lundi 4 avril 2005

Demain on déménage


"Est-ce qu'il y a des nuisances ?"

Chantal Akerman serait-elle définitivement obsédée par le thème de la migration ? La grande majorité de ses films, fictions ou documentaires, l'évoque d'une manière ou d'une autre. En 1993, par exemple, Sami Frey changeait de logement dans le court métrage au titre sans équivoque Le Déménagement. Trois ans plus tard, Juliette Binoche et William Hurt troquaient leur appartement dans Un Divan à New York. Pour sa comédie immobilière, culinaire et "érotique" Demain on déménage, la réalisatrice belge remet, si l'on peut dire, le couvert. Avec le maître-queux, trois sauciers déjà présents dans La Captive, son précédent film de fiction, Eric de Kuyper au scénario, Sylvie Testud et Aurore Clément devant la caméra. Le menu, plutôt frugal mais assez goûteux, est essentiellement composé de recettes... maison !
Après le décès de son mari, Catherine, professeur de piano, vient s'installer dans le duplex vétuste et encombré de sa fille Charlotte. Celle-ci, écrivain sans réel talent de plume, a reçu la commande d'un roman érotique, exercice ardu pour une jeune femme sans amant, peut-être même sans expérience. L'appartement devenant exigu pour ses deux occupantes, elles décident de le mettre en vente. Avec l'aide d'un agent immobilier, M. Popernick, elles reçoivent alors la visite de couples instables ou mal assortis, parmi lesquels M. Delacre, bientôt séparé de son épouse, et une jeune femme enceinte qui va devenir l'amie de Charlotte.
Comédie tour à tour burlesque, dramatique et musicale, Demain on déménage est avant tout une œuvre d'inspiration autobiographique et théâtrale. Les évocations des racines polonaises de Chantal Akerman émaillent le film, le plus souvent sensorielles et à la saveur sucrée-salée (réfrigérateurs vides, fumées de poulet ou d'aspirateur, odeur de désinfection ou journal intime d'une grand-mère). Le tournage a d'ailleurs été réalisé à Bruxelles, la ville de naissance de la réalisatrice, et dans son quartier parisien de résidence. L'histoire, qui développe des thèmes classiques (le temps, l'âge, l'absence et la rencontre ou la dichotomie cogitation/spontanéité), est traitée sur un mode léger et théâtral, insolite et décalé, mais dont on peut parfois regretter les côtés artificiels, notamment au niveau des dialogues. Dans ce film de femmes, ce sont curieusement les acteurs qui tirent le mieux leur épingle du jeu, l'incomparable Jean-Pierre Marielle et le belge Lucas Belvaux dans leur première collaboration avec Chantal Akerman.

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