"C'est quoi l'enfer ?"
C'est pendant le tournage de Panj é asr de Samira Makhmalbaf sur lequel elle était assistante que Marzieh Meshkini a eu l'idée de Sag-haye velgard. Au cours de repérages à Kaboul, l'épouse de Mohsen Makhmalbaf
visite une prison où des enfants sont hébergés avec leur mère
prisonnière. La trame narrative de son second film est pour l'essentiel
nouée. L'histoire se déroule en Afghanistan après la guerre
d'octobre-novembre 2001 mais elle pourrait tout aussi bien prendre pour
cadre un autre pays pauvre. Présenté à la Mostra 2004 et au Festival de Paris 2005, Sag-haye velgard a valu à sa jeune interprète Gol-Ghotai le prix de la meilleure actrice de cette dernière manifestation.
Gol-Ghotai et son grand frère Zahed
subsistent en récupérant des ordures et du bois dans les rues de
Kaboul. Ce jour-là, ils sauvent un chien poursuivi et menacé d'être
brûlé vif par des enfants qui le lient aux envahisseurs de leur pays. La
nuit, les deux vagabonds ont l'habitude de rejoindre leur mère dans sa
cellule où elle est enfermée pour adultère. Sans nouvelle de son mari
taliban pendant cinq ans, celle-ci s'était remariée pour échapper, elle
et ses enfants, à la famine. A son retour, le Mollah Rahman,
lui-même détenu par le gouvernement, avait réclamé et obtenu
l'emprisonnement de son épouse infidèle. Mais le directeur de la prison
refuse à présent d'héberger Gol-Ghotai et Zahed. Il
leur faut donc obtenir pour leur mère le pardon de leur père. Ou trouver
une autre solution pour ne pas dormir à la belle étoile dans le froid
des nuits afghanes.
Ni néo-réaliste*, ni fiction documentaire, Sag-haye velgard
est avant tout un drame poétique, parfois poignant, de l'errance, de la
survie et du sacrifice. Le film ne semble pas être porteur d'un
véritable message, à l'exception de celui, simpliste, des conséquences
d'une guerre dans un pays déjà sous-développé. La cohabitation de la
surdité (principalement masculine) et de la solidarité dans le dénuement frappe évidemment les esprits. Mais les figures (symboliques ?) des avions traversant le ciel, du logement automobile ou des combats de chiens restent abstruses. Sag-haye velgard est moins un manifeste qu'une atmosphère ; ceci posé, le film de Marzieh Meshkini séduit assurément.
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*la citation explicite de Ladri di biciclette, à la forte incidence sur la fin du scénario, ne constitue qu'une forme de "deus ex machina" à rebours.
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