lundi 6 mars 2006

CQ2, Seek You Too (tout près du sol)


"... Elle peut pas avoir les deux."

Nous connaissions Carole Laure chanteuse et actrice (notamment de Gilles Carle, Alain Corneau, Bertrand Blier ou Jean-Pierre Mocky). Il va falloir désormais penser à la Québécoise en tant que cinéaste. Après un premier long métrage en collaboration avec Pascal Arnold, elle réalise CQ2 (Seek You Too), une œuvre très personnelle dont elle signe seule le scénario mais où, contrairement au précédent, elle ne joue pas, laissant sa fille Clara Furey tenir le rôle principal. Comme Les Fils de Marie, ce second film a été sélectionné par la Semaine internationale de la critique cannoise. Malgré quelques maladresses, essentiellement narratives, CQ2 fait la preuve d'un talent réel et d'une certaine originalité.
Un peu paumée, Rachel, en rupture avec sa mère parce qu'elle ne supporte pas son compagnon, suit une inconnue, Jeannne, à sa sortie de prison. Les deux femmes s'installent dans le motel de Steven et deviennent proches, la plus âgées formant sa cadette à la danse contemporaine et, du même coup, canalisant son malaise et sa révolte dans cette discipline exigeante. Le duo est rejoint par Odile, une brave mère de famille prise un jour par un coup de folie, que Jeannne a connu pendant son incarcération. Alors que celle-ci renoue avec une vie sentimentale chaotique et voit son passé récent réapparaître sous la forme d'un étrange individu paraplégique, Rachel trouve un début d'équilibre grâce à son art. Mais la violence resurgit lorsqu'on l'attend le moins.
Si Rachel, le personnage central, n'est pas, à proprement parler, la descendante de Marie Chapdeleine, les souvenirs d'enfance hantent encore Carole Laure, orpheline de mère et abandonnée par son père. CQ2 (Seek You Too) laisse, bien sûr, une place importante à la danse, dont les scènes occupent un peu moins de la moitié du métrage. C'est aussi un film sur les femmes et la filiation, les personnages masculins étant cantonnés soit aux rôles d'acteurs passifs ou de témoins, soit constituant les vecteurs négatifs du récit. La narration souffre d'un scénario un peu confus, sans ligne directrice précise au moins dans son premier tiers. Et quelques éléments de dramatisation semblent artificiels ou incongrus dans sa progression. Mais ces maladresses ne parviennent pas à réduire significativement l'intérêt du film. Le contraste stylistique avec le film précédent frappe en revanche assez nettement. Autant Les Fils de Marie se caractérisait par le statisme de sa mise en scène, autant ici la caméra est littéralement prise dans le tourbillon des âmes et des corps, mouvement accentué par un montage énergique. Il faut également, sur ce point, souligner la qualité du travail de Gérard Simon dont la photographie sait adroitement illustrer les émotions des personnages. Enfin, la danseuse et actrice débutante Clara Furey réussit à donner une authentique intensité, pas seulement chorégraphique, à son interprétation. 

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