On Dangerous Ground (la maison dans l'ombre)
"Les flics n'ont pas d'amis."
En 1951, hormis Johnny Guitar
, les meilleurs films de Nicholas ray
ont déjà été tournés. Il est vrai qu'avec They Live by Night
et In a Lonely Place
, le presque quadragénaire architecte et homme de théâtre reconverti dans le cinéma avait frappé fort. Pour la R.K.O., il avait réalisé quelques jolis succès comme A Woman's Secret
avec Maureen O'Hara
ou Born to Be Bad
avec Joan Fontaine
et, déjà, Robert Ryan
, aprés avoir débuté chez Columbia avec Knock on Any Door
dans lequel apparaissait Humphrey Bogart
. On Dangerous Ground
n'est pas une oeuvre aussi forte que ses prédécesseurs. Elle laisse un
sentiment de faiblesse narrative et d'inachevé et ne peut subir,
frontalement pour ces raisons, la comparaison avec certains films
contemporains comme Sunset Boulevard
ou Asphalt Jungle
, tous deux sortis en 1950.
Jim Wilson (Robert Ryan
)
est un policier qui a onze ans de carrière derrière lui. Il vit seul et
semble fatigué de faire ce travail pour lequel il doit fréquenter les
pires individus et n'obtient, finalement, que peu de considération ou
satisfactions en retour. Ses méthodes se radicalisent, il n'hésitent pas
à frapper les suspects pour accélérer le processus judiciaire et faire
tomber, par exemple, les tueurs de deux de ses collègues. Sa violence et
son malaise inquiète ses partenaires avec lesquels il patrouille et son
supérieur doit intervenir pour qu'il modifie son attitude. Il l'envoie
même "prendre l'air" dans les montagnes, non pas en vacances mais pour
aider le shérif local à résoudre une affaire de meurtre sur mineure. Sur
place, il fait équipe avec Walter Brent (Ward Bond
),
le père de la victime, bien décidé à faire justice lui-même dès qu'il
aura mis la main sur le criminel. Ils poursuivent celui-ci jusqu'à une
maison occupée par Mary (Ida Lupino
),
une femme aveugle et isolée qui se révèle être la soeur du jeune homme,
psychologiquement instable, recherché. La rencontre entre Jim et Mary, malgré (grâce à ?) un contexte dramatique, va changer leur vie.
Adapté de l'ouvrage de Gerald Butler, "Mad with Much Heart", le réalisateur, avec ce film, développe son thème favori du personnage blessé. Mais On Dangerous Ground
présente une trop grande rupture entre ses deux parties et un manque de
densité narrative qui nuisent à son efficacité. On peut accepter qu'une
affaire de meurtre puisse donner lieu au déplacement d'un policier
purement urbain (la première partie en est la preuve manifeste)
dans une province reculée dans la mesure où sa complexité est avérée et
son intervention réellement utile. Ici, l'affaire est d'une simplicité
confondante et l'assassin presque capturé à l'arrivée du personnage
central. En outre, la mise en scène est quelconque : la lumière est
plate, les cadrages et les plans plutôt faibles, seules quelques scènes
de la première partie, même si elles ne brillent pas par leur
originalité, méritent l'attention. On cherche vainement la "touche" de Ray
, cette sensibilité qu'il sait, habituellement, si bien faire passer. La composition de Robert Ryan
(qui venait de tourner Flying Leathernecks
et, on l'a dit, Born to Be Bad
avec Ray
) n'est pas plus convaincante, de même que celle d'Ida Lupino
(imposée par la production), qui a du mal à retrouver le niveau de ses précédents films. On Dangerous Ground
est la dernière apparition de Charles Kemper
, second rôle des années 1940 et, ici, coéquipier de Robert Ryan
, décédé avant la sortie du film. Enfin, la partition de Bernard Herrmann
se contente de reprendre des motifs déjà entendus sous la baguette du
maître, y compris celui aux cors pendant la poursuite dans la montagne.
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