Flandres

"T'as pas de morale."

Quel est le point commun entre Guizi lai le, La Pianiste, Mies vailla menneisyyttä, Oldboy et Flandres ? Tous ces films ont reçu un "Grand prix du jury" du Festival de Cannes. A la lecture de cette liste très partielle, on ne sait pas vraiment s'il faut louer la diversité du cinéma ou s'interroger sur les principes et motivations d'élection de ce type de récompenses. Pour Bruno Dumont, il s'agit d'ailleurs d'une récurrence puisqu'en 1999, le jury alors présidé par David Cronenberg avait décerné le même prix à L'Humanité, son deuxième film. Avec Flandres, le réalisateur nordiste reste en tous cas fidèle à sa démarche artistique initiée il y a dix ans.

André Demester va bientôt quitter sa ferme du nord de la France pour rejoindre le 3e régiment. Il laissera également Barbe, son amie d'enfance, qui lui offre son corps à l'occasion de leur promenade quotidienne. La jeune femme initie une relation sérieuse avec Blondel, lui aussi conscrit dans le corps de troupe de Demester et de son copain Mordac. Pendant que les trois nouveaux soldats affrontent dans un pays nord-africain les escarmouches de la guérilla locale, Barbe sombre peu à peu dans une profonde névrose.

Comme dans le film précédent, il ne se passe pas grand chose au moins au cours de la première partie de Flandres. Nous avions déjà souligné le choix délibéré du cinéaste de capter et de faire passer "cette troublante banalité solitaire et cette "suspension"..." toujours à l'œuvre ici. Moins formel, le style de Dumont persiste dans l'abstraction réaliste et l'aridité. Faut-il s'interroger sur le sens de l'opposition qu'il ménage entre le vide et la violence, entre l'inondation* et la sécheresse (y compris dans leur acception psychologique), entre l'instinct, la pulsion et le sentiment ? Malgré l'importance relative des corps, le film apparaît singulièrement décharné et fruste, rusticité renforcée par les dialogues et par le jeu des acteurs non-professionnels.

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*le nom Flandre(s) vient en effet de "terres inondées".