lundi 18 septembre 2006

El Cochecito (la petite voiture)


"Les vieillards sont comme les enfants..."

Après quelques expériences peu concluantes comme scénariste ou co-réalisateur, notamment aux côtés d'Alberto Lattuada, Marco Ferreri opère une reconversion dans la publicité. Au cours d'un voyage à Barcelone, il rencontre le journaliste et romancier local Rafael Azcona qui signera plus de quinze scénarii du cinéaste italien. Cette collaboration débute avec trois films produits dans l'Espagne franquiste, dont le dernier est cette noire comédie intitulée d'un innocent El Cochecito, "Prix de la critique" à la Mostra 1960, ancêtre ibérique de Tatie Danielle. Si la patte du Milanais n'est pas encore très affirmée, l'ancien apprenti vétérinaire observe déjà l'humanité avec le sarcasme d'un zoologiste ayant découvert une espèce... particulièrement ridicule ou pathétique.
Don Anselmo Proharán a rendez-vous chez son vieil ami Lucca, les deux hommes devant aller au cimetière déposer des fleurs sur la tombe de leur épouse respective. Pour s'y rendre, le second, invalide des membres inférieurs, va utiliser, avec une fierté ostentatoire, sa toute nouvelle petite voiture à moteur pendant que le premier doit prendre un taxi. Peu de temps après, le duo part à la campagne avec un hétéroclite groupe de connaissances, tous véhiculés grâce à une de ces chaises motorisées. L'envie de posséder un de ces engins prend alors irrésistiblement Don Anselmo Proharán, le poussant à simuler une paralysie des jambes pour convaincre, en vain, son avoué de fils, Carlos chez qui il réside, de lui en offrir une.
Très plaisante et grinçante comédie sur un vieillard qui retombe en enfance, convoitant le même "jouet" que celui de son copain, El Cochecito nous emmène dans un univers où les vrais handicapés semblent plus heureux que les pauvres valides et dans lequel le bonheur est avant tout matérialiste. Le monomane Don Anselmo est parfaitement ferrérien, alternant entre lubie apparemment déraisonnable, en fait destinée à lui redonner une dimension sociale, et authentique altruisme, notamment à l'égard du jeune Alvarito. Les thèmes de l'anormalité et de la téléologie, chers au réalisateur, sont déjà présents dans ce troisième film aux accents parfois tragiques. Efficace prestation du Madrilène José Isbert que l'on retrouvera, trois ans plus tard, dans le rôle titre de El Verdugo avec Nino Manfredi sur un scénario co-écrit par un certain... Rafael Azcona.

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