mardi 27 janvier 2004

Raw Deal (marché de brutes)


"Pour respirer à fond de nouveau."

En 1948, le film majeur d'Anthony Mann est He Walked by Night dont le traitement se rapproche de celui de T-Men. La logique aurait voulu que ces deux opus soient réunis dans un même coffret. Plus drame à l'atmosphère sombre que véritable film noir, Raw Deal partage avec T-Men son acteur principal, la photographie de John Alton et une musique signée Paul Sawtell.
Construit à partir d'un scénario original, Raw Deal est la narration d'une de ses héroïnes, Pat Cameron.
Elle relate l'évasion, avec son aide, de son amant, Joe Sullivan de la prison où il purge, depuis un an, une peine d'au moins trois ans. Son associé, Rick Coyle, un dangereux maniaque du feu, a organisé cette évasion car il y voit un bon moyen de se débarrasser de celui à qui il doit une forte somme d'argent. Contre toutes attentes, l'évasion réussit mais le couple, auquel se joint contre sa volonté (et celle de Pat) la collaboratrice de l'avocat de Joe, Ann Martin, est poursuivit par la police. Plus que par celle-ci, la vie de Joe est mise en danger par la rivalité qui oppose les deux femmes pour gagner le cœur de leur compagnon et par les hommes de Rick chargés de l'éliminer.
Intrique amoureuse sur fond de polar plus qu'authentique film de gangsters et de règlement de comptes, Raw Deal est surtout intéressant pour l'opposition entre les deux femmes et le déchirement cornélien que crée leur présence chez le personnage principal. Il doit beaucoup à l'une et cela justifierait qu'il parte avec elle. Il aime l'autre, d'abord de manière instinctive, pulsionnelle puis de façon plus rationnelle parce qu'elle lui permet de retrouver celui qu'il a été et aurait voulu continuer d'être. Et enfin parce qu'elle lui sauve la vie et lui déclare, alors qu'il ne s'y attend pas vraiment, son amour.
La narration n'est pas aussi incisive que dans T-Men, elle doit d'avantage composer avec les atermoiements psychologiques des personnages. On frôle presque la théâtralisation avec l'épisode du meurtrier passionnel poursuivi par la police jusque dans l'auberge d'Oscar où sont réfugiés nos fuyards. Il s'agit d'un authentique deus ex machina sensé modifier la nature des relations entre Joe et Ann mais qui ne manque pas de dérouter dans un film comme celui-là. Enfin les personnages principaux sont trop "moraux" pour prendre une authentique dimension "noire".
Passé, sans transition, de l'agent secret au truand en fuite, Dennis O'Keefe est tout aussi convaincant. Mais la prestation masculine la plus intéressante, bien que courte, reste celle de Raymond Burr (déjà présent dans Desperate) dans le rôle de ce Rick bien inquiétant. Du côté des actrices, match nul mais interprétations qui sont loin de l'être entre une Pat-Claire Trevor (la Dallas de Stagecoach de John Ford et l'Helen Greyle de Murder, My Sweet de Dmytryk que l'on retrouvera, la même année que Raw Deal dans un second rôle de Key Largo de John Huston) amoureuse, tourmentée mais lucide et Ann-Marsha Hunt embarquée dans une affaire qui la dépasse et qui laissera des traces. 

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