"... Mais ce qui compte, c'est le jeu."
Le réalisateur et producteur israélien de Sof Ha'Olam Smola n'est pas un total inconnu. Il est, en effet, l'auteur du très modeste film horrifique Doppelganger, avec Drew Barrymore, sorti il y a plus de dix ans. Avi Nesher
semble plus à l'aise dans cette comédie dramatique originale dédiée à
son père, tirant ses sources d'expériences vécues et dénonçant les
préjugés, l'enfermement sur soi et l'intolérance. Mais comme le suggère,
peut-être, subtilement le titre, Sof Ha'Olam Smola
est surtout un film sur les émois du cœur, amour et amitié, et c'est
dans ce registre qu'il est le plus convaincant. Si la coproduction
israélo-française met en avant ses deux acteurs français, les vraies
vedettes du film sont deux étonnantes jeunes débutantes.
Quelque part en Israël, entre Tel Aviv et Eilat, à la fin des années 60. Abandonnant son Inde natale, la famille Talkar s'installe, comme beaucoup d'immigrants, dans un village au milieu du désert. Dépaysée, désappointée, en particulier Rachel,
la mère, elle n'a qu'une envie, repartir le plus vite possible. Mais
pour aller où ? La réalité reprend vite ses droits sur les rêves et les
idéaux. Roger, le père, va travailler dans l'usine de bouteilles locale, Sara, l'aînée, va à l'école. Elle y rencontre Nicole Shushan,
la cadette d'une famille d'origine marocaine, arrivée il y a dix ans,
avec les mêmes espoirs et confrontée aux mêmes difficultés. Derrière le
choc des cultures, une grande amitié va naître entre les deux jeunes
femmes, nourries par les joies et les blessures de cette vie, à la fois
de promiscuité et d'isolement, apparemment sans horizon.
S'il y avait un label "world movie" comme il en existe un en musique, alors, sans aucun doute, il faudrait le décerner à Sof Ha'Olam Smola.
Car l'un des intérêts majeurs du film vient de ce brassage de cultures,
israélienne, indienne, marocaine, berbère, française, anglaise, lui
donnant un identité chatoyante et tonique. A propos d'identité, il
apporte des éléments d'une réflexion, bien sûr schématiques et parfois
maladroits, sur ce sujet délicat. Mais il n'est pas qu'un simple
divertissement, vite oublié, que le cinéma actuel semble privilégier. On
peut, cependant, regretter qu'il soit moins efficace (pour ne pas dire lourd et caricatural) dans la comédie que dans l'émotion et que plusieurs pistes narratives ne soient qu'ébauchées avant d'être laissées de côté (la durée initiale du film était, il est vrai, de trois heures).
Le bon format aurait probablement été une série feuilletonnante,
permettant au scénario de développer les intrigues et les psychologies.
L'honnête participation des cautions commerciales que sont Aure Atika et Jean Benguigui (qui ont eu le courage, comme les acteurs indiens, de partir tourner en Israël au moment où débutait la guerre en Irak) ne permet pas de masquer le jeune et réjouissant talent de Netta Garti et Liraz Charhi,
cette dernière étant chanteuse avant d'être comédienne. On a hâte de
les revoir à nouveau à l'écran pour confirmer cette première bonne
impression.
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