mercredi 14 avril 2004

I Was a Male War Bride (allez coucher ailleurs)


"Vous ne pouvez dormir ici."

Howard Hawks est, sans conteste et pour diverses raisons, un des metteurs en scène hollywoodiens les plus intéressants des années 1930 à 1950. Sans lui dresser de statut comme nos amis des "Cahiers...", force est de reconnaître qu'il a réussit à laisser une empreinte personnelle et durable dans plusieurs genres du cinéma. Le polar et le film noir, bien entendu, avec notamment ces monuments que sont Scarface et The Big Sleep, le western avec un groupe de trois films qui sont pratiquement incontournables : Red River, The Big Sky et Rio Bravo. Il s'illustra également dans le film de guerre où son expérience de pilote dans l'armée de l'air lui donna, d'emblée, une crédibilité que ne possédaient pas certains de ses confrères. Mais, étrangement, c'est avec la (folle) comédie que le nom de Hawks est, souvent, le mieux associé. Il faut avoir vu Bringing Up Baby, voire même His Girl Friday, pour prétendre être exhaustif sur le sujet. Les deux succès mettaient à l'affiche Cary Grant. C'est, naturellement, sur lui que repose I Was a Male War Bride, cette quatrième et avant-dernière collaboration entre les deux hommes.
Le capitaine Henri Rochard (Cary Grant) de l'armée française se rend en Allemagne juste après la Seconde Guerre, pour retrouver un trafiquant. Pour sa dernière mission avant de retrouver la vie civile, il fait à nouveau équipe avec le lieutenant. Catherine Gates (Ann Sheridan) de l'armée américaine, pour laquelle il n'a pas une grande sympathie, c'est le moins que l'on puisse dire. Après maintes mésaventures, surtout cocasses, ils découvrent que cette animosité cache en réalité une attirance. Ils décident de se marier. Mais rien n'est simple quand on est dans l'armée, d'autant que la différence de nationalité et le retour aux Etats-Unis de la nouvelle Mme Rochard ne font qu'aggraver les choses.
Il faut le dire tout de suite, bien que les deux films jouent un peu sur des situations semblables et sur des ressorts comiques assez proches, le scénario de ce film, apparemment tiré d'une expérience vécue, n'égale pas, loin s'en faut, celui de Bringing Up Baby. Tournée en Allemagne, la première partie est particulièrement faible. Seul les dialogues émergent, épisodiquement. La seconde n'est pas beaucoup plus inspirée, même si son intrigue est plus "sérieuse" et plus structurée. L'utilisation du comique de répétition est excessive et on assiste davantage à un one (wo)man show, celui de Cary Grant, qu'à une duo équilibré, comme c'était le cas avec Katharine Hepburn. On a souvent l'impression qu'Ann Sheridan est spectatrice plus qu'actrice de la prestation de son partenaire. C'est d'ailleurs le seul film qu'elle tournera avec Hawks. Absolument aucun des personnages secondaires n'est développés. Le réalisateur règle longuement ses comptes avec les lourdeurs administratives, ce qui, hélas, reste d'actualité mais dont la satire a perdu une partie de sa force comique. Il choisit également de ridiculiser la France en faisant endosser cet "uniforme" à un Cary Grant maladroit, dominé par la femme et un peu grotesque. L'acteur, en français, n'est pas vraiment crédible ni convaincant. Curieusement, l'épisode de son travestissement en femme, qui donne son titre au film et le symbolise souvent, n'occupe qu'une dizaine de minutes avant sa chute. On peut lui préférer, sans difficulté, dans le genre, le Some Like It Hot de Wilder, tourné dix ans plus tard. I Was a Male War Bride est une farce sympathique mais qui n'a pas l'envergure qu'on lui prête parfois. Seuls les inconditionnels de Cary Grant y trouveront leur compte.

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