"J'espère que les miracles existent."










Yeo-jin et Jae-young
sont deux adolescentes très proches l'une de l'autre. La première,
scolarisée, vit avec son père veuf, un policier dont l'épouse a été
assassinée. La seconde, insouciante, se prostitue "joyeusement" avec la
complicité de son amie qui prend les rendez-vous et met de côté les
sommes reçues. L'objectif est de réunir assez d'argent pour partir en
voyage en Europe. Jae-young s'attache facilement aux hommes qu'elle rencontre, en particulier à un musicien, ce qui ne plaît guère à Yeo-jin. Un jour, Jae-young
est surprise par la police dans une chambre d'hôtel avec un client.
Pour éviter l'arrestation, elle saute par la fenêtre et se blesse très
grièvement. Emmenée aux urgences, elle demande à son amie, qui a assisté
à la scène, d'aller chercher avant qu'elle ne meure le client musicien.
Yeo-jin s'exécute à contrecœur mais l'homme en question est
réticent et ne se laisse convaincre que lorsque la solliciteuse accepte
de faire l'amour avec lui. Lorsqu'ils arrivent à l'hôpital, il est trop
tard. Après avoir pensé détruire la liasse de billets récoltés par son
amie défunte et l'agenda avec les coordonnées de ses clients, Yeo-jin décide de rendre leur argent à chacun d'entre eux... en y mettant les formes.
Premier film de Kim Ki-duk
auto-produit, Samaria
, tourné en dix jours avec, hormis Lee Uhl
, des acteurs débutants (une constante chez lui, à l'exception de Hae anseon
avec la star locale Jang Dong-gun
), est d'abord une œuvre dotée, malgré la faiblesse de ses moyens, d'une grande rigueur formelle (elle mérite, à ce titre, pleinement sa récompense berlinoise). C'est ensuite un drame classique en trois actes (Vasumitra, Samaria, Sonata),
âpre, cruel, bien sûr brutal mais jamais de manière vulgaire. Un conte
réaliste sur la culpabilité et la rédemption** et, surtout, sur la perte
de l'innocence et du difficile apprentissage vers l'âge adulte.
L'utilisation des "Gymnopédies" d'Erik Satie*** n'est pas innocente puisque l'origine grecque du terme signifie "fête des enfants nus", cérémonie antique qualifiée, dans "Les Lois" de Platon, "de redoutables exercices d'endurance où il faut résister à la violence..."
Une "lecture" au premier degré du film est, bien entendu, possible.
Mais elle le rend, alors, presque totalement énigmatique et en limite
considérablement la force et l'intérêt. Le cinéma de Kim Ki-duk
n'est-il pas, depuis ses débuts, exigeant ?






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*que ceux qui ont aussi réagit de cette manière se manifestent... nous formerons un club !
**comme dans Bom yeoreum gaeul gyeoul geurigo bom
, à travers la nature.

***pour l'anecdote, mais il ne s'agit pas, là non plus, d'un
hasard, la sonnerie du cellulaire du père de Yeo-jin est un extrait de
"Plaisir d'amour", célèbre chanson populaire écrite en 1775 par
Jean-Paul Martini et Jean-Pierre Claris de Florian.