"L'amour a une date de péremption ?"
S'il est un cinéaste contemporain qui ait de la suite dans les idées, c'est assurément le Thaïlandais Pen-Ek 'Tom' Ratanaruang. Depuis son premier opus, Fun Bar Karaoke, l'ancien étudiant de la Pratt Institute de New York semble habité par une étrange monomanie artistique donnant une remarquable cohérence, à la fois narrative (même sans Prabda Yoon qui avait signé les deux précédents scénarii) et artistique, à son actuelle filmographie. Seule la tonalité, légèrement obscurcie depuis Ruang rak noi nid mahasan, semble sensiblement infléchir cet enlignement, édifice cinématographique dont nous percevons à présent mieux l'inspiration et le style. Cinq ans après Mon-rak Transistor, ce sixième long métrage était également sélectionné, l'année dernière, à la 39e édition de la "Quinzaine des réalisateurs".
Un couple retourne à Bangkok en provenance des Etats-Unis pour assister à des funérailles. Wit Waïtayakun, incapable de trouver le sommeil en raison du décalage horaire, laisse son épouse Dèng dans la chambre de l'hôtel où ils sont descendus et se rend au bar pour y prendre un café. Là, il rencontre une jeune femme sur le pont de fêter son dix-neuvième anniversaire, originaire comme lui de Phuket. Ploy tue le temps en attendant 10h30, heure du rendez-vous que lui a donné sa mère venue de Stockholm. Wit lui propose de l'accompagner dans sa chambre pour s'y rafraîchir et dormir un peu. Cette invitation non concertée formulée par son mari à cette jeune et jolie étrangère provoque alors la mauvaise humeur de Dèng, épuisée mais aussi probablement éméchée et jalouse.
Présenté comme un drame psycho-érotique (au sens premier du terme) se donnant de faux airs de thriller, Ploy tient davantage d'une fable surréelle autour de l'amour, de la jalousie, du désir et de l'égarement. Parabole au cœur de laquelle se mêlent, sans vraiment se croiser, deux intrigues parallèles où se télescopent en permanence et indistinctement, réalité, rêve et pur fantasme. S'il évoque parfois un peu le Sex, Lies... (mais sans Videotape, quoique !) de Steven Soderbergh, le film de Pen-Ek Ratanaruang repose néanmoins sur des ressorts scénaristiques et scéniques assez dissemblables. L'ex-directeur artistique et réalisateur de publicités étire avec un visible plaisir l'espace de son quasi huis clos et le temps avec de longs plans et lents mouvements de caméra, volontiers placée en situation de voyeuse, et ses cadrages soignés. Déconcertant certes, mais réjouissant.
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