"Un destin d'ivoire."
Il
est des œuvres cinématographiques, comme des personnes, dont on
s'éprend. Parce que c'est vous, parce que c'est elle ; peut-être aussi
parce qu'elle vous rappelle un peu une passion de jeunesse. Natural City est de celles-là. Ce second film du Sud-coréen Min Byung-chun séduit par sa beauté plastique mais également parce que, s'affranchissant des conventions de l'anticip-action, il repose avant tout sur une belle et tragique histoire d'amour. Certains lui préféreront 2009: Lost Memories du compatriote Lee Si-myung
qui l'a précédé parmi les représentants du renouveau du cinéma
national. Imaginatif, plus radical et classique, celui-ci déroute en
effet moins des aficionados souvent conservateurs. Mais il ne possède
pas le charme dérangeant de Natural City,
de son scénario qui ne sacrifie pas à l'habituelle dichotomie
rassurante et de son héros complexe auquel les spectateurs ont du mal à
s'identifier.
Au
cours du dernier tiers du XXIe siècle, le monde, après un conflit
nucléaire, se partage entre humains et cyborgs, créatures électroniques
très développées au service de l'homme. Ces robots, si parfaitement
semblables à leur créateur, suscitent parfois un attachement trop fort
chez leur propriétaire. C'était le cas du père de Cyon, une jeune femme diseuse de bonne aventure et prostituée à l'occasion qui vit dans un bidonville. Comme cela l'est pour R, membre d'un groupe d'élite de la police, vis à vis de sa belle humanoïde Ria. Mais ces robots très perfectionnés ont une durée de vie et Ria n'a plus que soixante dix-huit heures à vivre avant de voir ses composants recyclés. R va tenter, avec l'aide du professeur Croy, de prolonger l'existence de celle qu'il aime. C'est à ce moment précis que Cyper N-77,
un redoutable cyborg, et quatre de ses semblables pénètrent dans le
centre médical NEUCOM à la recherche d'informations dans la base de
données ADN. Plusieurs équipes de la MLPC, dont font partie R et son ami et supérieur Noma, sont dépêchées sur place pour les neutraliser.
Si
les cyborgs remplaçaient aujourd'hui les chats et les chiens en France,
ils seraient près de vingt millions, soit environ deux fois la
population de la région parisienne. Et leur succès serait probablement
supérieur dans la mesure où leurs aptitudes dépasseraient sûrement
largement celles des habituels quadrupèdes domestiques. Voilà, en guise
de préambule, de quoi fixer les idées sur un phénomène dont les scénarii
de Artificial Intelligence: AI et de I, Robot par exemple faisaient l'un des éléments fondateurs de leur intrigue. C'est le cas aussi pour Natural City, comme cela l'était avant lui pour Blade Runner dont il s'inspire partiellement. Contrairement à certaines assertions, le film de Min Byung-chun n'est pas un remake de l'un des chef-d'œuvres de Ridley Scott.
D'ailleurs son influence, surtout sensible dans la première partie, est
rapidement oubliée. Les deux films partagent, il est vrai, les thèmes
de la mémoire, de la solitude et de l'immortalité dans un décor de
mégapole à la fois futuriste et décadente. Mais Natural City
se distingue de l'illustre référence de la science-fiction par un choix
de héros plus ambigu et rebelle, nettement moins positif. Cette funeste
et belle histoire d'amour, à l'esthétique qui rappelle certaines bandes
dessinées de SF, est également une intéressante allégorie de la
renaissance.
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