"... La dernière survivante d'un bateau qui n'en finit pas de faire naufrage."
Descendu de Sur un arbre perché, Serge Korber change radicalement de registre en adaptant, avec Pierre Uytterhoeven (Un Homme et une femme), le deuxième roman de Catherine Paysan*, paru en 1966 et élu "Prix des libraires de France"
l'année suivante. En renouant ainsi avec le cinéma intimiste et
psychologique de ses débuts, le réalisateur et acteur occasionnel signe
le probable meilleur film de sa carrière. Candidat à la "Palme d'or" 1972, Les Feux de la chandeleur était notamment en concurrence avec Nous ne vieillirons pas ensemble de Maurice Pialat.
Le matin du jour de la Chandeleur 1962, Marie-Louise et Alexandre Boursault annoncent leur séparation à leurs jeunes enfants Jean-Paul et Laura.
Le notaire de province, qui reproche à son épouse son ostensible
engagement politique, conserve son bureau dans la maison familiale mais
va prendre un appartement dans cette ville du Jura. Deux ans plus tard,
de retour de l'école, Jean-Paul et Laura sont agressés
par trois grands élèves parce que leur mère gauchiste apparaît à la
tête d'une action sociale et d'une manifestation locales. Celle-ci, à la
demande de son ancien compagnon, cesse alors ses activités politiques.
Hiver 1972. Alexandre s'est remarié avec Clotilde, une professeur de piano. Jean-Paul, marié avec Annie, est devenu le collaborateur de son père et Laura achève ses études de médecine psychiatrique à Paris. Marie-Louise et Alexandre
ne se parlent presque plus. Un jour, ce dernier interpelle son
ex-épouse parce qu'elle part en ville coiffée d'un incongru chapeau de
paille rouge. Dès lors, la divorcée se persuade, jusqu'à l'absurde,
qu'il est en fait toujours amoureux d'elle.
"A la Chandeleur, l'hiver se meurt ou prend vigueur" dit le proverbe populaire. C'est cet espoir et cette crainte qu'affronte 'Mamouchka', le personnage central formidablement interprété par Annie Girardot**. Belle histoire d'amour conjugal, parental et filial, Les Feux de la chandeleur
mêle, avec sensibilité et intelligence, à la fois légèreté et gravité
jusqu'à l'attendu mais poignant coda. Le film fait irrésistiblement
penser au poème de Louis Aragon, "Aimer à en perdre la raison", mis en musique en 1971 par le chanteur engagé Jean Ferrat. Le couple formé par Annie Girardot et Jean Rochefort***, réuni précédemment pour un téléfilm de Marcel Cravenne adapté d'une pièce de Jules Renard, fonctionne à merveille. Mais, outre la qualité des seconds rôles et celle du score de Michel Legrand, l'atout majeur du film est constitué par la prestation de la vedette de La Vieille fille, sorti la même année, une des meilleures actrices des années 1960 et 1970 malgré les quelques navets auxquels elle a participé.
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*ceux qui ont vu le numéro d'"Apostrophes" du 22 septembre 1978 se
rappellent sûrement l'avoir vu effarouchée aux côtés de l'enivré et
insolent Charles Bukowski.
**un rôle ardemment convoité par Simone Signoret.
***qui se retrouveront une troisième fois dans Le Cavaleur de Philippe de Broca.
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