vendredi 29 octobre 2010

Il Gatto a nove code (le chat à neuf queues)


"Si on pouvait attraper une seule de ces lanières..."

 - film - 1358_3
Le succès engendre parfois les contraintes. Celui de L'Uccello dalle piume di cristallo rend Dario Argento moins libre de ses choix, en particulier celui des acteurs. Pourtant doté d'un budget doublé par rapport au précédent, Il Gatto a nove code(1), co-production européenne toujours conduite par Argento père, semble pâtir de cette relative servitude, considéré en outre comme le moins apprécié de ses films par le cinéaste. Signé avec son aîné Dardano Sacchetti, rencontré en 1969 et avec lequel Argento avait déjà écrit plusieurs scénarii pour la plupart inexploités, ce polar moins fidèle aux codes du giallo apparaît comme le moins inspiré, le plus erratique des volets de la Trilogie animalière.
 - film - 1358_8
En rentrant une nuit chez lui en compagnie de sa jeune nièce Lori, Franco 'Biscottino' Arno entend quelques bribes d'une conversation entre deux hommes à l'intérieur d'une automobile. Le créateur aveugle d'énigmes invite alors la fillette à tenter d'apercevoir les interlocuteurs mais seul le visage du conducteur est visible. Un peu plus tard, un individu assomme le gardien de l'Institut Terzi situé à proximité, pénètre par effraction dans le bâtiment puis dans l'un des bureaux. Le lendemain matin, cette visite nocturne laisse la direction de l'établissement de recherche médicale et la police perplexes ; aucun objet ou document ne semble en effet avoir été détruit ou dérobé. En venant recueillir des informations, le journaliste Carlo Giordani rencontre incidemment Arno. De son côté, le professeur Calabresi, l'un des cinq chercheurs de l'institut, connaît mais ne peut révéler la raison et l'auteur de l'intrusion. Il accepte de rencontrer celui-ci, une des personnes réunies dans le bureau de Terzi, à la gare centrale. Lorsque le train de 17h10 arrive, Calabresi, poussé sur la voie par un inconnu, est mortellement percuté et écrasé par le convoi. Un collègue de Giordani, venu accueillir une vedette, photographie la chute. Le cliché de l'accident, à la une du quotidien, attire l'attention de Lori et d'Arno. Ce dernier apprend grâce à Giordani que l'image a été recadrée. Le tirage intégral effectué par Righetto montre la main du meurtrier. Mais le photographe ne tarde pas à succomber par étranglement dans son laboratoire, la photo et son négatif disparaissent.
 - film - 1358_13
Accrocheuse, l'idée primitive du film(2) perd une grande partie de sa vigueur au fur et à mesure du développement de l'intrigue. Certaines situations (la cécité d'Arno), vacillations ou contorsions narratives (le pseudo inceste terzien, le rapt de Lori) voire séquences entières (celle du cimetière en particulier) finissent même par susciter au mieux le doute, au pire le bro(an)card. Les clins d'œil (en plans très rapprochés), impulsifs ou assumés, au Peeping Tom de Michael Powell n'arrangent d'ailleurs rien à l'affaire. A croire que Dardano Sacchetti(3), nourri très tôt aux productions horrifiques US mais aussi époux de la "spécialiste" Elisa Briganti, nous exprime ici les premiers effets d'une tardive indigestion. Les productions auxquelles a participé le futur étroit collaborateur de Mario Bava n'ont, il est vrai, rien d'emballant. Le spectateur ne peut se raccrocher ni à la photographie d'Erico Menczer, successeur de Vittorio Storaro, ni à la bande originale(ment) décevante de Morricone, ni au casting international composé des Etasuniens James Franciscus(4) et Karl Malden, sous-employé, ainsi que de la Française Catherine Spaak (que l'on a préférée chez Risi ou Monicelli). Au final, comme aurait dit le provocateur Donatien Alphonse François, "pas de quoi fouetter un chat !"
___
1. appellation d'un instrument de torture, sorte de redoutable martinet à lanières nouées et/ou griffées.
2. l'isolement fictif d'un chromosome XYY prédisposant ses porteurs au meurtre. Un argument génétique plaidé très sérieusement l'année dernière dans une affaire criminelle et retenu par un juge de la cour d'appel de Trieste !
3. avec lequel Argento sera (ou non) crédité pour le diptyque Dèmoni/Dèmoni 2: l'incubo ritorna de Lamberto Bava et La Chiesa de Michele Soavi ; Mlle Argento apparaît dans les deux derniers.
4. dont la seule prestation réellement convaincante au cinéma fut en soldat Sorenson dans The Outsider aux côtés du regretté Tony Curtis.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire