"C'est une ineptie alambiquée, une légende, pas une prophétie."
Bien
que l'immémoriale lutte entre le Bien et le mal prenne pour principal
champs de bataille notre plus proche quotidienneté, le cinéma essaie
souvent de transcender cette réalité en ayant recours au fantastique.
Tous les cinéphiles ont encore en mémoire les œuvres majeures* dont la
possession démoniaque constitue le thème essentiel. L'originalité de The Reaping tient surtout au pitch biblique imaginé par l'inconnu Brian Rousso. Lui, les producteurs et Stephen Hopkins (réalisateur de plusieurs épisodes de 24 et de The Life and Death of Peter Sellers**)
ne s'attendaient pourtant probablement pas à voir deux plaies
supplémentaires, dénommées Katerina et Rita, en profiter pour s'inviter
sans ménagement sur le tournage de cette authentique série B moderne.
Après un séjour au Chili, le professeur Katherine Winter
de l'université de Louisiane vient de porter à quarante-huit son score
d'explications scientifiques à de prétendus phénomènes miraculeux. Cette
ex-femme pasteur ayant abandonné la foi après une terrible expérience
personnelle au Soudan reçoit un appel du père Michael Costigan
avec lequel elle avait travaillé en Afrique. Celui-ci, récent témoin
d'un étrange phénomène, souhaite l'avertir d'un danger mais il ne
parvient pas à vaincre l'incrédulité de la jeune femme. Doug Blackwell, un homme qui a assisté à la présentation en amphithéâtre de Katherine lui demande d'aider ses concitoyens.
A
Haven, petite ville du sud religieux où il est enseignant de sciences,
les eaux d'un rivière se sont mystérieusement teintées de rouge. Les
habitants bigots accusent Loren McConnell, une jeune fille âgée de douze ans dont le grand frère Brody a été retrouvé mort. Accompagné par Ben, son ancien assistant, Katherine
se rend dans la localité pour tenter de résoudre cette énigme. Alors
qu'ils procèdent à des relevés sur le terrain, le site est
inexplicablement bombardé de grenouilles mortes. Puis des vers et des
mouches infestent brusquement le dîner de Katherine et de Ben invités chez Doug.
"Comment connaître la vérité ? Par la foi."
Les philosophes grecs affirmaient déjà qu'une théorie scientifique n'en
remplace une autre que parce qu'elle explique mieux les phénomènes
observés. Et lorsqu'elle ne les explique pas, la croyance (que certains appellent le mysticisme) s'impose d'elle-même. C'est cette classique dualité alternative qui sert de matériau initial à The Reaping. Mais le scénario des jumeaux Hayes (House of Wax)
s'égare rapidement dans des bayous narratifs inextricables. Dès que les
événements parviennent à désarmer définitivement la rationalité, le
film renonce aux atmosphères qu'il tentait d'élaborer pour perdre lui
aussi toute cohérence et verser dans un surprenant spectaculaire.
Contrairement à l'intriguant The Skeleton Key, ce succès commercial rejoint ainsi des productions telles The Seventh Sign, Stigmata ou The Wicker Man n'ayant pas tenu leur promesse artistique. Quant à l'oscarisée Hilary Swank, elle semble presque aussi désemparée que Kim Basinger dans Bless the Child. Une sorte de lot de consolation, en somme : ces vedettes récompensées restent finalement des acteurs comme les autres !
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*The Exorcist de William Friedkin, Rosemary's Baby de Roman Polanski, The Omen de Richard Donner ou Possession d'Andrzej Zulawski sans oublier l'antique Häxan du Danois Benjamin Christensen.
**mais aussi, hélas, de Predator 2.
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