mercredi 3 février 2010

Paris Blues


"Nothing else works for people like us."

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Septième réalisation de Martin Ritt, Paris Blues est adapté du roman éponyme d'Harold Flender publié en 1957. Toute première production du photographe Sam Shaw (qui collaborera ensuite à quatre films majeurs de John Cassavetes), ce drame romantico-musical s'inscrit dans ce mouvement, réapparu après-guerre, étroitement impulsé par le jazz. Tour à tour prétexte à biopics consacrés à un artiste (The Glenn Miller Story, 'Round Midnight, Bird), essentielle sonorité musicale (Ascenseur pour l'échafaud, Anatomy of a Murder, Breakfast at Tiffany's...) ou, comme ici, simple élément narratif d'une fiction. Ritt réunissait pour l'occasion trois remarquables acteurs qu'il avait déjà dirigés séparément, le second avec le couple Woodward-Newman après The Long, Hot Summer.
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Le tromboniste Ram Bowen et le saxophoniste Eddie Cook se produisent tous les soirs au sein d'un sextet dans le parisien "Club 33" de la chanteuse Marie Séoul, amante occasionnelle du premier. A cran en raison d'une composition dont il doute de la qualité, Bowen la soumet à son camarade trompettiste 'Wild Man' Moore qui vient d'être accueilli en triomphe par des admirateurs à son arrivée en gare en provenance du Havre. Dans le train, il a croisé et aidé deux jeunes touristes américaines, Connie Lampson et Lillian Corning, et leur a proposé de venir l'écouter au club. Lillian ne cache pas à son amie son intérêt pour leur réputé compatriote installé à Paris et la convainc d'accepter l'invitation. De son côté, Moore s'engage à confier la partition de son ami au producteur de concerts classiques René Bernard. Après leur set, Cook et Bowen retrouvent Connie et Lillian et entament avec elles une relation amoureuse. La première, future enseignante et attachée à la cause anti-raciste, tente de convaincre Moore de rentrer aux Etats-Unis.
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Aussi alléchante soit elle, la seule affiche associant deux des plus "belles gueules" d'Hollywood de cette époque, alors en pleine possession de leurs moyens, ne parvient pas à compenser l'évidente faiblesse du scénario. A la différence du Young Man With a Horn de Curtiz, du The Man with the Golden Arm de Preminger ou de Pete Kelly's Blues (la trompette serait-elle un instrument plus tragique ? Ask Chet!), Paris Blues manque en effet singulièrement d'une réelle intensité dramatique. Sur les thèmes des atermoiements du cœur et du dilemme carrière-amour, le film de Martin Ritt joue résolument en mode mineur. Le réalisateur blacklisté y offre plutôt une sorte d'escapade folklo-touristique(1) dans laquelle les clichés sur Paris ("paradis du monde occidental") ne manquent hélas pas. Une frugalité narrative, qui confine à l'insouciance, reléguant même la cocaïnomanie de Michel 'Gypsy' Duvigne(2) au rang de simple contrariété supplémentaire. Le moment le plus trépidant reste sans doute la seconde apparition de Louis Armstrong (Cabin in the Sky) interprétant "Battle Royale" co-signé avec Duke Ellington. Aux côtés de l'irréprochable Joanne Woodward, Diahann Carroll réussit à ne pas passer totalement inaperçue. Chanteuse proche de Sidney Poitier, son récent partenaire dans Porgy and Bess, elle laisse pourtant ici le registre vocal à la Haute-savoyarde Barbara Laage(3).
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1. entre Exodus, The Hustler et Sweet Bird of Youth, on peut aisément comprendre le souhait de Paul Newman d'emmener son épouse en vacances !
2. joué dans sa seconde production étasunienne par un Serge Reggiani toujours attachant dont l'addiction est alimentée par une inattendue Hélène Dieudonné.
3. pour laquelle le rôle d'Elsa Bannister, finalement tenu par Rita Hayworth, dans The Lady from Shanghai avait été écrit.

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