"C'est un triste chemin que de monter et de descendre à l'escalier d'autrui."
Avait-il décidé de prendre son nom au pied de la lettre et de s'y tenir ou ne pouvait-il tout simplement pas retrouver le chemin du retour de La Cité des enfants perdus, Marc Caro se faisait, depuis plus de dix ans, bien discret. Nous l'avions certes vu dans quelques courts métrages ou artistiquement associé aux productions de Jan Kounen ou Pitof, mais rien de réellement significatif. Jusqu'à ce qu'apparaisse en 2005 sur le bureau du producteur Richard Grandpierre un projet alors intitulé "Saint-Georges" en collaboration avec l'auteur de science-fiction vendéen Pierre Bordage (Kaena, la prophétie), également scénariste du récent Eden Log de Franck Vestiel. Un film français d'anticipation, c'est suffisamment rare(1) pour que l'on y prête attention !
La navette de liaison n°2 arrive à l'improviste au centre de détention psychiatrique Dante 01, situé en orbite de la magmatique planète du même nom. A bord se trouvent un individu cryogénisé et la psycho-généticienne de Neurinos Elisa B. venus rejoindre les occupants de la station composés de son responsable Charon, du médecin Perséphone, de sept criminels qui font office de patients et de trois membres chargés d'assurer la sécurité. Au terme d'un processus de réanimation, l'inconnu, placé dans la zone réservée aux prisonniers, reçoit l'accueil enthousiaste de l'illuminé Raspoutine voyant en celui qu'il baptise Saint-Georges, malgré les sarcasmes de César, le sauveur annoncé selon lui par Dieu. L'homme mutique, retrouvé seul couvert de sang dans un vaisseau long-courrier à la dérive, sujet à d'étranges et inquiétantes visions, est bientôt agressé par Bouddha, permettant à Elisa d'entamer sur ce dernier l'expérimentation des nouveaux traitements liés au projet NanovirX. Le détenu n'échappe aux effets fatals de l'injection de nano-composants que grâce à la mystérieuse intervention de Saint-Georges, lequel sauve également Moloch, un peu plus tard, d'une blessure mortelle au cou.
Alors que son ancien complice Jean-Pierre Jeunet a opéré, avec le nouveau siècle, un virage vers un cinéma disons plus traditionnel, Marc Caro semble encore préférer les univers fantastiques, dans lesquels son imagination artistique peut s'exprimer sans retenu. Cette formidable liberté intrinsèque constitue cependant au mieux un écueil possiblement surmontable, au pire le point d'origine d'une trajectoire (sidérale !) non contrôlée. Le reproche de privilégier la forme au fond formulé à l'encontre de l'ex-auteur de bandes dessinées(2) s'impose au fur et à mesure du développement d'un scénario resserré mais cryptique et finalement confus. L'histoire légendaire et ouvertement christo-messianique ouvre une voie singulière entre l'enfer (spatial) et le paradis (terrestre) ainsi qu'entre, de façon plus inattendue, 2001: A Space Odyssey et Alien³. Récréatif plus qu'authentiquement créatif, Dante 01 ne déchaîne ni l'enthousiasme... ni ne provoque l'ennui.
N.B. : les personnes épileptiques doivent prendre garde aux éventuels effets susceptibles d'être provoqués par la longue et répétitive séquence qui précède le final.
N.B. : les personnes épileptiques doivent prendre garde aux éventuels effets susceptibles d'être provoqués par la longue et répétitive séquence qui précède le final.
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1. Le Dernier combat de Luc Besson, Bunker Palace Hotel et Immortel d'Enki Bilal, Les Revenants de Robin Campillo ou Chrysalis de Julien Leclercq appartiennent en effet à un cercle étroit ; Babylon A.D. de Mathieu Kassovitz est essentiellement américano-français.
2. parues notamment dans "Métal hurlant" fondé, rappelons-le, par un quatuor constitué principalement par Mœbius, Jean-Pierre Dionnet et Philippe Druillet, magazine auquel collabora, entre autres, Enki Bilal cité précédemment.
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