lundi 13 mars 2006

L'Hypothèse du tableau volé


"Hélas ! Et pourtant."

Dans sa vaste demeure, le collectionneur et propriétaire de l'ensemble de l'œuvre du peintre Frédéric Tonnerre mène, à nouveau, une réflexion sur le sens figuré et caché de ces six, non sept tableaux. Un lien sous-jacente ou implicite semble en effet les traverser, du "Diane et Actéon" à "Torture de l'Inquisition", dont la démonstration et l'analyse sont rendues difficiles par le vol du quatrième d'entre eux. La cinquième toile, une banale scène de la vie quotidienne, refusée par le salon de 1887 et acquis inexplicablement par l'Etat, valut à son auteur un scandale puis un procès intenté par les Huit pouvoirs lorsque la police fit irruption, en pleine cérémonie, chez l'artiste.
Précédé par la première strophe d'un poème de Victor Hugo extraits du dernier livre des "Chatiments"*, L'Hypothèse du tableau volé est une courte mais remarquable double énigme artistique. Avec cet étonnant récit exégétique et pictural, traité sur un mode baroque et vaguement inspiré du "Baphomet" de Pierre Klossowski paru en 1965, Raoul Ruiz invente le "documentaire fantastique" et fonde une esthétique satirique articulée autour d'une double dialectique. Celle, très hégélienne, entre le "faire allusion" et le "montrer" et, humoristique, entre l'analyse et la narration, mêlant astucieusement réalité et fiction ésotérique, notamment grâce au procédé de tableaux vivants" et autres figur(in)es humaines. Cette approche surréaliste sera d'ailleurs à nouveau empruntée pour certains des films suivants du cinéaste, en particulier dans Combat d'amour en songe.
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*"Sur l'amnistie politique des condamnés de 1851" (Ultima verba, Livre VII, 17)

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