dimanche 26 août 2007

Général Idi Amin Dada: Autoportrait (idi amin dada)


"... La seule façon de vaincre l'arbitre, qui est contre vous ou votre pays, est de gagner par K.O."

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Lorsque son ami Jean-Pierre Rassam lui demande de réaliser un portrait filmé* d'un chef d'Etat pour une chaîne du service public, Barbet Schroeder ne possède véritablement à son actif de réalisateur que deux fictions dramatiques rythmées par la musique de Pink Floyd. L'associé d'Eric Rohmer et producteur de Jacques Rivette choisit spontanément de partir en Ouganda et d'y rencontrer Idi Amin. Une (drôle de) façon comme une autre de sortir de ce double trip post-psychédélique. A cette époque, le général est à la tête de l'ancien protectorat britannique depuis trois ans à la suite du coup d'État organisé contre le contesté président Milton Obote. Sa présidence vire bientôt à la dictature, entamant dès 1974 une répression paranoïaque et meurtrière contre tous ceux qui pourraient être susceptibles de menacer le pouvoir.
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Le tournage de Général Idi Amin Dada... intervient alors que le Royaume-Uni et Israël, principaux bailleurs de fonds et d'armes, ont restreint leur aide à l'Ouganda. Pour éviter la faillite économique, Idi Amin est obligé de se tourner vers les pays arabes, notamment la Libye de Mouammar Kadhafi. Cette situation nouvelle explique en grande partie la virulente hostilité affichée par le "leader révolutionnaire", dont le père s'était converti à l'islam, à l'égard d'Israël où il avait pourtant suivi un entraînement parachutiste et qui lui apporta un soutien décisif au moment de son putsch. Cette animosité, surtout verbale, fondée à la fois sur une ignorance (feinte ?) et sur la recherche d'une image attractive, se concrétise dans le documentaire par une puérile et grotesque répétition d'une intervention militaire dans le Golan. Elle donnera également naissance, en juin 1976, à son invitation (hypothèse d'ailleurs évoquée dans un des entretiens du film) d'accueillir à Entebbe l'Airbus A300 français détourné par des terroristes du F.P.L.P. et de la Fraction armée rouge.
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"Il était une caricature du pouvoir, une chose à laquelle je suis totalement allergique. C'est de cette allergie qu'est né le film." Un peu à la manière d'Alfred Jarry avec son Ubu, Barbet Schroeder laisse Idi Amin se mettre en scène, justifiant ainsi le titre du documentaire. Figure contrastée, celui-ci incarne, à sa manière, l'incursion dramatique du romanesque dans le réel. Mis en confiance par l'équipe de journalistes, il se montre tour à tour mythomane convaincu apôtre de la vérité, charmeur, comique incohérent et excentrique, autosatisfait glorifié en chansons, démagogue, autoritaire (voir le monologue de la fameuse séquence du Conseil des ministres), mégalomane (autoproclamé "Last King of Scotland") prophétique et pathétique, autant de stigmates annonciateurs de sa folie sanguinaire finale, déjà à l'œuvre mais à petite échelle, dans l'introduction de cet Autoportrait.
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* de 52', la version cinéma ayant une durée de 86'.

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