jeudi 6 octobre 2005

Baramnan gajok (une femme coréenne)


"Fidèle à soi-même."

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Avec Baramnan gajok, Im Sang-soo clôt une trilogie consacrée à la femme et à ses désirs intimes. Après des célibataires, c'est d'une femme mariée au sein d'une "famille licencieuse" (traduction littérale du titre original) dont il fait le portrait. Sous une tonalité apparente de comédie dramatique, le film est une critique sévère et amère du système patriarcal coréen et, plus généralement, de la gent masculine, ce qui lui confère une portée plus universelle. A travers le thème du couple, de l'adultère et du sexe, il développe aussi, de manière subtile, ceux de la responsabilité et de la culpabilité (et de son absence). Baramnan gajok, présenté en compétition à la 60e Mostra de Venise, a reçu le "Lotus d'or" du Festival du film asiatique de Deauville en 2004.
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Cela ne va pas fort entre Ho-jung et Young-jak. Elle élève Sooin, leur fils adoptif, suit des cours de danse et s'occupe un peu de son beau-père, gravement malade et hospitalisé. Il partage son temps entre son cabinet d'avocat et sa maîtresse photographe tout en taquinant copieusement la bouteille. Leur vie conjugale est réduite au strict minimum, ils se croisent parfois au lit et dans la salle de bain. Ho-jung est convoitée par son jeune voisin, un adolescent dont les parents sont séparés et qui va abandonner le lycée. Lorsque le père de Young-jak décède, celui-ci rate la chance de reprendre sa vie en main tandis que son épouse reconsidère sa condition de femme.
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"La mort et la vie", tel pourrait être l'épigraphe du troisième long métrage du cinéaste coréen qui s'ouvre, d'ailleurs, avec deux séquences explicites sur cette dialectique fondamentale. Un an avant Yeojaneun namjaui miraeda du compatriote Hong Sang-soo, Baramnan gajok n'est pas, à proprement parler, un film sur l'amour et sur la libération de la femme. Il illustre plutôt ce délicat mouvement d'affranchissement des valeurs traditionnelles de la société sans que soit établie, pour autant, d'autre alternative solide et reconnue que le dévoyé modèle capitaliste occidental. Il n'est alors pas étonnant d'y trouver des personnages désemparés et sans projet, des hommes entre immaturité et folie, des femmes, éternelles victimes* cherchant à sortir de cet effroyable statut. Cette chronique, somme toute classique, d'une Madame Bovary moderne et asiatique, malgré ses divers développements, a parfois du mal à retenir la pleine attention du spectateur. Une scène, totalement inattendue, d'une fulgurante violence viendra rappeler celui-ci à l'ordre au début de la dernière partie du métrage, donnant au film une inflexion décisive. Baramnan gajok, dont la photographie alterne les teintes froides ou douces selon le motif de la scène, doit beaucoup à la prestation de Mun So-ri, qui après Bakha satang et Oasis, confirme son talent et la polyvalence de son jeu.
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*dans le scénario, par exemple, seuls les hommes de la famille Young ont survécu à la guerre.

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