"... Un rôle extraordinaire, dans un film extraordinaire."
L'idée du Schpountz est venue à Marcel Pagnol alors qu'il produisait Angèle, son premier film avec Fernandel. Willy Faktorovitch,
son chef-opérateur, à l'origine de ce néologisme germano-slave et de la
mésaventure, sous forme de canular monté en collectif au détriment d'un
prétendu double de Charles Boyer*, servit de point de départ au scénario. Le Schpountz met en scène, dans un registre très différent, le couple vedette de Regain, adapté du roman de Jean Giono, tourné simultanément (mars-septembre 1937) et sorti un peu moins de six mois plus tôt. Les aléas de la production ne permirent notamment pas à Pierre Brasseur
de tenir son rôle pendant toute la durée du tournage et ses brèves
apparitions à l'écran ne sont d'ailleurs pas créditées au générique.
Dans la petite épicerie provençale de son oncle Baptiste, Irénée Fabre s'ennuie et se montre souvent maladroit dans son emploi. Contrairement à son jeune frère Casimir,
qui fait preuve d'un certain sens du commerce et sait prendre des
initiatives, ce fils aîné d'un aventurier est convaincu de posséder un
don qu'il tient secret, celui de la comédie. Son plus grand espoir
consiste d'avoir un jour l'opportunité de devenir acteur de cinéma. Un
film est justement en tournage à proximité de ce faubourg de Marseille. Astruc, un des membres de l'équipe de production, vient d'ailleurs emprunter un ustensile en vente dans le magasin d'Irénée
pour dépanner son automobile. Ce dernier tente, un peu plus tard, de
vanter ses talents d'acteur à cette nouvelle connaissance providentielle
entourée de ses collègues, dont Françoise, la monteuse. Le petit groupe de joyeux plaisantins, sûr d'avoir rencontré un authentique "schpountz", fait signer à ce doux rêveur un mirifique mais totalement illusoire contrat d'engagement pour lequel il doit monter à Paris.
Dans son dixième film, sorti quelques mois avant La Femme du boulanger, Marcel Pagnol s'amuse très ouvertement à décrire, sous un angle assez peu flatteur, le petit monde du cinéma (parisien !). Derrière son humour espiègle, à la fois caustique et inspiré, Le Schpountz, comme cette quatrième et ultime adaptation d'une œuvre de Giono,
possède en effet les caractéristiques d'une fable morale dans laquelle
s'opposent humanité et cruauté, professionnalisme et un certain
dilettantisme puéril. Mais la "pensée profonde" de ce scénario original,
à nouveau remarquablement écrit, se situe plutôt dans l'éloge de la
sincérité et de l'art du comique. Une "doctrine" formidablement
professée par l'excellent Fernandel, dont la mémoire collective retiendra longtemps la performance dans la recréation d'un article du Code Civil ("tout condamné à mort aura la tête tranchée"),... et disqualifiant à l'avance toute tentative de révision ultérieure !
___
*interprète de Napoléon Bonaparte et partenaire l'année précédente de Greta Garbo dans Conquest de Clarence Brown. Les deux acteurs sont cités ou imagés dans le film de façon nettement moins élogieuse que dans le cas de leur confrère Raimu.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire