"Est-ce qu'il y a des nuisances ?"
Chantal Akerman
serait-elle définitivement obsédée par le thème de la migration ? La
grande majorité de ses films, fictions ou documentaires, l'évoque d'une
manière ou d'une autre. En 1993, par exemple, Sami Frey
changeait de logement dans le court métrage au titre sans équivoque Le Déménagement. Trois ans plus tard, Juliette Binoche
et William Hurt
troquaient leur appartement dans Un Divan à New York
. Pour sa comédie immobilière, culinaire et "érotique" Demain on déménage
, la réalisatrice belge remet, si l'on peut dire, le couvert. Avec le maître-queux, trois sauciers déjà présents dans La Captive
, son précédent film de fiction, Eric de Kuyper au scénario, Sylvie Testud
et Aurore Clément
devant la caméra. Le menu, plutôt frugal mais assez goûteux, est essentiellement composé de recettes... maison !
Après le décès de son mari, Catherine, professeur de piano, vient s'installer dans le duplex vétuste et encombré de sa fille Charlotte.
Celle-ci, écrivain sans réel talent de plume, a reçu la commande d'un
roman érotique, exercice ardu pour une jeune femme sans amant, peut-être
même sans expérience. L'appartement devenant exigu pour ses deux
occupantes, elles décident de le mettre en vente. Avec l'aide d'un agent
immobilier, M. Popernick, elles reçoivent alors la visite de couples instables ou mal assortis, parmi lesquels M. Delacre, bientôt séparé de son épouse, et une jeune femme enceinte qui va devenir l'amie de Charlotte.
Comédie tour à tour burlesque, dramatique et musicale, Demain on déménage
est avant tout une œuvre d'inspiration autobiographique et théâtrale. Les évocations des racines polonaises de Chantal Akerman
émaillent le film, le plus souvent sensorielles et à la saveur sucrée-salée (réfrigérateurs vides, fumées de poulet ou d'aspirateur, odeur de désinfection ou journal intime d'une grand-mère).
Le tournage a d'ailleurs été réalisé à Bruxelles, la ville de naissance
de la réalisatrice, et dans son quartier parisien de résidence.
L'histoire, qui développe des thèmes classiques (le temps, l'âge, l'absence et la rencontre ou la dichotomie cogitation/spontanéité),
est traitée sur un mode léger et théâtral, insolite et décalé, mais
dont on peut parfois regretter les côtés artificiels, notamment au
niveau des dialogues. Dans ce film de femmes, ce sont curieusement les
acteurs qui tirent le mieux leur épingle du jeu, l'incomparable Jean-Pierre Marielle
et le belge Lucas Belvaux
dans leur première collaboration avec Chantal Akerman
.
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