samedi 31 janvier 2004

On Dangerous Ground (la maison dans l'ombre)


"Les flics n'ont pas d'amis."

En 1951, hormis Johnny Guitar, les meilleurs films de Nicholas ray ont déjà été tournés. Il est vrai qu'avec They Live by Night et In a Lonely Place, le presque quadragénaire architecte et homme de théâtre reconverti dans le cinéma avait frappé fort. Pour la R.K.O., il avait réalisé quelques jolis succès comme A Woman's Secret avec Maureen O'Hara ou Born to Be Bad avec Joan Fontaine et, déjà, Robert Ryan, aprés avoir débuté chez Columbia avec Knock on Any Door dans lequel apparaissait Humphrey Bogart. On Dangerous Ground n'est pas une oeuvre aussi forte que ses prédécesseurs. Elle laisse un sentiment de faiblesse narrative et d'inachevé et ne peut subir, frontalement pour ces raisons, la comparaison avec certains films contemporains comme Sunset Boulevard ou Asphalt Jungle, tous deux sortis en 1950.
Jim Wilson (Robert Ryan) est un policier qui a onze ans de carrière derrière lui. Il vit seul et semble fatigué de faire ce travail pour lequel il doit fréquenter les pires individus et n'obtient, finalement, que peu de considération ou satisfactions en retour. Ses méthodes se radicalisent, il n'hésitent pas à frapper les suspects pour accélérer le processus judiciaire et faire tomber, par exemple, les tueurs de deux de ses collègues. Sa violence et son malaise inquiète ses partenaires avec lesquels il patrouille et son supérieur doit intervenir pour qu'il modifie son attitude. Il l'envoie même "prendre l'air" dans les montagnes, non pas en vacances mais pour aider le shérif local à résoudre une affaire de meurtre sur mineure. Sur place, il fait équipe avec Walter Brent (Ward Bond), le père de la victime, bien décidé à faire justice lui-même dès qu'il aura mis la main sur le criminel. Ils poursuivent celui-ci jusqu'à une maison occupée par Mary (Ida Lupino), une femme aveugle et isolée qui se révèle être la soeur du jeune homme, psychologiquement instable, recherché. La rencontre entre Jim et Mary, malgré (grâce à ?) un contexte dramatique, va changer leur vie.
Adapté de l'ouvrage de Gerald Butler, "Mad with Much Heart", le réalisateur, avec ce film, développe son thème favori du personnage blessé. Mais On Dangerous Ground présente une trop grande rupture entre ses deux parties et un manque de densité narrative qui nuisent à son efficacité. On peut accepter qu'une affaire de meurtre puisse donner lieu au déplacement d'un policier purement urbain (la première partie en est la preuve manifeste) dans une province reculée dans la mesure où sa complexité est avérée et son intervention réellement utile. Ici, l'affaire est d'une simplicité confondante et l'assassin presque capturé à l'arrivée du personnage central. En outre, la mise en scène est quelconque : la lumière est plate, les cadrages et les plans plutôt faibles, seules quelques scènes de la première partie, même si elles ne brillent pas par leur originalité, méritent l'attention. On cherche vainement la "touche" de Ray, cette sensibilité qu'il sait, habituellement, si bien faire passer. La composition de Robert Ryan (qui venait de tourner Flying Leathernecks et, on l'a dit, Born to Be Bad avec Ray) n'est pas plus convaincante, de même que celle d'Ida Lupino (imposée par la production), qui a du mal à retrouver le niveau de ses précédents films. On Dangerous Ground est la dernière apparition de Charles Kemper, second rôle des années 1940 et, ici, coéquipier de Robert Ryan, décédé avant la sortie du film. Enfin, la partition de Bernard Herrmann se contente de reprendre des motifs déjà entendus sous la baguette du maître, y compris celui aux cors pendant la poursuite dans la montagne.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire