"... J'ai peur que le destin ne se répète."
Si Kiryûin Hanako no shôgai n'avait quasiment fait que de la figuration au Japanese Academy Prize 1983, Yokiro,
sorti un peu plus de quinze mois plus tard, y récoltait l'année
suivante neuf des douze récompenses auxquelles il pouvait prétendre*.
Les deux drames tirés de romans de Tomiko Miyao présentent d'évidentes similitudes (au moins stylistiques) mais aussi de notables différences. Yokiro
possède en particulier une gravité opératique suffisante pour en
imaginer une véritable adaptation lyrique. Le film n'est d'ailleurs pas
sans évoquer parfois "La Dame aux camélias", la célèbre œuvre d'Alexandre Dumas fils portée à la scène par Giuseppe Verdi puis une bonne douzaine de fois à l'écran.
A la fin de son spectacle de chant, Tsuru
tente d'échapper aux deux hommes chargés de la tuer. Blessé, son
compagnon ne peut empêcher l'un d'eux d'accomplir son meurtre et
recueille Fusako, leur nourrisson, des bras de la mourante.
Printemps 1933, vingt ans plus tard à Kochi. Par sa trop grande retenue à
l'égard de ses clients, Momowaka ne donne pas entière satisfaction à Osodé,
la patronne du réputé établissement de geishas "Yohkiroh" qui obtient
néanmoins d'elle qu'elle s'amende. La belle et talentueuse geiko utilise
une partie de son revenu pour aider l'ancienne épouse de son père Katsuzo et faire des cadeaux à son demi-frère aveugle. La jeune Tomako avec laquelle vit à présent Katsuzo décide soudainement de devenir geisha. Mais sa candidature est déclinée par Osodé malgré le lien ancien qui l'unit à Katsuzo et elle est finalement vendue au bordel Tamamizu. Un peu plus tard, Momowaka, devenue la geisha d'honneur de "Yohkiroh", rencontre Saganoi, le jeune et bel héritier de la banque Nankai.
Près de trente ans après Akasen chitai, le dernier film de Kenji Mizoguchi, Yokiro
développe également un récit centré sur le sort de femmes vouées à
l'agrément et la manipulation des hommes. Sur fond de guerre larvée de
clans, le film déroule et croise les destins tragiques de deux "presque
sœurs", d'abord rivales (mémorable scène de lutte entre elles**). Le pessimisme "symptomatique" des œuvres d'Hideo Gosha
y trouve une expression fataliste, le réalisateur soulignant avec
beaucoup de finesse les zones d'ombre et de lumière de ses personnages,
leurs aspirations parfois complexes et leur vulnérabilité. Gosha est servit, il est vrai, par une distribution sans faille emmenée par un solide Ken Ogata mais surtout féminine, composée notamment des méconnues Kimiko Ikegami et Atsuko Asano ainsi que de Mitsuko Baisho, actrice d'Imamura et de Kurosawa, dans son troisième et dernier film avec Gosha.
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*parmi lesquelles celles des meilleurs réalisateur, scénario, photographie et acteur. Le prix du meilleur film était attribué à Narayama bushiko de Shohei Imamura dont Ken Ogata était également l'acteur principal.
**sans commune mesure avec l'aimable crêpage de chignons des Petroleuses Cardinale-Bardot !
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