vendredi 5 septembre 2008

Die Fälscher (les faussaires)


"... On est imprimeur pour répandre la vérité."

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S'il ne l'a pas inventé, une certaine logique prédestinait le mystificateur régime national-socialiste à avoir recours à l'arme économique du faux-monnayage contre ses principaux ennemis. Cette Aktion Bernhard, montée en 1942, recelait des qualités narratives susceptibles d'intéresser le cinéma depuis fort longtemps. Il a fallu la parution d'un ouvrage autobiographique d'Adolf Burger, principal artisan contraint du projet, pour que cette idée débouche sur un long métrage. Die Fälscher est d'ailleurs conçu davantage comme une fiction inspirée de faits authentiques que comme un véritable récit historique. En compétition à la 57e Berlinale puis nommé dans sept catégories aux Deutscher Filmpreis 2007, gros succès commercial aux Etats-Unis*, le sixième film de Stefan Ruzowitzky est devenu cette année la première production autrichienne récompensée par un "Oscar" du meilleur film étranger.
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La Seconde Guerre mondiale est finie. Un homme quitte la plage de Monte-Carlo muni d'un simple attaché-case, prend une chambre dans un des palaces de la principauté, se fait raser, tailler un costume et, le soir venu, se rend au casino. Ses gains à la table de poker attirent l'attention d'une jeune femme avec laquelle l'inconnu va passer la nuit. Dans l'intimité, elle remarque le matricule imprimé sur le bras de son amant. Berlin 1936. Salomon 'Sally' Sorowitsch, artiste contrarié d'origine russe et roi de la fausse-monnaie, est arrêté par l'agent Friedrich Herzog. En 1939, il est conduit comme Juif et criminel au camp de Mauthensen où ses talents graphiques sont remarqués et exploités. Cinq ans plus tard, il est transféré à Sachsenhausen.
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Dans le wagon à bestiaux qui l'emmène vers ce funeste camp de concentration au nord de Berlin, il rencontre Kolya Karloff, jeune élève des Beaux-arts d'Odessa, visiblement très affaibli par la malnutrition et les mauvais traitements. A son arrivée, Sorowitsch, Karloff et trois autres prisonniers, parmi lesquels se trouve Adolf Burger, sont accueillis par Herzog, devenu officier supérieur du camp. Installés dans deux baraquements isolés à l'intérieur du site, bénéficiant d'un confort et de soins inhabituels dans leur situation, ils sont appelés à renforcer une équipe chargée, dans le cadre de l'Opération Bernhard, de fabriquer pour le reich de faux billets en livres sterling d'abord puis en dollars. Responsable de l'atelier de retouche, Sorowitsch doit collaborer avec Burger, séparé de son épouse restée à Auschwitz, aux convictions morales bien plus affirmées.
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C'est précisément cette opposition morale, idéologique pourrait-on dire, qui donne à Die Fälscher son prix. Alors que la plupart des déportés en camps de concentration subissait l'absolu arbitraire de leurs tortionnaires, les compagnons d'Adolf Burger-Sorowitsch conservaient le choix de survivre en collaborant ou de mourir en le refusant, et participer par leur sacrifice à la guerre contre le nazisme. Stefan Ruzowitzky réussit, avec un certain réalisme et sans pathos inutile, à décliner cette élémentaire, héroïque mais terrifiante alternative en la situant à la fois sur les plans individuel (égoïsme caractérisé, potentiellement délateur, qui confine à l'autisme) et collectif (responsabilité, voire fraternité). Le cinéaste autrichien souligne également, par touches successives, la brutalité, l'opportunisme et la vanité des gradés ou officiers allemands, illustrant ainsi à sa manière, l'étroit appariement entre barbarie et déni d'humanité. Ruzowitzky joue aussi habilement sur le contraste entre la volontaire laideur froide des images et le lyrisme chorégraphique des tangos interprétés à l'harmonica par l'Argentin Hugo Díaz ou d'extraits d'opéras. La qualité des interprétations du Viennois Karl Markovics (méconnu en France jusque-là), qui campe solidement un héros ordinaire sans réel charisme ni créer d'empathie spontanée, et du Berlinois August Diehl (23) aurait probablement mérité d'être valorisée comme celle de leur oriental partenaire Devid Striesow.
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*les recettes locales (près de 5,5M$) ont presque amorti, à elles seules, le budget d'environ 4M€.

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