"It's not the same."
En 1990, Mel Gibson fonde Icon Productions avec Bruce Davey et Stephen McEveety, société coproductrice du Hamlet de Franco Zeffirelli dans lequel il tient le rôle-titre. La même année, l'écrivain canadien Malcolm MacRury signe son premier scénario, une adaptation de The Man Without a Face, le troisième roman d'Isabelle Holland paru en 1972 qu'il propose peu après à la vedette de la série en cours Lethal Weapon.
L'acteur retient ce récit intimiste et controversé pour faire ses
débuts de réalisateur et, ne réussissant pas à trouver d'interprète*, se
résigne à tenir le rôle principal.
1968. Catherine Palin
et ses trois enfants, tous de pères différents, se rendent comme chaque
été dans une petite île au large de Boston pour y passer leurs
vacances. Pour Charles 'Chuck' Norstadt, le cadet, elles vont
assurément être studieuses. Le garçon orphelin de père vient d'échouer à
l'examen d'entrée de l'académie militaire d'Holyfield et entreprend de
préparer la session de rattrapage qui doit avoir lieu à la fin du mois
d'août. S'il réussit cette fois, il pourra alors échapper à cet
environnement exclusivement féminin si pesant. Sa mère ne songe qu'a se
remarier une cinquième fois et a jeté son dévolu sur Carl, un intellectuel barbu.
Sa demi-sœur aînée Gloria ne cesse de le dévaloriser et se montre cruelle à son égard ; Megan,
la plus jeune, est sympathique malgré son appareil dentaire mais trop
jeune pour l'intéresser. A une extrémité de l'île, dans une propriété
gardée par un berger allemand agressif, habite depuis sept ans un
personnage solitaire, Justin McLeod, un ancien professeur dont
la moitié du visage est affreusement brûlée. En dépit de son physique
rebutant et des rumeurs sulfureuses qui circulent sur lui, 'Chuck' finit par lui demander de l'aider à préparer son examen. D'abord réticent, McLeod finit par accepter.
La maîtrise dans la direction de ce premier film est d'emblée impressionnante. Mel Gibson sait éviter l'affectation ou les recettes faciles. Le "jeune" réalisateur, récompensé par deux "Oscars" en 1996 pour son Braveheart, peut, il est vrai, compter sur sa désormais longue expérience d'acteur et sur les conseils de ses amis Clint Eastwood et Peter Weir. Les thèmes développés par The Man Without a Face (paternité, ignorance et haine, différence, seconde chance)
sont traités plutôt finement. La critique de l'homophobie et la
pédophilie présentes dans le livre ont été soit gommées, soit
sensiblement atténuées par le script au profit d'une intense relation
maître-élève mal comprise par une mère égocentrique et par la société.
La sobriété de l'interprétation de Gibson dans ce personnage insolite** est à souligner tout comme l'étonnante prestation du jeune Nick Stahl
dans son premier rôle au cinéma. Apparaît déjà ici cette fascination
pour la souffrance, pour la mutilation ou la monstruosité qui vont se
révéler dans les films suivants de Gibson réalisateur.
___
*plusieurs acteurs, dont William Hurt,
ont décliné l'offre de jouer l'homme défiguré qui donne son titre au
film. Cette infructueuse recherche dément ceux qui prétendaient que Gibson avait délibérément choisit ce personnage pour "casser" son image habituelle auprès du public.
**influencé par celui du procureur Harvey 'Two-Face' Dent kanien ?!
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