lundi 9 janvier 2006

Ripley's Game


"... Mais surtout parce cela est un jeu."

Liliana Cavani nous propose, avec Ripley's Game, une nouvelle adaptation cinématographique du troisième des cinq romans signés Patricia Highsmith, paru en 1974, mettant en scène le "fameux" Tom Ripley. Tout le monde, ou presque, se souvient de l'interprétation qu'en donnait Alain Delon dans Plein soleil de René Clément, rôle repris par Matt Damon dans la version d'Anthony Minghella sortie en 1999. Ici, après Dennis Hopper dans Der Amerikanische Freund tiré du même ouvrage, c'est l'excellent John Malkovich qui incarne l'énigmatique meurtrier. Présenté hors compétition à la Mostra de Venise 2002, le film n'a, étrangement, pas eu les honneurs d'une exploitation dans les salles françaises. Compte tenu de ses qualités réelles, il le méritait pourtant et l'édition vidéo vient partiellement réparer cette injustice.
Tom Ripley est un amateur d'art dont les compétences ne sont pas reconnues à sa juste valeur. Et comme il est susceptible, il est capable de tuer s'il se sent insulté. Il vit, grâce à une vieille mais lucrative affaire de faux dessins de maîtres, dans un somptueux palais italien de la région de Trévise avec sa compagne, la claveciniste et concertiste Luisa Harari. Lorsque son vieil "associé" Reeves lui demande de liquider, contre rémunération, un concurrent gênant à Berlin, Ripley refuse mais lui glisse le nom de Jonathan Trevanny, simple et innocent encadreur de la ville. Celui-ci, qui n'a publiquement pas une haute opinion de son riche voisin, est gravement malade et sa situation ne lui permet pas de faire vivre convenablement sa petite famille. Après avoir catégoriquement refusé l'offre de Reeves, puis hésité, Trevanny finit par accepter de tuer, pour cent mille dollars, cet homme appartenant à la mafia russe.
Polar, thriller ? Plutôt drame dans la mesure où le rythme est assez lent. Mais la tension est nettement présente après le premiers tiers du métrage. La psychologie du personnage-titre et sa violence sous-jacente est pourtant, d'emblée, soulignée par l'inattendue conclusion de la scène pré-générique. Sans atteindre le niveau du film de René Clément, bien servi notamment par son duo d'acteurs masculins, Ripley's Game est probablement l'adaptation la plus fidèle à l'esprit de l'auteur. Peut-être parce qu'il est dirigé par une femme, et, même si elle se fait rare au cinéma, pas n'importe laquelle. Celle qui avait intelligemment choisi Dominique Sanda pour être sa Lou Andreas-Salomé dans Al di là del bene e del male trouve en John Malkovich un interprète idéal en Ripley mature. L'acteur américain, fortement influencé par la culture européenne, apporte tout le flegme et toute l'ambiguïté (également homosexuelle ?) susceptibles de rendre son personnage à la fois rassurant et inquiétant, en un mot intéressant, voire subtil. La finesse du scénario, qui rend bien le caractère maléfique de l'intrigue et ménage quelques respirations humoristiques, est de laisser quelques questions en suspens au terme du film et de donner aux femmes, malgré leur faible occupation de l'écran, un rôle plus important qu'une lecture un peu trop rapide le laisserait penser. Soulignons enfin la qualité de la composition de Morricone, efficace à défaut d'être très typée (ce qui n'est pas toujours une qualité !)

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