vendredi 30 avril 2004

Wanda


"Je ne vaux rien."

Seul film, en tant que réalisatrice et scénariste, de Barbara Loden Kazan, Wanda est un film à part, pas vraiment expérimental, plutôt une manière de confession-témoignage sur une expérience tragique de l'existence. Tourné, visiblement, avec très peu de moyens, sans démarche esthétique si ce n'est de dépeindre, avec un naturalisme parfois sordide, la réalité telle que la vivent des individus et non des acteurs, il sombra très vite dans l'oubli malgré son "Prix de la critique internationale" à Venise en 1970 et sa sélection à la Quinzaine des réalisateurs du Festival de Cannes 1971. Marguerite Duras, séduite par le film, désirait acquérir les droits de distribution mais c'est Isabelle Huppert qui les obtint et permit une ressortie en salles en juillet 2003.
Wanda (Barbara Loden), séparée de son mari, mineur de charbon en Pennsylvanie, vit chez sa sœur. Sans emploi, elle a du mal en trouver un, ne possédant aucune compétence, même simple. Elle accepte, sans rechigner et sans contrariété, la demande de divorce et de garde de ses deux jeunes enfants formulée par son époux devant le tribunal de leur petite ville. Elle rencontre Norman Dennis (Michael Higgins), un petit truand, alors qu'il est entrain de voler la caisse d'un bar. Elle couche avec lui, devient son larbin, son chauffeur et change d'aspect à sa demande. La refus d'un complice de participer à un hold-up dans une banque oblige Mr. Dennis à le remplacer par Wanda. Dans la première phase de l'opération, Wanda se montre efficace. Mais le braquage, lui-même, se passe mal.
Inspiré d'un fait divers, Wanda nous relate quelques jours de la vie de cet être sans nom, absent, un peu perdu dans un monde masculin qui abuse de la femme, et qui, probablement, se méprise. Existence misérable, sans espoir, sans vertu et sans sentiment qui, par hasard, va croiser la trajectoire, pas plus reluisante, d'un bandit, lequel, en imposant sa loi, lui donne provisoirement un sens. Le traitement est sans fioritures. Tourné en sept semaines, caméra à l'épaule, en plans souvent longs et larges, le film ressemble à celui d'un amateur. Les comédiens donnent le sentiment de ne pas jouer mais d'être, ce qui donne un aspect de documentaire tourné en une prise. "C'est sa Nuit du chasseur à elle B. Loden, une nuit qui nous illumine" déclare, enthousiaste, la marraine française du film, Isabelle Huppert. Sans aller jusque là, Wanda, plus proche d'un Sue d'Amos Kollek que de Woman Under the Influence de John Cassavetes, est un témoignage rare et personnel sur une artiste qui, entre son rôle de mannequin post-adolescente et sa courte carrière d'actrice, a toujours été façonnée par les autres. 

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire