plus tôt, des invités du magnat de la presse et producteur de cinéma William Randolph Hearst et de sa jeune maîtresse, Marion Davies, pour une courte croisière à bord du yacht de celui-ci. Parmi les douze convives figurent Charles Chaplin, la jeune actrice Margaret Livingston venue avec son secret amant, le producteur Thomas Harper Ince et la chroniqueuse au "New York American' et collaboratrice de WR Hearst, Louella Parsons. Au prétexte de fêter le quarante-deuxième anniversaire du producteur de Civilization et inventeur du western, parties fines et ragots sont au programme des festivités. Mais l'hôte et capitaine de l'"Oneida" est surtout préoccupé par la possible liaison entre Marion et Chaplin, que leur apparente complicité ne détrompe pas. Ince, en difficulté financière, va tenter d'apporter son aide à Hearst pour le convaincre de devenir son associé.
Présenté dans quelques festivals de second plan et sorti confidentiellement aux Etats-Unis en 2002, The Cat's Meow, malgré son allure un peu télévisuelle, ne manque pas de charme. Bien que moins subtile que le très "british" Gosford Park d'Altman, cette production européenne nous permet de pénétrer brièvement dans ce cercle, clos, vain et intrigant, des personnalités appartenant au cinéma des années 1920. Les portraits de Hearst et Chaplin sont caricaturaux mais savoureux, le premier en jaloux paranoïaque, le second en narcissique spirituel. Bogdanovich s'amuse d'ailleurs à citer dans son film une des scènes du Citizen Kane de Welles, celle où le riche nabab, dans sa folie suspicieuse, saccage la chambre de sa bien-aimée. Le réalisateur, dont la carrière purement cinématographique reste en demi-teinte, prouve qu'il connaît son affaire, en particulier qu'il sait diriger des acteurs. La pétillante prestation de Kirsten Dunst est réjouissante. Son registre est bien plus large que celui qu'elle développe pour être MJ Watson, personnage dans laquelle elle est désormais un peu cataloguée. Elle donne, en tous cas, envie de la voir dans une comédie un peu moins mièvre que le récent Elizabethtown. En revanche, Eddie Izzard a plus de mal à donner une réelle épaisseur à son Chaplin auquel il ne ressemble pas beaucoup. Pas sûr, non plus, que Cary Elwes soit le meilleur choix pour incarner le producteur de The Narrow Trail et homologue de Griffith et Sennett.

N.B. en 1985, cette histoire a fait l'objet d'un téléfilm dans lequel Robert Mitchum était Hearst, Virginia Madsen, Marion Davies et Lorne Kennedy, Chaplin.

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