lundi 4 avril 2005

Du bei dao wang (le bras de la vengeance)


"Une gloire édifiée sur des monceaux de cadavres."

Duk bei do wong, en jouant principalement sur la surenchère de l'action au détriment du récit, est, sans aucun doute, le plus faible des épisodes de la trilogie. Le héros complexe et meurtri qui nous avions laissé au terme de Dubei dao s'est transformé en personnage presque caricatural et mutique, entraîné malgré lui dans un carnage étourdissant (étourdi-sang !). Hsia yu-yen, qui s'intercale entre les deux films, annonçait, dans une certaine mesure, cette dérive (liée à la pression de la concurrence de Long men ke zhen du rival King Hu* parti tourner sous d'autres cieux ?). Duk bei do wong réjouira donc les amateurs de combats bien réglés, confiés à nouveau aux soins du fameux Liu Chia Liang, et friands de la diversité du rayon des accessoires.
Respectant la promesse faite à Xiao-man, sa compagne devenue son épouse, Fang Cheng se satisfait de sa condition de simple paysan. Il reçoit, néanmoins, la visite de Guan Shun et Guan Heng, respectivement sabreurs Blanc et Noir, les messagers des Huit rois. Ceux-ci organisent, à l'occasion de la fête de la 5e lune, un tournoi de sabre auquel sont instamment conviés tous les maîtres des différentes écoles de sabre. Fang Cheng refuse l'invitation malgré les menaces de mort proférées par les deux envoyés. Peu après, maître Lu, de l'école du Soleil, accompagné de ses deux fils, se présentent chez Fang Cheng. Il insiste, mais en vain, sur l'importance de la présence du sabreur manchot à cette réunion pour déjouer le projet des Huit rois : régner sur le monde du sabre en éliminant physiquement tous les représentants des autres écoles. Lorsque ce plan est en passe de réussir, notamment par l'assassinat ou l'incarcération des maîtres concurrents et la chantage fait à leurs héritiers, Fang Cheng revient sur son refus d'intervenir et mène le combat destiné à défaire les Huit rois.
Linéaire et banal, le scénario de Duk bei do wong apporte, toutefois, quelques modifications par rapport à l'épisode précédent. De héros solitaire, Fang Cheng devient le chef incontesté d'une opération de revanche collective qu'il n'assume d'ailleurs qu'à contrecœur. Le personnage connaît une extension de ses talents dans la sphère du surnaturel puisque il est, à présent, capable d'évoluer dans les airs. Il est, enfin et surtout, désormais ouvertement et totalement invincible, ce qui atténue sensiblement l'intérêt dramatique du récit. Et puisque le fond vient à manquer, il faut se tourner vers la forme, laquelle ne manque pas de variété. Des situations de combat aux armes utilisées, la panoplie est bigarrée, chacun des Huit rois (dont une reine) possédant sa spécialité, de la séduction couplée à de multiples lames camouflées pour la demoiselle Hua aux disques tranchants pour le maître des roues en passant par le sabre-pistolet du dragon empoisonneur. Notons enfin la première apparition à l'écran de Ti Lung, que l'on retrouvera dans San duk bei do, la présence de David Chiang, le futur successeur de Wang Yu dans la trilogie et un nouvel emprunt musical, cette fois à un thème bondien.
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*un tout récent classement des cent meilleurs films chinois, dominé par le Xiao cheng zhi chun de Fei Mu (1948), place deux films de King Hu parmi les dix premiers (7e et 9e positions) alors que Chang Cheh n'est cité qu'à la 15e place avec Dubei dao.

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