mardi 15 mars 2005

Je suis un assassin


"Vous, vous êtes un raté, ça vous sauve."

Second long métrage de Thomas Vincent, cinq ans après Karnaval, Je suis un assassin est une libre adaptation du roman "Le Contrat" de Donald E. Westlake, auteur décidément en vogue ces dernières années*. Si l'ouvrage est ouvertement un polar, le film hésite entre thriller et drame psychologique, sans parvenir réellement à choisir. Au risque de perdre sa ligne directrice et, au final, sa cohérence. Présenté dans le cadre de la Quinzaine des Réalisateurs du Festival de Cannes l'année dernière, Je suis un assassin est sorti en plein été, au milieu de quelques blockbusters et pris en tenaille entre Hellboy et Garfield. L'accueil du public a été, à tort ou à raison, plutôt mitigé. A raison, nous semble-t-il.
Parce qu'il a raté son TGV pour Marseille, Ben Castelano, un auteur sans éditeur, croise par hasard Brice Kantor, écrivain à succès et ancienne relation. Dans le train, ce dernier lui avoue être en panne d'inspiration à cause d'un divorce difficile. Pour aider son ami, il propose de faire publier, sous son nom, par son éditeur, Kouznetov, un manuscrit écrit par Ben et de partager l'à-valoir. Mais Kantor se rappelle qu'il donne la moitié de ses gains à Lucie, son ex-épouse, et que l'idée n'en vaut donc pas la chandelle. Sauf... si Ben tue Lucie. D'abord incrédule, Ben décide d'en parler à sa femme, Suzy, laquelle, contre toutes attentes, trouve que la proposition mérite d'être envisagée. Ben se rend donc à Paris, attend Lucie, la suit jusque dans un théâtre où, au détour d'une conversation, il parvient à lui parler et à l'inviter à dîner.
Je suis un assassin démarre sur un pitch directement emprunté au Strangers on a Train de Patricia Highsmith. Différence notable cependant, dans la version de Thomas Vincent, ce n'est pas le Bruno Anthony qui commet le premier meurtre mais l'équivalent de Guy Haines. Et cela change tout. A partir de là, tout dérape, et pas seulement les personnages. Au lieu de ressentir la moindre culpabilité, Ben est pris d'une soudaine frénésie d'écriture pendant que madame commence à ne plus tourner rond. Dans le roman, le rôle féminin était très en retrait, l'intrigue jouant essentiellement sur l'échange d'identité psychologique entre les deux protagonistes masculins. Le réalisateur a décidé d'étoffer le caractère de Suzy et de s'intéresser à une double plongée, parallèle, dans la folie. Il n'est pas sûr que le récit y ait gagné en force, bien au contraire. La narration, dès l'ébauche de la troisième partie, sonne faux et les situations, déjà peu crédibles auparavant, deviennent carrément saugrenues. Même les acteurs, en déroute, sont amenés à sur-jouer des dialogues dérisoires. La bande musicale, d'inspiration sérielle et solennelle, semble, elle, pourtant encore y croire. Elle est bien la seule.
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*Payback de Brian Helgeland, Ordo de Laurence Ferreira Barbosa, sorti également en 2004 et le récent Le Couperet de Costa-Gavras, avec Karin Viard aux côtés de José Garcia.

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