lundi 7 novembre 2005

Klimt, Kokoschka, Schiele et Moser, Vienne 1900


"... Le dernier spasme avant la paralysie menant au néant." (Hermann Bahr)

Les Galeries nationales du Grand Palais organisent, depuis le 5 octobre dernier et jusqu'au 23 janvier 2006, une exposition consacrée aux œuvres de quatre grands peintres viennois, Gustav Klimt*, Egon Schiele, Koloman Moser et Oskar Kokoschka, réunies pour la première fois à Paris dans une manifestation de cette envergure. Ces quatre-vingt onze tableaux et cinquante-cinq dessins réalisés entre 1890 et 1918 (année du décès des trois premiers artistes) permettent de mieux comprendre ce qu'a été cette remarquable transition vers la modernité picturale sans pour autant constituer une rupture avec le classicisme comme le sera l'abstraction de Wassily Kandinsky. C'est l'académisme qui est remis en question par la Sezession (sécession), laquelle apparaît d'abord en Allemagne (1892). Ce mouvement sera développé en Autriche à partir de 1897 sous la forme d'un groupement d'architectes et de plasticiens viennois créé par Josef Olbrich, Josef Hoffmann et par Klimt appelé Sezessionstil ou Art nouveau.
Le documentaire de Valérie Manuel rappelle la formidable richesse artistique et la prodigieuse effervescence culturelle que connaît, à cette époque, la capitale de l'empire austro-hongrois. Sous l'influence de la philosophie nietzschéenne annonçant la fin de la morale judéo-chrétienne et du changement de siècle, s'élaborent des révolutions sociales, politiques et artistiques. Au moment où, à Paris, naît le cinéma des frères Lumière, Freud fonde sa psychanalyse, Lénine, Staline et Trotsky échafaudent leur révolution communiste, Schönberg supprime les relations tonales pour donner naissance au "Sprechgesang" (mélodie parlée) avant de théoriser le dodécaphonisme. C'est le refus d'un certain conformisme et la recherche d'une plus grande liberté qui caractérisent ces révolutions et motivent les créateurs du palais de la Sécession et Koloman Moser, le père du Wiener Werkstätte (Atelier viennois).
Le film permet, bien sûr, de (re)découvrir la personnalité et l'art des quatre peintres, grâce à la présentation de certaines de leurs œuvres mais aussi aux commentaires et analyses d'un certain nombre d'intervenants, Bernerd Stiegler, philosophe et directeur de l'IRCAM, Christine Lecerf, historienne spécialiste de la littérature autrichienne, Elisabeth Roudinesco, historienne, psychanalyste et biographe de Freud, Bruno Mathon, peintre et critique d'art, Serge Lemoine, président du Musée d'Orsay et le professeur Rudolf Léopold, collectionneur et fondateur du musée Léopold à Vienne. Vienne 1900 est aussi l'occasion de souligner et de s'interroger sur l'étonnante diversité, voire divergence, des productions de ces artistes.
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*Raoul Ruiz a tourné, en début d'année, un film consacré à Klimt avec John Malkovich dans le rôle titre.

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