"Ici on fait dans le désastre, désastre de luxe !"
Quatre ans après un fort sympathique court métrage, Jean-Jacques Beineix faisait une retentissante entrée dans la cour des longs en adaptant le polar de l'écrivain suisse Daniel Odier, publié en 1979 sous le pseudonyme de Delacorta. Probablement personne n'attendait alors l'ancien assistant de Claude Zidi, René Clément ou Gérard Brach
sur ce terrain cinématographique. D'autant qu'au contenu, le
réalisateur ajoutait avec la complicité du directeur de la photographie Philippe Rousselot, futur collaborateur oscarisé de Robert Redford,
cette touche esthétique qui allait devenir sa marque de fabrique et
apporter une certain renouveau stylistique au film français. Avant Subway et Mauvais sang, la deuxième production respective de Luc Besson et Leos Carax, Diva
connaissait, malgré un démarrage calamiteux, un franc succès public en
France et à l'étranger, notamment aux Etats-Unis, où il accédait au rang
de film-culte. Quatre "César"*, dont celui de la première œuvre, vinrent confirmer cet engouement.
Jeune postier, Jules voue une passion sans borne pour la cantatrice Cynthia Hawkins.
A la fin d'un récital donné par celle-ci, qu'il a enregistré en
cachette, il se rend dans sa loge pour la saluer et, profitant de la
présence de nombreux admirateurs, dérobe la robe portée ce soir-là par
l'artiste lyrique. Le lendemain, à la sortie de la gare Saint-Lazare, Jules
bouscule par mégarde une jeune femme aux pieds nus, poursuivie par deux
inquiétants individus censés appartenir à la police. Elle est bientôt
poignardée par l'un d'entre eux sous les yeux de Paula, inspectrice à la Brigade Criminelle, et de Krantz l'un de ses informateurs, qu'elle devait rencontrer. Nadia, la victime, était décidée à dénoncer le réseau de prostitution et de stupéfiant dirigé officiellement par l'Antillais, un criminel derrière lequel se dissimule un personnage important. Jules fait bientôt la connaissance d'Alba, croisée chez un disquaire, et de son original ami Gorodish. Il ignore encore être en possession d'une dangereuse cassette compromettante, glissée par Nadia dans l'une des sacoches de son cyclomoteur.
"Ben j'suis pas un classique, j'suis un lyrique", réplique de Jules au début du métrage, pourrait bien être la durable profession de foi du cinéaste Jean-Jacques Beineix. Thriller laxe et sentimental, Diva brille en effet davantage grâce à la vibration de ses moments romantiques, bercés par l'Aria de "La Wally" d'Alfredo Catalani ou par la superbe "Promenade sentimentale" de Vladimir Cosma devenue un classique, que par ses quelques séquences d'action. L'important et original travail de défrichage de Beineix
sur le plan de la mise en scène doit aussi être souligné.
L'enthousiasme du jeune public, qui allait également s'exprimer quelques
mois plus tard en faveur de Raiders of the Lost Ark de Spielberg, apparaît alors parfaitement cohérent... tout comme les précoces réticences de la critique. Contrairement au jeune Frédéric Andréi, qui venait d'avoir un petit rôle dans Le Voyage en douce de Michel Deville et ne savait certainement pas qu'il tenait là celui de sa carrière, le film contribua au décollage de celles de Richard Bohringer et de Dominique Pinon (dans son premier long métrage). A noter les apparitions d'Isabelle Mergault, de Brigitte Lahaie et la première à l'écran de Laure Duthilleul, future partenaire de Bohringer dans Le Destin de Juliette d'Aline Issermann.
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*meilleurs photographie, musique et son.
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