"Butcher's hands, gentle souls."
Jusqu'à présent, la signature Spielberg sur un film était généralement le gage d'une relative qualité. Jusqu'à présent. Car avec Munich, force est de reconnaître que cette garantie n'est plus assurée. Sa production, d'abord décalée pour permettre le tournage de War of the Worlds,
est ensuite lancée dans la précipitation pour rééditer "l'exploit" de
1994 de voir deux films du même réalisateur figurer sur la liste des Academy Awards. Cérémonie au cours de laquelle ils font d'ailleurs de la pure figuration. Munich,
à l'image de ce puéril objectif, reste une tentative anecdotique de
révéler les enjeux, politiques et humains, d'une opération qui, par
essence, aurait dû rester secrète.
Comme le téléfilm Sword of Gideon, le dernier opus du réalisateur de Schindler's List s'inspire du roman du journaliste canadien George Jonas, "Vengeance: The True Story of an Israeli Counter-Terrorist Team" publié en 1984, dont la véracité affichée est assez largement sujette à caution. Pour peaufiner son scénario, Spielberg fait appel à Eric Roth, adaptateur de Forrest Gump et collaborateur de Michael Mann, et au dramaturge et "Prix Pulitzer" Tony Kushner, habitué à fréquenter les anges, pour lequel il s'agit de la première incursion au cinéma.
Septembre
1972. Onze athlètes de la délégation israélienne, participant aux jeux
Olympiques d'été de Munich, sont assassinés par huit membres du groupe
terroriste Septembre noir. Le premier ministre Golda Meir donne
son feu vert à une opération organisée par le Mossad visant à éliminer
les onze organisateurs du massacre en terre allemande. Avner Kaufman,
dont la jeune épouse attend un enfant, est choisi pour diriger cette
importante et délicate mission. Entouré d'une petite équipe constituée
de Steve, Carl, Hans et de l'artificier belge Robert, il se rend à Rome pour y exécuter Wael Zwaiter. A Paris, Avner alias Franz Storsch rencontre Louis qui appartient à un groupe familial dirigé par Papa auprès duquel il obtient, moyennant de significatives rémunérations, des informations sur ses cibles. La deuxième, Mahmoud Hamchari,
réside justement dans la capitale française. Elle est tuée dans son
appartement par l'explosion d'un téléphone piégé, déclenchant une
riposte sous forme de lettres piégées adressées aux ambassades ou
administrations israéliennes.
Malgré l'interdiction de retourner dans son pays pendant toute la durée de sa mission, Avner
se rend ensuite à l'hôpital pour la naissance de sa fille. A Chypre,
c'est encore un dispositif explosif qui est utilisé pour occire Hussein Abad al-Chir, installé à l'Olympic Hotel de Nicosie et protégé par des agents du K.G.B. Avner,
qui occupe la chambre voisine pour donner le signal du déclenchement de
la charge, manque d'être tué ou gravement blessé en raison de la
puissance inattendue de la déflagration. Louis, après avoir rappelé que son organisation excluait de travailler avec des gouvernements, livre à Avner sa prochaine destination : Beyrouth où se trouvent Kemal Adwan, Kamal Nasser et Abu Youssef. La capitale libanaise ne faisant pas partie de sa zone d'intervention, Avner essaie de convaincre son contact Ephraim
de le laisser mener cette nouvelle opération à la place de l'armée et
du Mossad pour ne pas voir se tarir sa source d'informations.
Munich
avait été un sombre échec des autorités politiques, policières et
militaires allemandes ; le film éponyme est, à bien des égards, son
équivalent cinématographique. Les scènes d'action sont particulièrement
décevantes, indignes de certaines séries télévisées actuelles, et il est
surtout bien difficile de dégager une idée claire et forte de cette
prétendue analyse psychologique d'un individu livré à ses
contradictions, métaphore supposée, selon Spielberg
et ses scribes, d'un peuple tout entier. Certains réussissent pourtant à
relever du talent ou de l'audace dans ce film où règnent, en
permanence, une totale confusion, non pas "des sentiments" selon l'aveu du personnage joué par Mathieu Amalric, mais intellectuelle. Munich
ne peut certes pas être qualifié de manichéen puisque, au nom d'un
consensus mou, il esquive ou escamote le débat. Parmi la galerie de
portraits de son film, le réalisateur a, semble-t-il, voulu s'exprimer à
travers Robert, interprété par Mathieu Kassovitz.
Un choix judicieux, celui d'un démineur idéaliste, devenu fabricateur
de bombes sur un mensonge et créateur de récréatifs dispositifs animés
dans l'isolement de sa petite maison de campagne. Restons-en aux faits, (re)voyons One Day in September !
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