Ghosts of the Abyss (les fantômes du titanic)

"... Et tout d'un coup... booouuuum. Et qu'a fait le poisson ? Ouaouh !"

Prologue et coïncidence amusante : il y a soixante-sept ans, le 14 avril 1937, le "Queen Mary" effectuait sa première escale à Cherbourg ; aujourd'hui, c'est son successeur, le "Queen Mary II", le plus grand paquebot du monde, qui accoste dans le port français.

L'idée du film est née en 1995 lorsque James Cameron, dans la phase de préparation de son Titanic, effectua un plongée vers l'épave du célèbre paquebot. On peut aisément imaginer que le choc et l'émotion ressentis à la vision de ce géant de métal englouti ont créé le désir d'en savoir davantage et d'explorer plus longuement les entrailles du navire. Il organise donc, six ans plus tard, une expédition à bord du navire scientifique russe "Academic Mstislav Keldysh", le même qui servira de base, l'année suivante, à la mission Bismarck. Doté d'un budget de 13M$, il peut envisager d'engager l'équipage qualifié du navire, ses deux sous-marins Mir 1 & 2, un personnel scientifique complémentaire (historiens, biologiste et microbiologiste) sur une période assez longue et d'emmener le navire "EAS" chargé d'emporter un "chandelier" géant de 12kW, La Méduse, pour éclairer le "plateau naturel" du film. Le budget finance également la construction de deux robots-caméras, décisifs pour atteindre les objectifs fixés, conçus par le frère du réalisateur, Mike, baptisés jake et elwood*. Le départ vers le site du naufrage intervient au cours de l'été 2001.

C'est Bill Paxton, acteur cameronien (Fantômes du Titanic est le cinquième film qui les réunit) et interprète de l'explorateur Brock Lovett dans Titanic, qui joue, ici, le rôle de témoin et de Candide. C'est avec lui et à travers ses (parfois encombrantes) impressions que nous découvrons puis visitons le naufragé. Par 4 000 mètres de fond et sous 3 000 tonnes de pression, les sous-marins font d'abord surgir, à la lumière de leurs phares, la silhouette de l'immense vaisseau puis apparaître les éléments de sa superstructure. Ce sont jake et elwood qui sont chargés de nous faire visiter l'intérieur du bateau. Ce qui frappe, au spectacle de ce document, c'est que tous les lieux sont minutieusement identifiés. Nous sommées ainsi replacés dans les conditions d'exploitation du Titanic et voyons revivre, comme l'évoque son titre, un certain nombre de personnages qui l'ont fréquenté pour sa première et unique traversée. Pour cela, des images de synthèse ou des reconstitutions sont associées, voire superposées à celles filmées par les deux robots. Grâce aux témoignages des survivants, tous disparus aujourd'hui, de la catastrophe, on (ré)apprend le détail des événements qui sont rappelés sans s'en tenir à leur stricte chronologie ainsi que le parcours de personnalités comme le propriétaire de la compagnie maritime, le concepteur du bateau ou certains des passagers. On connaît même, ce qui parait incroyable, le propriétaire d'un chapeau-melon abandonné et retrouvé par les caméras (cf photo n° 7).

La mise en scène, attractive sur le principe, notamment grâce à l'utilisation de la technique Imax 3D pour la version cinéma, n'évite pas le phénomène de lassitude par la répétition des plongées, même en variant leur perspective de recherche. Les tentatives, parfois maladroites, de dramatisation des missions sont un peu superflues, d'autant que le film souffre déjà d'un incessant "surlignage" des sentiments et d'une certaine autosatisfaction. Autre longueur, la séquence de (double-)sauvetage de jake et elwood, coincés à l'intérieur du bateau, datée... d'un certain 11 septembre 2001. Malgré ces faiblesses, Fantômes du Titanic constitue un témoignage unique et intéressant sur un épisode de l'aventure (maritime) humaine dramatique devenu légendaire. La conjonction de l'intérêt d'un créateur et du progrès de la technologie a permis de sauver des images, jamais vues depuis près de cent ans, qui n'existeront probablement plus dans quinze ou vingt ans, lorsque les micro-organismes, qui rongent les structures du navire, auront achevé leur travail et que le Titanic s'effondrera sur lui-même.

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*sobriquets donnés en référence aux deux héros des Blues Brothers.