"Ne me posez pas de question."
Après le retentissant échec de I Vinti, Michelangelo Antonioni est contraint d'opter pour une production plus classique, tant sur le plan du scénario que de la mise en scène. La Signora senza camelie, deuxième des trois collaborations avec Suso Cecchi d'Amico,
est donc un mélodrame sans charme réel dont les particularités sont de
prendre pour cadre le milieu cinématographique et d'offrir un petit rôle
au français Alain Cuny, déjà vu chez Curzio Malaparte aux côtés de Raf Vallone deux ans auparavant. Le personnage de Clara, starlette sans talent, avait été écrit pour Gina Lollobrigida, laquelle refusa de l'interpréter, jugeant qu'il lui ressemblait trop. Sophia Loren déclina aussi l'offre finalement acceptée par Lucia Bose, l'actrice principale du premier film d'Antonioni passée, dans l'intervalle, entre les mains de Luciano Emmer et Giuseppe De Santis notamment.
Découverte à Milan par le producteur Gianni Franchi, l'ex-vendeuse de tissu Clara Manni décroche un second rôle dans "Addio Siggnora". Pendant le tournage du film suivant, "La Donna sanza destino", dans lequel elle doit tenir la vedette au détriment de Lodi, son partenaire expérimenté, elle est acculée à accepter la proposition de mariage de Franchi
qui la courtise avec empressement. De retour de leur voyage de noces,
l'époux décide de ne plus laisser sa femme tourner de scènes
licencieuses, interrompant ainsi la production du film en cours au grand
dam de son associé Ercolino. Mais Clara ne se résout
pas à son statut de femme du monde et au foyer. Son mari lui propose
alors de produire pour elle une œuvre ambitieuse consacrée à la
jeunesse de Jeanne d'Arc. Présenté à Venise, le film est un désastre. Clara quitte la salle pendant la projection, suivie par le consul Nardo Rusconi, rencontré sur le tournage de "La Donna sanza destino".
Celui-ci compatit en silence à son désarroi avant de lui avouer sa
flamme. Les deux jeunes gens se revoient à Rome. D'abord réticente, Clara finit par accepter les avances de Rusconi.
Dans l'un de ses premiers courts métrages, L'Amorosa menzogna, Antonioni avait dépeint le tournage dans un studio romain d'un fumetto (roman-photo). Il en reprendra d'ailleurs l'idée pour son scénario de Lo Sceicco Bianco pour Fellini.
Le thème de la jolie jeune femme propulsée starlette de cinéma n'est en
soi pas vraiment original, en particulier à Cinecittà où les reines de
beauté étaient, à tous les sens du terme, monnaie courante. Sauf
peut-être chez Visconti co-auteur, deux ans plus tôt, de l'intéressant Bellissima avec la même Suso Cecchi d'Amico. La Signora senza camelie, qui évoque implicitement le célèbre personnage opératique d'Alexandre Dumas fils, ne l'égale pas et l'on est, de plus, surpris qu'il soit signé Antonioni. Il est vrai que le cinéaste n'avait pas encore rencontré Monica Vitti ! Dans un veine narrative comparable, les cinéphiles n'auront d'yeux que pour la belle Barefoot Contessa de Mankiewicz.
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