"Ne m'obligez pas à aller jusqu'au bout."
William Klein avoue avoir entrepris Mister Freedom parce que sa participation à Loin du Vietnam
ne l'avait pas satisfait. Une farce parodique aurait-elle plus d'impact
qu'un documentaire nettement engagé sur le plan politique ? Cela reste à
prouver. La production se situe, néanmoins, dans un contexte historique
particulier. A partir du mois de novembre 1963, l'implication des
Etats-Unis dans la guerre du Viêt-nam, conséquence de l'échec de la
tentative française de recoloniser l'Indochine et de la séparation du
pays en deux par une zone démilitarisée, s'accélère. La France quitte
l'OTAN en 1966. En 1968, l'opposition à la guerre, née dès 1964, se
renforce et pèse assez nettement sur la campagne électorale, marquée par
l'assassinat de Robert Kennedy et la désignation de Richard Nixon à la
Maison-blanche. Rien d'étonnant, alors, à voir Klein
imaginer un personnage symbolisant l'Amérique nationaliste et
hégémonique débarquer dans un pays déjà gagné par les idées du
gauchisme.
Mr Freedom, agent très spécial de la Freedom Inc., est chargé par le Dr Freedom de pallier le décès du Capitaine Formidable en allant le remplacer en France. Sur place, il devra, avec l'aide du groupe constitué par son prédécesseur, combattre Moujik Man, allié aux membres du FAF (French Anti-Freedom), et Red China Man,
tous deux décidés à implanter le communisme, tendance soviétique ou
chinoise selon le cas, dans l'hexagone. La tâche sera d'autant plus
ardue qu'il existe un traître à l'intérieur de son propre camps.
Entre le modèle des grandes satires politiques qu'est The Great Dictator
et les premiers films sur le conflit au Viêt-nam, la guerre froide a
influencé nombre de scénarii, y compris parodiques, parmi lesquels celui
de l'excellent Dr. Strangelove.
L'originalité de Mister Freedom
est de mettre en scène, avant la lettre, un "super héros" qui semble
tout droit sorti d'une bande dessinée, sorte de mélange, plus grotesque
qu'harmonieux, de Captain America et Robocop. William Klein
ne fait, évidemment, pas dans la subtilité et son film, qui tient
beaucoup du spectacle de cirque ou du Grand Guignol, souffre un peu de
cette caricature excessive d'une Amérique mercantile, réactionnaire,
raciste et belliqueuse. Comme dans Qui êtes-vous, Polly Maggoo ?, la distribution étonne par sa composition et sa variété (Jean-Claude Drouot, qui venait de quitter son costume de la série Thierry la Fronde, le télégénique Donald Pleasence, Philippe Noiret, Serge Gainsbourg, également auteur de la bande originale,...) avec notamment Delphine Seyrig, surprenante dans un apparent parfait contre-emploi. Mister Freedom est aussi l'un des rares films à comporter des images en couleur des événements de mai 1968.
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