mardi 11 janvier 2005

Kansas City Confidential (le quatrième homme)


"- Si seulement il arrivait une fois qu'un poisson prenne un homme...
- Cela me parait possible, tout dépend de l'appât."

Deuxième d'une série de huit polars entamée, la même année, avec Scandal Sheet(tiré d'un roman de Samuel Fuller) par Phil Karlson, Kansas City Confidential est probablement l'une des meilleures œuvres du réalisateur. Est-ce parce qu'il est né, au début du siècle dernier, à Chicago, mais celui qui tournera, sept ans plus tard, le pilote en deux parties de la fameuse série télévisée The Untouchables, sorti en salles en 1962 sous le titre The Scarface Mob, semble particulièrement à l'aise dans ce genre. Une autre raison de ce succès réside peut-être aussi dans le choix de sources réalistes pour ses scénarii. C'est le cas ici puisque le film s'inspire d'un braquage, organisé par un ancien policier, d'un convoi de transport de fonds de la Brinks à Boston en 1950. Bien qu'il ne joue pas, comme pourrait le laisser supposer son titre français, la surenchère et ne possède même pas de parenté thématique direct* avec l'excellent film de Carol Reed, Kansas City Confidential, servi par une solide distribution, est un film noir efficace que les amateurs du genre se doivent de connaître.
Tim Foster (Preston Foster), un ancien policier de Kansas City limogé depuis deux ans, a mis au point un astucieux braquage de transport de fonds. Pour le réaliser, il recrute successivement Pete Harris (Jack Elam), Tony Romano (Lee Van Cleef) et Boyd Kane (Neville Brand) dont le casier judiciaire respectif est déjà bien chargé, qu'il convainc grâce à des arguments musclés. Les trois gangsters ne connaissent pas l'identité du chef de la bande, masqué au moment de leur engagement, ni celle de leurs complices dont le visage est également dissimulé pendant et après le vol. L'équipe dérobe les sacs, contenant 1,2M$, de la Southwest Bank et prend la fuite à bord d'une fausse camionnette de fleuriste. C'est le conducteur de la véritable camionnette de fleurs, Joe Rolfe (John Payne), un ancien détenu, qui est poursuivi, rattrapé et violemment interrogé par la police avant d'être relâché lorsque le véhicule des voleurs est retrouvé. Rolfe n'en reste pourtant pas là. Avec l'aide d'amis du milieu, il retrouve la trace de Pete Harris à Tijuana au Mexique et le contraint à révéler le lieu du partage du magot dérobé. Alors qu'ils vont s'envoler pour Borados, Pete Harris est abattu par la police ; Rolfe prend alors l'identité du mort. Il arrive dans la petite ville touristique proche du Guatemala en même temps qu'Helen Foster (Coleen Gray), la fille de Tim.
Sorti la même année que The Narrow Margin de Richard Fleischer, avec lequel il partage aussi le même chef-opérateur, George E. Diskant, Kansas City Confidential prend ses racines à la fois dans le style documentaire des polars de la Fox et dans les productions de son ex-collègue d'Universal, Mark Hellinger (The Killers, The Naked City). Mais le réalisateur de Behind the Mask, tout en adoptant quelques uns des principes du film noir (notamment de saisissants gros plans), développe sa propre personnalité cinématographique. Il réussit également, ce qui n'a rien d'évident compte tenu de l'intrigue, à ne pas laisser retomber la tension avant le dénouement final, lequel est, malheureusement, un peu trop conventionnel. En regardant le film de Phil Karlson, on mesure à quel point, si l'on avait encore un doute, le T-Men d'Anthony Mann a eu une influence durable et déterminante sur le genre. On trouve même, dans Kansas City Confidential, une citation explicite à la fameuse scène de claquement brutal sur les oreilles. Le casting est un des atouts du film. Outre le solide John Payne, le partenaire de Maureen O'Hara dans Miracle on 34th Street (que l'on retrouvera à nouveau à deux reprises chez Phil Karlson, dans 99 River Street et Hell's Island), on y croise deux "gueules" du cinéma américain, le quasi débutant Lee Van Cleef aux côtés du plus expérimenté Jack Elam (les deux hommes partageaient d'ailleurs, la même année, l'affiche de High Noon de Zinnemann).
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*et encore moins avec celui de Paul Verhoeven. Il annonce davantage, sur le plan de l'idée de départ du script, The Thomas Crown Affair de Norman Jewison et Usual suspects de Bryan Singer.

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