"Tu crois être la seule à mentir ?"
Produit par Anne-Dominique Toussaint (Le Battement d'ailes du papillon), Sukkar banat est le premier long métrage et second film de la Libanaise Nadine Labaki.
Réalisatrice de publicités et de clips, la native d'une petite localité
à l'Ouest de Beyrouth* a développé son projet à partir de 2004 au cours
des deux sessions annuelles organisées par la Résidence du Festival de Cannes. Logiquement sélectionné à la "Quinzaine des réalisateurs" 2007 et postulant à la "Caméra d'or", le film a également été présenté au Festival de La Rochelle en juillet de la même année. Belle et agréable gourmandise à la saveur légèrement acidulée, Sukkar banat atteint son objectif de séduction mais manque sensiblement d'un peu de longueur en bouche.
Layale, Nisrine et Rima travaillent ensemble dans le salon de beauté de la première. Chrétienne et la maîtresse d'un homme marié, Rabih Khoury, qu'elle rejoint pour de fugitives rencontres, Layale espère qu'il va quitter sa femme pour elle. Nisrine, musulmane, doit bientôt épouser son fiancé Bassam. La masculine Rima découvre, elle, son attirance pour le charme d'une belle cliente à la longue chevelure brune. Jamale Tarabay,
ancienne actrice divorcée et mère de deux enfants, complète cet amical
trio lorsqu'elle ne court pas les castings. De l'autre côté de la rue, Rose, une gentille vieille fille retoucheuse de profession, doit s'occuper de sa sœur aînée Lili
qui n'a pas toute sa tête. Et puis il y a ce gendarme moustachu qui
verbalise avec régularité le véhicule obstinément mal stationné de Layale.
S'il n'a pas le goût crémeux du caramel écossais, le citronné Sukkar banat,
composé en montage alterné, évoque volontiers le tartan du même cru. A
l'image de la population de la ville où il est tourné, le film
s'organise tel un patchwork de sentiments fédérés par une chaotique mais
persistante recherche du bonheur. La structure matriarcale suggérée par
le film de Nadine Labaki
est-elle une réalité ou le produit d'un fantasme féminin ? Qu'importe,
même s'il montre aussi qu'il reste au sexe dit faible à y conquérir
certaines libertés que la morale traditionnelle ou religieuse et,
peut-être surtout, le regard des autres entravent encore. Original, joué
avec beaucoup de naturel par des interprètes novices, réalisé avec un
réel sens esthétique, Sukkar banat est une délicieuse friandise qu'il serait dommage de ne pas goûter.
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*d'où est également originaire le dernier président du pays, Emile Lahoud.
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